Grande Encyclopédie Larousse 1971-1976Éd. 1971-1976
M

missile (suite)

À la tête explosive se rattache la case d’équipement. Située entre le dernier étage du missile et la tête, elle comprend l’appareillage de guidage (plate-forme inertielle, calculateur électronique de bord) et le système commandant l’explosion de la charge. Dans le cas du guidage par inertie, les paramètres de la trajectoire nominale correspondant à l’objectif choisi sont introduits dans la case d’équipement immédiatement avant la mise à feu. Les antimissiles comportent une charge nucléaire spéciale, mise au point lors des explosions nucléaires souterraines et produisant d’intenses rayonnements, capables de neutraliser la charge du missile assaillant.


Le lancement des missiles

• Le lancement des missiles tactiques a lieu à partir de transporteurs-érecteurs mobiles, châssis automouvants tout terrain généralement chenilles. La mise en direction, le pointage et éventuellement le calage des gyroscopes exigent un certain nombre de moyens de servitude tels que groupe électrogène, appareillage topographique et éventuellement radars de guidage.

• Un transporteur-érecteur ne peut se concevoir pour les missiles stratégiques en raison de leur encombrement et de leur poids. Les Soviétiques confèrent à certains d’entre eux une mobilité réduite en les déplaçant sur transporteurs : pour soustraire leur déploiement à l’investigation des satellites de reconnaissance, ces missiles restent en position d’attente camouflée à proximité d’une aire de lancement aménagée. Mais les délais de mise en position de tir sont longs, et une telle solution ne peut se concevoir que dans le cas d’une stratégie offensive de « première frappe ». La stratégie de riposte exige, par contre, que le missile soit constamment à pied d’œuvre, prêt à être tiré, sur son site de lancement. Facilement localisé, il est très vulnérable s’il n’est pas efficacement protégé. Une solution consiste à le stocker dans un silo enterré, protégé par une grande épaisseur de béton, à partir duquel il est tiré ; l’orifice, obturé par un épais blindage, n’est dégagé qu’au moment du tir. Les silos ne peuvent survivre à une attaque par missiles stratégiques dotés d’une extrême précision que grâce à l’efficacité de leur protection. La mobilité en mer gardera son efficacité dans tous les cas tant que des progrès décisifs n’auront pas été accomplis dans la détection anti-sous-marine.

• Le lanceur des missiles antichars est rudimentaire : les missiles sont tirés des casiers dans lesquels ils sont transportés, disposés au sol et fixés sur un véhicule, un char de combat ou un hélicoptère. Les systèmes de pointage et de guidage sont à proximité ou dans le véhicule, le char ou l’hélicoptère. Les missiles tirés d’avions sont arrimés sous le fuselage ou sous les ailes ; une première phase de largage précède la mise à feu.


La trajectoire des missiles

Les missiles destinés à contrebattre des objectifs ponctuels, mobiles ou non, ont une trajectoire constamment en phase propulsée, donc susceptible de corrections continues ; si certains peuvent comporter une phase planante, ils sont, néanmoins, dotés d’autodirecteurs agissant sur la fin de trajectoire. Par contre, les trajectoires des missiles surface-surface, stratégiques ou tactiques, comportent une phase propulsée guidée, suivie d’une phase balistique. La partie balistique de la trajectoire est entièrement déterminée par la direction et la grandeur de la vitesse au point d’extinction des moteurs, dit point de cut off (fig. 1) ; la précision du tir est fonction de l’exactitude avec laquelle est obtenue cette vitesse. Un meilleur rendement, c’est-à-dire la dépense minimale d’énergie nécessaire pour atteindre une portée donnée, est obtenu en diminuant le freinage aérodynamique au départ par réduction du parcours dans l’atmosphère grâce au lancement vertical. Le rendement est également fonction de la géométrie de la trajectoire : d’après les lois de la mécanique, le missile décrit une ellipse dont l’un des foyers est le centre de la terre, et la trajectoire optimale est celle dont le second foyer est situé sur la droite joignant le point de lancement au but (fig. 2). Pour les missiles intercontinentaux, cette trajectoire correspond à une flèche d’environ 300 km. La durée de trajet d’un « ICBM », d’une portée d’environ 10 000 km, est de l’ordre de 30 mn. L’altitude élevée atteinte permet l’acquisition et la poursuite des missiles intercontinentaux par une chaîne de radars avancés dès la première moitié de leur trajectoire : les Américains évaluent le délai d’alerte à une quinzaine de minutes. Aussi, pour retarder l’acquisition, voire la rendre très difficile si la trajectoire passe entre les postes de détection avancés, une trajectoire basse est préférable, mais ne peut être obtenue qu’au prix d’un surcroît d’énergie fournie à la fusée : on lui donne le nom de trajectoire sur-énergétique (fig. 3). Des moyens très évolués, tels les radars transhorizons et les satellites géosynchrones d’observation-détection, peuvent, dans ce cas, suppléer la défaillance des radars avancés.


L’évolution des missiles stratégiques américains et soviétiques (1949-1972)

La compétition américano-soviétique débute en 1949 avec la guerre froide : les États-Unis et l’U. R. S. S. sont les seules puissances possédant alors l’arme nucléaire.

• Mettant lentement au point un programme de missiles, les Américains furent alertés en octobre 1957 par la spectaculaire mise sur orbite du premier satellite soviétique : puisque le lanceur du « Spoutnik » était capable de satellisation, il pouvait également transporter une charge nucléaire d’un continent à l’autre. Ainsi menacés sur leur propre territoire, les États-Unis prirent conscience de leur retard, qu’ils dénommèrent missile gap. Dès 1958, ils installèrent des bases de missiles à portée moyenne (« Thor » et « Jupiter ») en Angleterre, en Italie et en Turquie. Ils devaient les en retirer en 1962 en contrepartie du retrait à Cuba des missiles soviétiques. Concurremment étaient entreprises la construction des sous-marins nucléaires lanceurs de « Polaris » et celle des missiles intercontinentaux « Titan 1 », « Titan 2 » et « Atlas ». Seuls les « Titan 2 » restèrent en service après 1965 par suite de l’impossibilité de stockage et des délais de mise en œuvre des autres types.