Grande Encyclopédie Larousse 1971-1976Éd. 1971-1976
A

Apennin (l’) ou Apennins (les) (suite)

Ce qui introduit la diversité dans ces massifs, c’est la structure complexe de l’Apennin. Le relief dominant est celui de hauts plateaux coupés par des vallées profondes et des bassins intérieurs (les « conques »). Géologiquement, l’Apennin appartient aux montagnes du cycle alpin, mais il est le résultat de la réunion tardive de blocs très différents entre eux. Il y a le cordon des moyennes montagnes liguriennes reliant les Alpes à l’Apennin. Il se poursuit par un Apennin septentrional, formé de nappes de grès et d’argiles, un Apennin central et méridional calcaire, un Apennin calabrais, schisteux et cristallin.

La mise en valeur de l’Apennin est difficile. Peuplées depuis le Paléolithique, ces montagnes n’ont pas été, du fait de leur morcellement, le support d’une unité régionale. Par fragments, elles ont été conquises et annexées par les habitants de la plaine. Les difficultés des communications, la pauvreté des conditions économiques leur ont fait jouer le rôle de montagne refuge. Les activités traditionnelles sont celles de toute montagne méditerranéenne. Il y a d’abord l’élevage du petit bétail, avec une très ancienne transhumance, ainsi que l’exploitation forestière ; dans les bassins et sur les terrasses, on trouve des cultures céréalières, des olivettes, parfois des arbres fruitiers (amandiers). La surcharge démographique a nécessité des activités complémentaires. L’industrie s’est peu développée : des carrières, quelques usines alimentaires et textiles, des papeteries. L’artisanat eut plus de succès. Mais l’émigration est, depuis des siècles, le remède à la misère. De saisonnière, l’émigration est devenue définitive. Elle s’est dirigée vers les plaines toutes proches, l’Italie du Nord, l’étranger. Des traits de l’économie moderne pénètrent cependant la montagne. La réforme agraire a transformé certains secteurs (la conque du Fucino, dans les Abruzzes). L’équipement hydro-électrique n’est pas négligeable ; il représente environ le quart de la puissance installée nationale. L’industrie n’apparaît que de manière ponctuelle, le plus souvent dans les cités au contact de la montagne et des collines : installations chimiques de San Giuseppe di Cairo et de Ferrania (Ligurie) ; industries alimentaires, confiserie en particulier, à Pérouse ; sidérurgie à Terni (Ombrie), papeterie fine à Fabriano (Marches), travail de la bauxite à Bussi (Abruzzes), industries chimiques encore dans la vallée du Basento (Basilicate). Le tourisme, sans rivaliser avec les franges côtières ou les Alpes, se diffuse, car l’équipement routier rend l’Apennin plus accessible. La moyenne montagne de l’Apennin ligure, tombant brutalement sur la mer, est surtout une zone de passage vers Gênes. L’Apennin émilien et toscan (monte Cimone, 2 163 m), dont le rameau des Alpes Apuanes enferme le fameux marbre de Carrare, possède la station d’Abetone. L’Apennin central, calcaire, dominé par le Gran Sasso (2 914 m), voit la prospérité des stations de Campo Imperatore ou de Roccaraso. L’Apennin méridional (2 000 m d’altitude) est très déshérité dans les zones calcaires de Campanie et du Basilicate, mais il s’anime sur les hauteurs cristallines de la Calabre (2 000 m) avec Camigliatello, Silano et Mancuso. Il s’agit encore d’un tourisme local, surtout estival et familial. L’Apennin demeure une région pauvre, et ses habitants continuent à l’abandonner.

E. D.

➙ Abruzzes-Molise / Basilicate / Calabre / Campanie / Émilie / Italie / Latium / Ligurie / Marches / Mezzogiorno / Ombrie / Toscane.

 J. Demangeot, Géomorphologie des Abruzzes adriatiques (C. N. R. S., 1965).

aphasie

Perturbation de la communication par le moyen des signes verbaux, pouvant porter sur l’expression ou sur la réception, ou simultanément sur la réception et l’expression des signes verbaux, oraux ou écrits.


Ce trouble des réalisations verbales est déterminé par des lésions focales de l’hémisphère cérébral gauche chez les sujets droitiers. L’insuffisance d’une définition qui doit faire appel à la nature de la lésion responsable est évidente. Le recours aux méthodes linguistiques permet de préciser que les aphasies sont des perturbations du maniement du code linguistique, lui-même défini par le modèle linguistique de référence.


Historique

C’est au xixe s. que les troubles du langage constituant les aphasies ont été isolés des perturbations de la parole déterminées par les lésions périphériques et de l’incohérence démentielle. Mais ce n’est qu’avec P. Broca (1861) que le trouble de « la faculté du langage articulé » est mis en relation avec une zone déterminée de la corticalité cérébrale, le pied de la 3e circonvolution frontale (aire de Broca) ; ce même auteur, en 1865, reconnaît que les mécanismes nerveux sous-tendant les processus du langage siègent sur l’hémisphère gauche, dès lors dit « dominant ».

Une autre date capitale dans l’histoire de l’aphasie est la découverte par Wernicke (1874), sur le même hémisphère, d’une zone postérieure au niveau de la première circonvolution temporale dont la destruction entraîne des troubles de la réception du langage (aphasie sensorielle, ou aphasie de Wernicke).

À partir de ces travaux, une aire particulière, dite « aire du langage », pouvait être définie sur l’hémisphère gauche ; ses lésions déterminent des troubles des réalisations verbales, de caractère différent selon qu’elles siègent antérieurement ou postérieurement à l’intérieur de cette aire.


Classification des aphasies

En cas de lésions antérieures, il s’agit d’aphasie d’expression. L’émission verbale est principalement, ou même isolément, perturbée ; elle est parfois réduite à quelques syllabes stéréotypées. Dans les cas moins sévères, on constate une réduction du langage spontané et des déformations, plus ou moins considérables, dans l’articulation des phonèmes. Le trouble porte seulement sur la réalisation des phonèmes, sans qu’il y ait atteinte du système phonologique. Parfois, le malade s’exprime seulement par des substantifs ou des verbes à l’infinitif (agrammatisme et style télégraphique). La compréhension verbale n’est que peu ou pas troublée ; la lecture est intacte. L’écriture est par contre perturbée, sans que le caractère et l’intensité des deux troubles de l’expression, orale et graphique, soient nécessairement de même intensité.

Un aspect particulier des troubles de l’expression est représenté par l’aphasie de conduction, dont le trait essentiel consiste dans l’altération de la répétition des mots et des phrases. La lésion responsable de cette forme siège d’ailleurs au niveau de la jonction pariéto-temporale postérieure.