Grande Encyclopédie Larousse 1971-1976Éd. 1971-1976
N

Népal (suite)

Le Népal n’a qu’une voie ferrée, qui relie une ville du Terai, Amlekganj, au réseau indien. Mais un réseau routier moderne est en construction. La vallée de Katmandou est reliée à Raxaul (Inde), via Bīrganj, par une route nouvelle ; elle est reliée à Lhassa par la route de Kodari, œuvre des techniciens chinois. Une grande voie est-ouest est en construction pour relier Katmandou aux principaux centres du Moyen Himālaya. Des aérodromes fonctionnent à Katmandou, Pokharā, Bhairawā, Bīrganj, et les lignes aériennes relient les villes montagnardes au monde extérieur.

Les progrès du commerce ont développé considérablement l’économie monétaire. Les paysans vendent des produits agricoles pour pouvoir acheter des produits importés, essentiellement d’origine indienne : sel, épices, vêtements, quincaillerie, papeterie, allumettes, médicaments, etc. Tandis que la fermeture de la frontière tibétaine (1959) a condamné le commerce transhimalayen, le commerce avec l’Inde s’est développé. Le Népal exporte surtout des produits alimentaires. Il acquiert aussi des devises étrangères grâce à l’activité de certaines ethnies (Tamāngs, Gurungs), dont les jeunes gens s’expatrient pour s’engager dans l’armée indienne sous l’appellation de soldats « gurkhās », ou pour louer leurs services comme gardiens privés. Il n’est pas douteux que l’économie a été profondément marquée par l’isolement du pays, qui ne s’explique pas seulement par des facteurs géographiques, mais aussi par la politique des Rānā, dynastie de ministres établie depuis le xixe s. Depuis 1950-51, le rétablissement du pouvoir monarchique a permis la réouverture du Népal et une politique de modernisation.

J. D.

➙ Himālaya / Inde.

 T. Hagen, G. O. Dyhrenfurth, C. von Fürer-Haimendorf et E. Schneider, Mount Everest ; Aufbau, Erforschung und Bevölkerung des Everest-Gebietes (Zurich, 1959). / T. Hagen, F. Traugott Wahlen et W. R. Corti, Nepal, Königreich am Himalaya (Berne, 1960 ; trad. fr. Népal, royaume de l’Himalaya, Berne, 1961). / P. P. Karan, Nepal, a Cultural and Physical Geography (Lexington, 1960). / C. von Fürer-Haimendorf, The Sherpas of Nepal (Londres, 1964). / L. Boulnois et H. Millot, Bibliographie du Népal, t. I : Sciences humaines (C. N. R. S., 1970). / J. Dupuis, l’Himalaya (P. U. F., coll. « Que sais-je ? », 1972). / D. Odier, Népal (Éd. du Seuil, coll. « Microcosme », 1976).


L’art du Népal

Tout au long de leur histoire, les artistes népalais ont été des transformateurs : ils ont assimilé l’influence de l’Inde* en lui apposant le cachet de leur originalité propre. C’est essentiellement la sculpture qui témoigne des temps anciens ; car la peinture n’apparaît, avec les miniatures, qu’au xiie s. Par ailleurs, il ne subsiste plus de vestiges d’architecture ou de sculpture sur bois antérieurs à 1394.

Les similitudes qui existent entre les découvertes des fouilles de la plaine du Gange et celles de Tilanrakot, Banjarāhī et Paisia, dans le Terai, dénotent, au iiie s. av. J.-C., une pénétration certaine de la culture maurya et śuṅga au Népal. Mais elle ne semble pas avoir franchi les chaînes, car les recherches limitées de Hadigao, Tagimpat et Dhum Varāhī, dans la vallée de Katmandou, ne révèlent pas d’établissement antérieur au début de l’ère chrétienne. Le pilier d’Aśoka de Rummindi (iiie s. av. J.-C.) semble marquer la limite septentrionale de l’expansion maurya.

Stella Kramrisch a pu écrire que « l’histoire de l’art du Népal ne commença réellement qu’avec l’arrivée des dieux hindous ». Cela explique la brutalité des premières œuvres de la statuaire népalaise, relevant de l’art gupta. Les associations homme-animal, femme-arbre et les couples deviennent populaires. Ainsi, le Varāha de Dhum Varāhī (ve s.), où l’avatāra-sanglier de Viṣṇu est associé à la terre qu’il vient de sauver de l’océan. Mais on remarque dès le ve s. un profond changement de style. Dans le Vainteya de Changu Nārāyan (bas-relief, 464), l’énergie et la force physique dominent malgré l’attitude d’adoration humble. Cette œuvre est bien différente du Viṣṇu Vikrantamurti de Katmandou (467), exécuté par des artistes indiens. L’énergie n’est plus massive, mais rythmée et harmonieuse. La sculpture est conçue comme le théâtre : en mouvement. Le Viṣṇu Vikrantamurti de Tilgangā (467), exécuté par des artistes népalais, accuse la différence.

Du ve au viie s. s’étend une période très féconde. Servis par leur habileté de tailleurs de pierre et leur sens esthétique, les artistes népalais poursuivent leurs recherches. La simplicité et la perfection des traits, l’équilibre des proportions créent une beauté humaine idéale, d’où émanent sérénité et pureté. Le Bouddha de la rive de la Bhāgmati illustre bien cette réussite. Puis l’art du Népal suit l’évolution de l’art indien, qui recherche le grandiose, voire le gigantisme, pour exalter les dieux hindous. Le Nārāyana Anantaśayin de Buddhanīlakaṇṭha marque ainsi la décadence et la fin de l’art népalais d’influence gupta.

Au viiie s., l’influence des bronzes pāla de l’Inde de l’Est se fait sentir. Dans la Cour céleste de Viṣṇu de Pāśupatināth (ixe s.), beaucoup de conventions gupta sont reprises : personnages de profil, encombrement de la scène, détail des cuirasses ; mais le style pāla est déjà intégré. Les corps sont élancés, vigoureux et non plus gigantesques. Dans d’autres œuvres, la complexité du décor floral et du drapé des vêtements est encore plus nette. On date de 1012 la première représentation de la famille de Śiva au Népal. À cette époque, le style pāla l’a définitivement emporté. D’autre part, la peinture se développe grâce à l’introduction dans les monastères népalais de manuscrits bouddhiques illustrés. L’esprit de tolérance avait toujours favorisé les échanges religieux et culturels entre les communautés bouddhistes et hindouistes. Des influences diverses se devinent. Certaines peintures hiératiques rappellent la sculpture pāla. Par ailleurs, l’élégance des poses et le raffinement du décor évoquent les fresques d’Ajaṇṭā. Les tentures, les bannières ou tanka se rapprochent des œuvres tibétaines, avec un arrière-plan chinois atténué.