Aragon (suite)
La guerre de l’Indépendance
Les Aragonais s’illustrent au cours de la guerre de l’Indépendance contre l’invasion napoléonienne, mais subissent des pertes considérables ; on estime que 53 878 personnes trouvèrent la mort aux sièges de Saragosse (1808 et 1809). La campagne aragonaise n’est pas épargnée non plus : autour de Saragosse, toutes les cultures sont ravagées (olives et vignes), et le nombre des ovins et des animaux de labour diminue sensiblement. En 1815, la situation est telle que l’État est contraint de tripler les impôts.
L’époque contemporaine
Jusqu’ici, l’Aragon semble former un ensemble homogène, si on laisse de côté les conflits sociaux. Par contre, si l’on examine le passé plus récent, on s’aperçoit que les différences et les nuances ne font que se renforcer. À l’occasion des luttes politiques du xixe et du xxe s., l’Aragon se scinde en deux parties : la plus riche et la plus développée, c’est-à-dire la région de Saragosse et de la vallée de l’Èbre, qui adopte en général une attitude de tendance révolutionnaire, et les terres les plus pauvres, correspondant aux Pyrénées et au bas Aragon, qui, elles, ont une position traditionaliste et conservatrice.
Saragosse est l’une des premières villes à se rallier au soulèvement constitutionnel dirigé par Riego (1820), alors que les zones montagneuses accueillent les guérilleros absolutistes qui viennent s’y réfugier. Lors des guerres carlistes, Saragosse défend âprement la cause d’Isabelle et du parti libéral, tandis que le bas Aragon est l’un des fiefs traditionnels du carlisme*. En 1843, Saragosse est l’une des cités à brandir le drapeau de l’insurrection et, en 1854, l’un des foyers de la révolution.
Il serait facile de multiplier les exemples de ce genre jusqu’à nos jours. Saragosse et les environs constituaient un noyau anarchiste actif, comme le prouvent les congrès de l’Internationale et de la Confédération nationale du travail qui s’y sont tenus, et votaient à gauche, contrairement aux régions situées dans la montagne.
Ces divergences découlent en fait de l’existence de substrats différents et de structures économiques et sociales très diverses, qui caractérisent, d’une part, le monde rural traditionnel de la zone montagneuse et, de l’autre, les régions de la vallée de l’Èbre, où ont pénétré l’industrie et l’agriculture commercialisée.
R. G.-P.
➙ Almoravides / Baléares / Barcelone / Carlisme / Castille / Cid (le) / Espagne / Reconquista.
P. J. Pidal, Historia de las alteraciones de Aragón en el reinado de Felipe II (Madrid, 1862-1863 ; 3 vol.). / A. Giménez Soler, La Edad Media en la Corona de Aragón (Barcelone, 1930). / R. Altamira y Crevea, Histoire d’Espagne (A. Colin, 1931 ; 3e éd., 1956). / R. Brunschvig, Documents inédits sur les relations entre la couronne d’Aragon et la Berbérie orientale au xive siècle (Larose, 1937). / A. Ballesteros y Beretta, Historia de España y su influencia en la Historia Universal (Barcelone, 1943-1948 ; 12 vol.). / A. Aguado Bleye, Manual de Historia de España (Madrid, 1954-1956 ; 3 vol.). / J. M. Casas Torres, J. M. Lacarra y de Miguel et F. Estape Rodriguez, Aragón (Saragosse, 1960 ; 2 vol.).