Grande Encyclopédie Larousse 1971-1976Éd. 1971-1976
N

New York (suite)

L’immigration, d’Europe orientale et méditerranéenne principalement, se poursuit jusqu’en 1914 : des foules misérables de Juifs russes, d’Italiens du Sud, de sujets de l’empire d’Autriche-Hongrie débarquent à Ellis Island. Elles constituent la main-d’œuvre à bon marché dont a besoin l’industrie. Ces immigrants, plus difficilement assimilables que les Germains et les Scandinaves dans le creuset anglo-saxon, s’entassent dans le Lower East Side et d’autres ghettos de Manhattan progressivement transformés en taudis. De leur côté, les vieux Américains et assimilés des classes moyennes se « suburbanisent » : les comtés de Westchester et de Nassau dans le New York, les comtés du nord-est du New Jersey s’intègrent progressivement à l’agglomération. Les quinze comtés de l’agglomération comptent près de 7 500 000 habitants à la veille de la Première Guerre mondiale, dont 5 000 000 pour les cinq boroughs de New York City.

Entre les deux guerres, surtout jusqu’à la crise mondiale, le système des transports en commun s’améliore et s’étend. Le métro est prolongé dans Brooklyn jusqu’à Coney Island et jusqu’à Richmond Hill au centre de Queens (1930). L’Independant Subway System ouvre une ligne le long de la 8e avenue à Manhattan (1932). On perce des tunnels routiers sous l’East River (Queens-Midtown) et l’Hudson (Lincoln et Holland). En conséquence, la suburbanisation, favorisée aussi par le développement de la voiture individuelle, s’étend dans toutes les directions ; les industries se dispersent dans l’agglomération à la faveur de la mobilité accrue de la main-d’œuvre. L’arrivée des Noirs depuis la guerre de 1914 aboutit à la création de ghettos comme celui de Harlem, principalement à partir de 1930 : 61 000 en 1900, 458 000 en 1940, plus d’un million en 1960, ils représentaient, en 1970, plus de 20 p. 100 de la population urbaine.

Depuis la Seconde Guerre mondiale, la partie centrale de l’agglomération connaît une certaine stagnation. La population de la ville n’a pas changé depuis vingt ans ; en fait, la situation varie d’un borough à l’autre : le Bronx et Queens gardent à peu près leur effectif, Manhattan a perdu une bonne part de sa population (2 Mhab. en 1945, 1,5 en 1970), Brooklyn s’est accru un peu, et Richmond fortement. Des comtés lointains sont gagnés par la suburbanisation, et leurs taux d’accroissement sont d’autant plus élevés qu’ils sont plus éloignés et moins densément peuplés ; c’est le cas de celui de Suffolk (moitié est de Long Island) et de ceux de Middlesex, Monmouth, Morris, Somerset dans le New Jersey. On constate aussi le vieillissement d’anciennes banlieues dépassées par l’onde d’urbanisation : Newark, Jersey City, Elizabeth, Paterson s’accroissent lentement et connaissent un déclin relatif ; la tertiarisation y progresse ; des ghettos noirs et des quartiers de classes moyennes noires s’y développent. L’immigration massive et récente de Portoricains, groupés surtout dans Manhattan, où ils compensent partiellement le départ des Blancs, aggrave les problèmes culturels, sociaux et économiques des ghettos.

Manquant de place dans la partie interne de l’agglomération, les nouvelles industries s’établissent à la périphérie : industries nobles, comme l’aéronautique et l’électronique, à l’est (Nassau, Suffolk) ; industries lourdes et polluantes, comme les raffineries et les usines chimiques, à l’ouest (Union, Middlesex, Essex, Bergen).

A. K. et P. B.


Les fonctions de l’agglomération

Dans les quatre aires métropolitaines, l’industrie procure plus d’emplois que chacune des autres catégories. Toutefois, si l’on regroupe les activités tertiaires répertoriées, la part de l’industrie relativement à celles-ci se trouve modifiée. Ainsi, dans la SMSA de New York, l’industrie est dépassée par le tertiaire (65 p. 100). Il en est de même, mais avec un écart moins grand, dans les SMSA de Newark (tertiaire : 54,1 p. 100) et de Paterson-Clifton-Passaic (49,3 p. 100). En revanche, l’industrie garde la première place à Jersey City (44,3 p. 100 contre 39,2).


L’industrie

L’agglomération new-yorkaise (15 comtés) représente le principal foyer industriel des États-Unis, tant par l’emploi (1 653 000 personnes) que par la valeur ajoutée (26,3 milliards de dollars). Elle tient la première place pour les industries suivantes : confection, construction électrique, fabrication des machines de bureau, industries chimiques et parachimiques, impression et édition ; en bref, des industries livrant des produits à haute valeur ajoutée (sauf la confection).

Après avoir été presque exclusivement new-yorkaise au siècle dernier, la confection contribue encore pour un tiers de la valeur ajoutée et un quart des emplois dans la confection américaine. Son développement au xixe s. et au début du xxe s. s’explique par l’accroissement du marché de consommation de New York, par les facilités d’approvisionnement en matières premières, par l’abondance de la main-d’œuvre, d’abord allemande, puis irlandaise, ensuite italienne, enfin et surtout juive, au point que même aujourd’hui judaïsme et confection sont quasi synonymes. Les ateliers d’ouvriers qualifiés effectuant l’ensemble des opérations et les entreprises pratiquant la division du travail avec du personnel peu qualifié sont de petite dimension (23 ouvriers en moyenne). La confection a quitté le Lower East Side, qu’elle occupait à l’origine, pour se fixer entre les 34e et 40e rues à l’ouest de la 6e avenue. Cette industrie connaît un déclin absolu et relatif au profit d’autres villes de l’État de New York, de la Pennsylvanie, du Sud, du Midwest, ainsi que des agglomérations de Chicago et de Los Angeles.

La construction électrique (10 p. 100 des emplois et de la valeur ajoutée de cette branche aux États-Unis) bénéficie de la présence de grandes firmes (outre leur siège social ou leurs bureaux, General Electric, RCA, Westinghouse, Fairchild ont des usines à New York), du marché de consommation (particuliers et surtout entreprises utilisatrices de matériel électrique), d’un milieu scientifique et d’un essaim de services hautement spécialisés, enfin des commandes militaires. Equipement de télécommunications, composants électroniques, appareils électriques pour l’industrie, instruments électroniques pour l’aviation civile et militaire sont fabriqués principalement à Brooklyn, Queens, Jersey City, Newark et dans le comté de Nassau. Les facteurs de développement de cette industrie à New York sont en même temps causes de faiblesse, parce qu’ils jouent aussi en faveur d’autres centres qui disposent des mêmes atouts : marché, milieu fertile, grandes firmes, commandes militaires (Chicago, Los Angeles).

L’industrie du matériel de bureau (machines à écrire, calculer ou reproduire, dictaphones, ordinateurs) connaît les mêmes conditions de localisation et d’expansion à New York que la construction électrique, mais aussi les mêmes causes de concurrence, les grandes sociétés possédant des usines en dehors de l’agglomération new-yorkaise.