nucléaire (énergie) (suite)
Les niveaux de production et d’équipement dépendent évidemment beaucoup des évaluations faites au cours des deux décennies précédentes en matière d’appréciation des coûts, et des variations de la demande globale. Les chiffres de production de l’U. R. S. S. et des démocraties populaires ne sont connus qu’avec un certain retard, et ils indiquent une production modeste jusqu’à ces dernières années. Dans le monde occidental, il y a à l’heure actuelle deux grands producteurs, les États-Unis, puis la Grande-Bretagne. En dehors de cela, on compte comme producteurs moyens la France, l’Allemagne fédérale, le Canada et l’Italie (plus le Japon).
Durant les dix années qui viennent, la poussée de la production devrait être particulièrement rapide aux États-Unis, où l’on s’inquiète de la dépendance croissante vis-à-vis de l’étranger en matière de sources d’énergie classique, en Allemagne fédérale et au Japon, qui étaient jusqu’ici peu équipés, et aussi, en France. Le taux de croissance serait moins élevé pour la Grande-Bretagne.
La production d’énergie nucléaire est née dans les pays où de grosses dépenses avaient été effectuées en matière d’armements atomiques. Les investissements au départ sont si élevés que les industries privées les plus puissantes ne pouvaient se lancer dans ce domaine sans être aidées par la recherche publique. En France, l’essentiel de l’effort a été confié au Commissariat à l’énergie atomique, avant que l’Électricité de France ne reprenne la direction du secteur. À l’étranger, la part faite aux groupes privés a souvent été plus importante, aux États-Unis en particulier : à l’heure actuelle, la plupart des installations que l’on crée dans le monde sont livrées par les groupes américains, directement ou par l’intermédiaire de sociétés dans lesquelles ils possèdent des participations importantes.
Les grands traits de la géographie de la production d’énergie nucléaire sont donc commandés par les niveaux de développement et les politiques énergétiques globales des nations. À l’intérieur de chaque nation, la localisation des installations obéit à des impératifs quelque peu contradictoires. L’usine est indépendante de celle des sources de métal, étant donné le très faible poids d’uranium consommé. Les contraintes sont liées à la nécessité de disposer d’eau de refroidissement, au souci aussi de ne pas implanter les centrales dans des zones trop peuplées, les risques de pollution n’étant sans doute pas négligeables. En Grande-Bretagne, par exemple, cela a conduit à installer les centrales sur les secteurs les moins peuplés du littoral. En France, on a choisi pour des raisons analogues le site de Brennilis dans les monts d’Arrée, en Bretagne. De manière plus générale, les implantations ont été dictées souvent par les lacunes dans la carte de répartition des unités traditionnelles de production : c’est ce qui a conduit au choix des sites de la vallée de la Loire, Avoine-Chinon ou Saint-Laurent-des-Eaux. En Europe occidentale, les essais de collaboration internationale ont parfois favorisé le choix de sites frontaliers (Chooz à la frontière franco-belge).
Le choix des sites se révèle difficile, et cela a conduit à ralentir, dans le cas des États-Unis, le programme des équipements. On se demande si le choix des sites littoraux, à la manière de la Grande-Bretagne, n’est pas lourd de menaces pour l’environnement marin. Dans un monde où on a le souci de protéger les zones de nature intacte, il est de plus en plus difficile de choisir les solitudes, alors qu’en région peuplée les réactions des habitants sont parfois vives.

P. C.
➙ Électricité / Énergie / Filière / Réacteur nucléaire.
J. Andriot, Économie et perspectives de l’énergie atomique (Dunod, 1964). [Voir aussi électricité, énergie.]
