Millet (Jean-François) (suite)
Des centaines de dessins au crayon noir, à la fois synthétiques et détaillés, exécutés dans son jardin, en forêt ou dans la plaine de Chailly-en-Bière, précèdent ses toiles, toujours brossées à l’atelier et parfois reprises à des années d’intervalle. Un souci d’établir la relation figures-paysage dans le même esprit que Poussin, son maître d’élection, culmine dans les Glaneuses (Louvre), dont tant de chromos ont édulcoré l’image bien que le Figaro de 1857 ait vu derrière elles « se préparer les émeutes et se profiler les échafauds de 1793 ». Une autre toile, l’Angelus (1859, Louvre), connut une immense popularité. Le réalisme est à son apogée dans l’Homme à la houe (1863, Hillsborough, Californie), la rigueur et le dépouillement dans la Herse (musée du Belvédère, Vienne).
À la fin de sa vie, l’attrait du paysage pur remplace celui de la figure humaine tandis que, par l’intermédiaire des pastels, les couleurs deviennent plus vives, côtoient l’impressionnisme* dans le Printemps (1873, Louvre). Tout le réalisme européen, de Mihály Munkácsy (1844-1900) à Jozef Israëls (1824-1911), a copié Millet. Les impressionnistes, surtout Pissarro, n’ont pas nié leur dette envers lui, et Van Gogh*, dont l’admiration sans mélange est appuyée par tant de copies du Semeur ou du Lieur de gerbes, écrivait : « Pour moi, ce n’est pas Manet mais Millet le peintre essentiellement moderne grâce à qui l’horizon s’est ouvert devant beaucoup. »
S. M.
A. Sensier, la Vie et l’œuvre de J. F. Millet (Quantin, 1880). / E. Moreau-Nelaton, Millet raconté par lui-même (Laurens, 1923 ; 3 vol.). / L. Leppoittevin, J. F. Millet, sa vie, son œuvre, ses écrits (L. Laget, 1971-72 ; 2 vol. parus). / Millet (Musées nationaux, 1975).