Grande Encyclopédie Larousse 1971-1976Éd. 1971-1976
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Océanie (suite)

L’homme et les animaux

Aucun mammifère placentaire terrestre ne précéda l’homme en Océanie. Celui-ci y introduisit le porc, le chien, le poulet et le rat. Le porc, qui joue un grand rôle dans la vie sociale des Mélanésiens, était élevé partout, sauf en Nouvelle-Calédonie, en Nouvelle-Zélande et à l’île de Pâques. Il vivait plus ou moins en liberté dans les zones d’habitat. Il en était de même des poulets. Le chien suivit l’homme depuis l’Asie du Sud-Est jusqu’aux plus lointaines îles océaniennes. Il ne l’aidait pas à la chasse dans ces pays, dont les oiseaux étaient le seul gibier. Compagnon de jeu des enfants, comme les porcelets, il constituait une ressource alimentaire possible. Les rats, embarqués dans les pirogues et lâchés dans les îles, pouvaient également, en cas de disette, fournir un appoint alimentaire.

D’ouest en est, les espèces d’oiseaux, comme celles des végétaux sauvages et des coquillages, sont de moins en moins nombreuses. L’une des raisons en est que la dernière exondation des îles basses du Pacifique ne date que de 3 000 ou 4 000 ans. Les oiseaux étaient piégés ou capturés à l’aide d’un filet. L’arc était aussi utilisé dans l’ouest du Pacifique. Ailleurs, cette arme ne servait qu’à des compétitions sportives ; l’objectif n’était d’ailleurs pas une cible : celui qui tirait le plus loin gagnait, quelle que soit la précision de la visée. Ces oiseaux étaient surtout chassés pour leurs plumes, utilisées à la confection d’ornements pour les chefs ou les figurines divines. On a calculé qu’il fallut environ quatre-vingt mille oiseaux pour obtenir la quantité de plumes nécessaires à la confection de la cape d’un chef hawaiien conservée au Bernice P. Bishop Museum de Honolulu. Cette chasse et la collecte des œufs d’oiseaux de mer expliquent le dépeuplement aviaire de la plupart des îles du Pacifique.

Contrairement aux autres espèces animales, celles des poissons sont particulièrement nombreuses dans le Pacifique « vrai », c’est-à-dire à l’est des guirlandes insulaires mélanésiennes. Dans cet ensemble maritime le plus vaste du monde, les courants sont en effet divers, de même que la salinité et la température des eaux. La pêche était l’une des activités principales des Micronésiens et des Polynésiens. On utilisait des hameçons de bois, d’os et surtout de nacre, simples ou composites et de formes très variées. On se servait aussi de longues foënes et des harpons (aux îles Marquises et en Nouvelle-Zélande). On pêchait en rivière, dans les lagons ou en haute mer, on capturait les poulpes et les crustacés, et l’on collectait des coquillages près des plages, sur les récifs ou en eau profonde, en plongeant. Les tortues étaient pêchées à l’aide de filets, à la ligne ou harponnées. Leur consommation était souvent réservée aux dieux, aux chefs ou aux prêtres et toujours interdite aux femmes. On avait une très grande connaissance de la vie marine, des espèces toujours ou localement toxiques, des migrations des poissons, des temps favorables à telle ou telle pêche. Comme dans les autres domaines d’activité, ce savoir et sa pratique étaient liés à la vie religieuse.


La vie quotidienne


La vie domestique

Les habitations étaient en ordre dispersé. À côté de la case « cuisine » et de celle qui était réservée aux repas, se trouvait la case où l’on dormait. Une sorte de véranda pavée la précédait parfois en Polynésie centrale ; elle permettait de s’abriter du soleil et de la pluie. Ces cases, construites en matériaux d’origine végétale, à même le sol, sur un tertre ou sur une terrasse de pierre, étaient souvent de plan rectangulaire en Polynésie orientale. Ici, les grandes cases de réunion et, ailleurs, toutes les cases avaient leurs petits côtés arrondis. En Mélanésie se rencontraient également des cases de plan circulaire. Les demeures des chefs étaient très grandes, et leur construction était très soignée. L’habitat comprenait également de grands hangars pour les pirogues et des cases qui servaient de réserve pour les produits de l’horticulture. En Nouvelle-Zélande, cette case et la case de réunion des hommes étaient construites en bois et peintes, et leur fronton ainsi que les poteaux de soutènement étaient finement sculptés. On prenait aussi grand soin du décor des grandes cases de réunion en Micronésie, dans le centre-nord de la Nouvelle-Guinée, en Nouvelle-Calédonie.

Le mobilier était des plus simples : ustensiles de cuisine, crochets de suspension, parfois sculptés, paniers, coffres pour les pièces de vêtement et les parures, nattes, sur lesquelles on s’étendait, et tapa, qui servaient de couvertures. On trouvait également des appuis-tête en bois et, dans la case des personnages de haut rang, de petits tabourets. Le kava est une boisson stupéfiante que les hommes buvaient rituellement dans la plupart des îles du Pacifique. Le grand plat qui servait à sa préparation était accroché dans la grande case de réunion. Aux îles de la Société et aux îles Hawaii, une petite lampe en pierre permettait de s’éclairer médiocrement en y faisant brûler, par l’intermédiaire d’une mèche, de l’huile de noix. Ailleurs, cet appareil rudimentaire n’existait pas, et l’on se contentait d’enfiler, sur une petite tige de bois, cinq ou six noix de bancoul décortiquées. Celles-ci brûlant l’une après l’autre, l’ensemble éclairait pendant une heure environ.

Les ustensiles de cuisine comprenaient des plats ou des bols en bois, des gourdes et des poteries dans les régions à céramique. L’amande des cocos était grattée avec une râpe en corail ou en pierre. Des coquillages perforés permettaient d’éplucher les tubercules. On découpait la nourriture à l’aide d’un couteau en bambou. Des pilons en bois ou en pierre (en Polynésie orientale) servaient à réduire en pâte la pulpe des fruits et des tubercules. Certains aliments étaient mangés crus, avec ou sans condiment, tels divers poissons ou crustacés et les fruits non farineux. La cuisson des autres aliments s’effectuait à l’air libre ou dans une case réservée à cette fin. Le feu était allumé par frottement rapide d’une baguette dans une rainure de bois. Dans les régions où l’on utilisait la poterie, les aliments y étaient cuits « à l’étouffée ». D’autres techniques plus simples étaient utilisées un peu partout : chauffage de pierres volcaniques, que l’on plaçait ensuite dans un récipient en bois pour y faire bouillir les liquides ou épaissir les féculents dilués. Ces pierres servaient également dans le « four souterrain » : un foyer était allumé dans une fosse pour chauffer ces pierres ; on y déposait ensuite des paquets de nourritures enveloppés et protégés par des feuilles, et l’on recouvrait le tout de terre. La cuisson durait deux heures. Plus simple encore était la cuisson dans un bambou ou sur un tas de gravier corallien déposé sur un feu de bois.