Grande Encyclopédie Larousse 1971-1976Éd. 1971-1976
M

Moustique (suite)

En piquant un paludéen, l’Anophèle absorbe avec le sang le Plasmodium responsable de la maladie ; ce Protozoaire poursuit son cycle dans le corps de l’Insecte, puis migre dans ses glandes salivaires sous forme de sporozoïtes ; en inoculant sa salive chez un Homme sain, le Moustique introduit les germes du paludisme. Le virus amaril, qui provoque la fièvre jaune (vomito-negro), est transmis par Stegomyia fasciata (= Ædes ægypti). Dans les régions chaudes, des Moustiques du genre Culex transmettent d’un Homme à l’autre les embryons de la Filaire de Bancroft.

Le piaulement aigu émis par la femelle joue un rôle important dans la rencontre des sexes, prélude à l’accouplement. La femelle ne peut assurer la reproduction que si elle a pris au moins un repas de sang. Les œufs sont pondus à la surface des eaux stagnantes, soit isolément (Anopheles), soit groupés en minuscules radeaux (Culex).

Les larves vivent immergées et se nourrissent d’Algues microscopiques et de Protozoaires ; bien que leur tégument leur permette d’absorber l’oxygène dissous dans l’eau, elles assurent avec l’air atmosphérique l’essentiel de leurs échanges respiratoires ; la larve de Culex se tient obliquement par rapport à la surface, tête en bas, et fait affleurer un siphon subterminal ; celle d’Anophèles n’a pas de siphon et reste horizontale sous une mince pellicule d’eau. Egalement aquatiques et munies de deux siphons respiratoires au haut du corps, les nymphes sont capables de se déplacer avec rapidité en battant l’eau de leur abdomen flexible ; l’imago sort du tégument nymphal par une fente dorsale et utilise souvent sa dépouille comme radeau avant l’envol.

Dans les pays tempérés, le cycle de développement d’un Moustique comme Culex dure en moyenne six semaines ; comme la femelle pond environ deux cents œufs, un seul couple peut être à l’origine de millions de descendants au cours d’une saison.

Piqueurs irritants, dangereux vecteurs de germes, les Moustiques interdisent parfois l’implantation de l’Homme en diverses régions du globe. À la protection individuelle (moustiquaires, pommades ou essences répulsives) s’ajoutent des techniques massives d’éradication : drainage des eaux stagnantes et suppression de toute collection d’eau capable de procurer aux larves un milieu favorable ; épandage de pétrole destiné à asphyxier larves et nymphes ou usage de produits insecticides ; peuplement des étangs avec des animaux larvivores, comme les Gambusies. Beaucoup de ces moyens brutaux sont d’une efficacité discutable, et l’on étudie des procédés de lutte biologique mieux adaptés. L’un d’eux paraît prometteur : il consiste à répandre des mâles stérilisés par irradiation, mais encore capables d’accouplement ; en rendant les œufs inféconds, on espère réduire la pullulation de l’espèce choisie.

M. D.

➙ Diptères / Paludisme.

 E. A. Séguy, la Vie des mouches et des moustiques (Delagrave, 1947). / G. Senevet et L. Andarelli, les Moustiques de l’Afrique du Nord et du Bassin méditerranéen (Lechevalier, 1959).

Moutarde

Plante dont la graine sert à préparer un condiment.


Les Moutardes, plantes annuelles, appartiennent à la famille des Crucifères, et les espèces les plus employées font partie des genres Brassica et Sinapis. La semence de la Moutarde noire (Brassica nigra) est une graine très petite (de 0,5 à 1 mm de diamètre), ronde et de couleur brun noirâtre. La graine de la Moutarde brune (B. juncea) diffère de celle de la Moutarde noire par son diamètre (légèrement supérieur à 1 mm) et sa coloration brun rougeâtre. Ces deux variétés ont la particularité de renfermer un hétéroside, la sinigrine, qui, sous l’action d’une enzyme soluble, la myrosinase, et en présence d’eau, donne naissance à du glucose, à du sulfate acide de potassium et à de l’essence de moutarde, ou isothiocyanate d’allyle :
CH2=CH—CH2—N=C=S.
Cette essence volatile possède une odeur et une saveur brûlantes. La semence de la Moutarde blanche (Sinapis alba) est une graine de couleur blanc jaunâtre ; son diamètre peut atteindre 2 mm. Elle renferme également un hétéroside, la sinalbine, et de la myrosinase ; l’essence produite n’est pas volatile, et sa saveur est moins brûlante.

Les Moutardes sont des plantes particulièrement exigeantes : elles demandent un sol bien pourvu en engrais et en sulfates. L’action du soufre sur la teneur en huile essentielle a été démontrée. En sol de préférence alcalin et convenablement fumé, les rendements peuvent atteindre 20 quintaux à l’hectare ; toutefois, la récolte des graines pose des problèmes délicats, car, par suite d’une floraison échelonnée, les siliques arrivent à maturité à des périodes différentes et sont très sensibles à l’égrenage, ce qui rend impossible l’utilisation des moissonneuses-batteuses ; il s’agit là d’une des causes principales de la régression de la culture de la Moutarde en France. La Moutarde est cultivée principalement aux États-Unis, au Canada, en Inde et en Roumanie ; en France, elle reste localisée à l’Alsace et à certains départements du Nord et du Centre.

Les graines de Moutarde ont été utilisées de tout temps par l’Homme comme médicament et comme aliment.

La majeure partie de la Moutarde récoltée dans le monde est destinée à l’industrie condimentaire : moutarde de table, condiments, sauces. Cette industrie traite en France de 13 000 à 15 000 t de graines par an (principalement de la Moutarde brune). Elle est surtout localisée à Dijon (70 p. 100 des entreprises). La moutarde forte, ou moutarde de Dijon, est obtenue par le broyage des graines de la Moutarde noire ou brune dans du jus de raisin vert (verjus), du vin ou du vinaigre salé et aromatisé. Le mélange ainsi obtenu est tamisé afin de séparer les pellicules (son) de la pâte. Après le tamisage, une période de maturation permet le développement de l’arôme, du piquant et de la coloration. L’action du froid accroît sensiblement la durée de conservation de la moutarde de table, en ralentissant la dégradation de l’essence. Les graines des Moutardes noire et blanche entrent dans la composition d’un grand nombre d’autres condiments en poudre ou en pâte, et on les utilise dans la fabrication de la plupart des sauces piquantes.

En médecine, la farine est employée principalement comme révulsif, sous forme de bain sinapisé et de cataplasme ; on lui reconnaît également un pouvoir antiscorbutique. Les graines de la Moutarde blanche, dont les assises externes sont riches en mucilages (20 p. 100), sont conseillées comme laxatif.

G. V. et P. B.