Grande Encyclopédie Larousse 1971-1976Éd. 1971-1976
A

Aquitaine (suite)

L’Aquitaine est terre de polyculture : 610 000 ha sont en labours (dont 504 000 sont consacrés aux céréales) et 619 000 couchés en herbe ; 197 000 ha sont plantés en vignes et 25 000 occupés par des vergers. Enfin, 427 000 ha ne sont pas cultivés, domaines des landes, dont la superficie a été fortement réduite par des défrichements (surtout dans les Pyrénées-Atlantiques et la Dordogne).

Parmi les céréales, le maïs est de loin la plus importante. Introduite à la fin du xvie s., étendue au xviiie s., cette culture a été rénovée par l’emploi des hybrides américains, puis français après 1950. En 1968, 235 000 ha donnaient 1,3 Mt de maïs, dont les deux tiers provenaient des Pays de l’Adour ; quant au blé, il est surtout cultivé dans le Lot-et-Garonne. Élément de base de la polyculture, la vigne est présente partout, exception faite des hautes montagnes et de la plupart des cantons landais. Toutefois, les crises de la fin du xixe s. ont porté des coups rudes, sinon décisifs, à la viticulture des régions périphériques, notamment à celle du Périgord. Si le Bordelais fait la gloire du vignoble aquitain, la viticulture est aussi renommée dans d’autres secteurs (vins blancs de Monbazillac et de Jurançon) ; du raisin de table provient des coteaux de Port-Sainte-Marie, dans le Lot-et-Garonne.

Les cultures spéculatives ont été développées à la fin du xixe s. L’Aquitaine est devenue la grande région de culture du tabac en France (9 250 ha et 22 600 t en 1968) ; les superficies les plus importantes se rencontrent dans l’ouest du Lot-et-Garonne, l’est de la Gironde et le sud du Périgord. Née à la suite de la construction des chemins de fer, la culture fruitière a été rénovée par des Européens repliés du Maghreb : pommes, poires et pêches sont récoltées dans la vallée de la Garonne en aval d’Agen et dans celle de la Dordogne bergeracoise. L’Agenais fournit de gros tonnages de légumes (haricots verts et petits pois) et de tomates ; la culture des fraisiers a été étendue en Périgord.

L’élevage est relativement peu développé. On ne compte guère qu’un million de bovins, en majeure partie des vaches frisonnes, qui fournissent le lait aux villes. Il y a 600 000 moutons, dont un grand nombre de brebis laitières (pour la fabrication de fromage de Roquefort). Enfin, outre celui des porcs, l’élevage des volailles a toujours été une activité fondamentale : les Landes et, à moindre degré, le Périgord sont les pays du foie gras.

Des régions rurales françaises, l’Aquitaine est une des plus boisées (1,7 Mha). Hêtraies et sapinières accompagnent les grandes vallées pyrénéennes ; en Périgord, le châtaignier et le chêne ont reculé devant les conifères. Sous la direction de Nicolas Brémontier à la fin du xviiie s., puis de Crouzet et de Jules Chambrelent après 1857, les Landes, entre la Garonne et l’Adour, furent ensemencées en pins maritimes. Sérieusement touchées, surtout dans sa partie centrale, par les incendies des années 1945-1959, la forêt landaise fournit aujourd’hui du bois d’œuvre et du bois à pâte (cinq papeteries dans les Landes), mais la production de gemme est en déclin.

L’Aquitaine est faiblement industrialisée. Ses raffineries de pétrole réexpédient une partie de leur production vers le Poitou-Charentes ; la moitié des 7 milliards de mètres cubes de gaz produits à Lacq est exportée vers d’autres régions françaises, et 2 des 7 TWh d’électricité produits sont envoyés vers le nord. On n’extrait guère que des matériaux de construction, la plupart des mines métalliques étant épuisées. L’industrie a, depuis un siècle, sinon dépéri, tout au moins stagné. Exception faite de la cimenterie et de l’électrométallurgie, l’industrie de base est uniquement le fait de l’usine sidérurgique de Fumel. À côté d’industries de pointe, telles l’aéronautique et l’aérospatiale, les industries employant de gros effectifs de main-d’œuvre (chaussure, industrie alimentaire, constructions navales) connaissent le marasme.

Le bilan n’est pas négatif cependant. Le tourisme apporte des revenus appréciables sur la côte et dans la montagne (1,5 million de nuitées). La balance commerciale régionale est traditionnellement excédentaire, l’Aquitaine achetant surtout des produits agricoles et des pétroles. Mais n’est-ce pas là le signe d’une certaine stagnation et de la faiblesse de la décentralisation, à l’échelon régional, puisque l’industrie de transformation de ces produits se concentre dans les ports ?

S. L.

➙ Agen / Bayonne / Bordeaux / Dordogne / Gironde / Lacq / Landes / Lot-et-Garonne / Pau / Périgueux / Pyrénées-Atlantiques.


L’Aquitaine historique

Limitée aux contrées situées entre la Garonne, les Pyrénées et l’Atlantique par son conquérant César, étendue par Auguste au quart de la Gaule située au sud de la Loire, l’Aquitaine est incorporée au diocèse de Vienne et divisée au iiie s. apr. J.-C. en trois provinces : Novempopulanie (capit. Eauze), Aquitaine seconde (capit. Bordeaux) et Aquitaine première (capit. Bourges). Occupée en 412 et en 413 par les Wisigoths* d’Athaulf, elle n’est que très superficiellement germanisée. En fait, le maintien des cadres administratifs et religieux romains facilite le passage de l’Aquitaine catholique sous l’autorité de Clovis Ier, vainqueur des Wisigoths à Vouillé (507). Partie la plus riche et la moins perturbée par les invasions du « Regnum Francorum », la région perd son unité après 511, chacun des descendants de Clovis en demandant une part en héritage. L’Auvergne, le Poitou et la Touraine deviennent ainsi austrasiens, tandis que les rois de Neustrie règnent sur le Limousin, le Quercy, le Toulousain et que les rois de Bourgogne s’attribuent le Berry, le Périgord et l’Agenais. Théoriquement unifiée par Childéric II, dont le concile de Castres-sur-Gironde reconnaît l’autorité vers 672, l’Aquitaine unifiée devient pratiquement indépendante à la fin du viie s. sous la conduite de ducs nationaux : Loup (tué vers 676) ; Eudes, qualifié de prince d’Aquitaine au début du viiie s. ; Hunaud, dont Charles Martel doit reconnaître le titre ducal (736) ; enfin Waifre (Gaifier), son fils, que Pépin fait froidement assassiner (2 juin 768). Incorporée aussitôt au « Regnum Francorum » (capitulaire de Saintes), elle redevient autonome en 781, lorsque Charlemagne l’érigé en royaume au profit de son fils Louis. Divisé en une quinzaine de comtés, le royaume survit sous les règnes nominaux de Pépin Ier (817-838), de Pépin II (838-855), de Charles l’Enfant (855-866), puis de Louis le Bègue (867-877).