Grande Encyclopédie Larousse 1971-1976Éd. 1971-1976
N

Namibie (suite)

La pénétration allemande

Si on excepte l’expédition de Willem Van Wick en 1738 et plusieurs incursions le long des côtes du Sud-Ouest à partir du Cap, les Boers ne s’intéressent guère au pays ; c’est une région peu attrayante, dont la côte est désertique ; on trouve très vite, à l’est, le Kalahari, ce qui réduit sensiblement la surface utile. Cependant, des missionnaires allemands, agissant pour le compte de la London Missionary Society, avaient créé, dès le début du xixe s., un centre de prédication ; cet établissement connut des difficultés lors des conflits entre les « Néo-Namas », venus de la colonie du Cap, et les Bantous. À partir de 1840, la London Missionary Society cède la place à des missions allemandes ; des postes sont alors fondés : Windhoek (1842), Rehoboth (1845). Tandis que la lutte entre Néo-Namas et Bantous se poursuit, les « Basters » effectuent une migration tout à fait semblable aux trek des Boers ; ils s’installent en 1870 au sud de Windhoek. Des Boers, quittant l’Afrique du Sud, pénètrent aussi dans le pays, mais, le trouvant trop aride, partent s’installer en Angola (1877).

De leur côté, les Anglais, sous l’égide de la Royal Geographic Society, explorent partiellement le pays (1836-1861) ; en 1878, ils annexent Walvis Bay. C’est un commerçant allemand, installé à Angra Pequeña, qui, après avoir baptisé ce site de son nom (Lüderitzbucht), achète des terres avec l’appui des missions installées à Bethanie et permet la pénétration allemande. En avril 1884, Bismarck assure Adolf Lüderitz (1834-1886) et ses établissements de la protection du Reich.

Les Allemands créent alors plusieurs compagnies, une pour l’élevage, une autre pour les mines, une enfin, à vocation multiple, où sont associés des capitaux allemands et britanniques. Le pays, d’abord confié à la Société coloniale allemande, est officiellement pris en charge par l’État en 1892.


La lutte contre les tribus

Les tribus, surtout les Hereros, ayant refusé de se placer sous la tutelle allemande, incitées parfois à la résistance par des agents anglais, les Allemands passent à l’offensive : après plusieurs semaines de lutte, les Hereros signent un « traité de protection » le 15 septembre 1884. Le Sud-Ouest africain, à partir de cette date, devient une terre d’élevage (dans la zone fertile) ; des colons allemands obtiennent de vastes domaines au détriment des Africains.


Le soulèvement des Hereros (1904)

En dépit des traités de protection, les Hereros demeuraient en état d’insoumission ; toutefois, les Allemands, jouant habilement sur les antagonismes entre les diverses tribus, avaient pu se maintenir. En 1904, un mouvement plus important se développe, dirigé par un chef que les Allemands avaient eux-mêmes placé à la tête des Hereros, Samuel Maharero (1856-1923) ; pendant ce temps, certaines tribus namas se révoltent aussi. Les Hereros gardent l’initiative pendant plusieurs mois ; mais, à partir d’août 1904, ils sont refoulés vers le nord, puis écrasés à la bataille de Hamakari. La répression qui suit est très dure ; elle soulève des protestations en Allemagne elle-même : en effet, le général L. von Trotha organise des ratissages où il fusille tous les Hereros qu’il rencontre, combattants ou non. La révolte des Namas est également écrasée.

L’opinion internationale vit dans cette campagne un génocide ; les autorités anglaises publièrent, à ce sujet, un Livre blanc, en 1918, dénonçant les atrocités des Allemands dans le Sud-Ouest africain.


L’installation de l’Afrique du Sud

Pendant la Première Guerre mondiale, le général Louis Botha (1862-1919), Premier ministre de l’Afrique du Sud, cède aux injonctions des Anglais et attaque le Sud-Ouest africain. Dès 1915, le territoire passe sous l’autorité de l’Afrique du Sud ; les attaques, en effet, aboutissent à la prise de Windhoek le 11 mai 1915, et les troupes allemandes se rendent le 9 juillet de la même année. En 1920, l’Afrique du Sud obtient un mandat de type B (administration directe) ; les Africains passent donc sous l’autorité du Cap, mais leur situation ne s’améliore pas pour autant.

La domination allemande, qui a duré trente ans, a laissé peu de traces : actuellement, 24 p. 100 de la population parlent allemand, 67 p. 100 afrikaans et 9 p. 100 anglais.

La colonisation prend une grande extension après 1915, favorisée par une importante aide publique. La législation sud-africaine est introduite ; elle permet de confiner les Africains dans les réserves, de fournir une main-d’œuvre abondante et bon marché aux entreprises agricoles et industrielles. Cependant, le gouvernement du Cap cherche à se débarrasser de la tutelle internationale. Il affirme bientôt sa souveraineté sur le Sud-Ouest africain — ce que la S. D. N. conteste — et envisage d’incorporer le pays dans l’Union comme cinquième province. En fait, le statu quo juridique est maintenu, mais une intégration de fait s’accomplit.


L’annexion totale

Dès 1946, Le Cap réclame l’annexion et rejette la tutelle des Nations unies ; en 1948, le docteur Daniel François Malan (1874-1959) accède au pouvoir. L’annexion est réalisée. Elle se traduit d’abord par l’intégration politique et administrative à l’Union sud-africaine ; en second lieu, le système de l’apartheid est étendu au Sud-Ouest africain.

Un conflit permanent oppose l’Afrique du Sud aux Nations unies, aux États africains, à l’O. U. A. (Organisation de l’unité africaine) et à l’opinion publique mondiale. Mais les textes, les résolutions multiples restent sans effet.

Depuis août 1966, un mouvement de libération, le S. W. A. P. O. (South West African People’s Organization) a engagé un processus de résistance militaire.

A. S. et P. P.

➙ Afrique du Sud (république d’).

 R. I. Lovell, Struggle for South Africa, 1875-1899 (New York, 1934). / C. A. Lüderitz, Die Erschliessung von Deutsch Südwest-Afrika (Oldenbourg, 1945). / C. Dundas, South West Africa : The Factual Background (Le Cap, 1946). / J. P. Van S. Bruwer, South West Africa, the Disputed Land(Le Cap, 1966). / J. H. Wellington, South West Africa and its Human Issues (Oxford, 1967).