mercure (suite)
Toxicologie du mercure et de ses dérivés
• Le mercure métal, pratiquement insoluble dans les solvants habituels, est très peu toxique par absorption digestive. Son inoculation dans le tissu sous-cutané provoque par contre des réactions inflammatoires très douloureuses. À température modérément élevée, il émet des vapeurs qui peuvent être absorbées par voie respiratoire et provoquer une intoxication chronique.
Les travaux qui nécessitent l’utilisation du mercure métallique présentent ainsi un certain danger (concentration maximale autorisée aux États-Unis : 0,1 mg/m3).
• Les sels minéraux de mercure ont une toxicité variable selon leur solubilité dans l’eau et selon le degré d’ionisation du métal. Le cinabre, ou sulfure de mercure, est peu soluble et peu toxique. Le calomel, ou chlorure mercureux, est relativement peu toxique : utilisé comme laxatif à la dose d’un centigramme, il ne provoque qu’exceptionnellement une maladie neurologique particulière, l’acrodynie (douleurs aux extrémités). Le sublimé, ou chlorure mercurique, est, par contre, un toxique classique. À la dose de quelques centigrammes, il provoque des troubles digestifs et une atteinte rénale aiguë avec perturbation fonctionnelle et lésions tubulaires aboutissant à une anurie (arrêt de la sécrétion urinaire). L’anurie mercurielle débute par des nausées, des vomissements, une diarrhée douloureuse parfois sanglante, puis les signes rénaux apparaissent avec rétention azotée (augmentation de l’urée sanguine) et troubles électrolytiques importants. Grâce aux traitements de réanimation, la survie est en général maintenue dans les formes moyennes, et la guérison rénale est habituellement complète. Le traitement précoce par antidotes — British Anti Lewisite, ou B. A. L., à la dose de 3 à 4 mg par kilogramme, par voie intramusculaire toutes les six heures — permet souvent d’éviter l’anurie, et la prévention est encore meilleure par injection d’un diurétique du type de la furosémide, qui maintient la diurèse et facilite la correction des troubles fonctionnels dus à l’insuffisance rénale.
En pathologie professionnelle, l’intoxication mercurielle, ou hydrargyrisme, provoque une stomatite (inflammation de la bouche), un tremblement surtout intentionnel (quand on veut exécuter un geste), des crampes douloureuses et des altérations globales du système nerveux. Le dosage dans les urines donne des résultats variables souvent supérieurs à 0,1 mg par litre chez les sujets exposés.
• Les dérivés organiques du mercure sont très nombreux. Certains d’entre eux étaient employés autrefois en thérapeutique ; ils ont dû être abandonnés en raison de leur toxicité et on n’emploie plus guère que des antiseptiques à usage externe parmi les dérivés mercuriels.
En agriculture, par contre, de puissants fongicides sont fournis par les sels de méthyl(alkyl)mercure ou de phényl(aryl)mercure. Leur toxicité est très élevée, surtout celle des alkylmercures ; elle correspond à une atteinte nerveuse grave avec ataxie, incoordination cérébelleuse et troubles psychiques en règle générale irréversibles. Le traitement par la D-pénicillamine (1 g par jour) a un effet favorable temporaire.
La concentration maximale autorisée aux États-Unis est de 0,01 mg/m3, chiffre très faible tenant compte de l’inquiétude soulevée par la manipulation de ces produits en agriculture.
E. F.
P. L. Bidstrup, Toxicity of Mercury and its Compounds (Amsterdam, 1964).
H. B.
C. Duval, le Mercure (P. U. F., coll. « Que sais-je ? », 1968).