Grande Encyclopédie Larousse 1971-1976Éd. 1971-1976
M

médicament (suite)

Les solutés sont des solutions simples, administrables :
— en applications externes le plus souvent après dilution, comme le soluté officinal d’eau oxygénée, les solutés titrés d’hypochlorite de sodium de Labarraque et de Dakin, les collyres aqueux, les collutoires et les gargarismes :
— par la voie orale (soluté alcalin dit « de Bourget », soluté de digitaline à 1 p. 1 000, etc.) ;
— par la voie parentérale, les solutés injectables devant répondre à des critères très rigoureux de neutralité, de stérilité et devant être apyrogènes ; ils sont répartis soit en flacons ou en récipients plastiques quand ils sont destinés aux injections massives ou perfusions (solutés salés, glucoses, plasma, sang...), soit en flacons multi-doses (insuline, antibiotiques) ou en ampoules scellées, soit encore en seringue à usage unique (vaccins, sérums).


Les alcoolés

Ce sont des médicaments dont le véhicule est l’alcool. On utilise l’alcool éthylique (éthanol) à un titre adapté à la nature de la drogue à épuiser : 80° pour les substances résineuses, 60° pour les autres et, par convention internationale, 70° pour les substances héroïques, 90° pour les plantes fraîches. On appelle teinture un alcoolé préparé à partir d’une substance sèche, alcoolature un alcoolé préparé à partir d’une plante fraîche, alcoolat une teinture soumise à distillation après macération.

Les teintures sont préparées soit par macération prolongée, soit par lixiviation. Ce sont des médicaments très actifs et de bonne conservation, sauf quelques exceptions (aconit, digitale, belladone). Les alcoolatures visent à conserver les caractères médicamenteux de la plante fraîche, l’action précoce de l’alcool prévenant les réactions enzymatiques qui interviennent au cours de la dessiccation ; on prépare même des « alcoolatures stabilisées » où la plante fraîche subit une stérilisation par l’alcool bouillant avant macération (marron d’Inde). Les alcoolats ne sont plus représentés que par les alcoolats composés, les alcoolats simples étant remplacés, à tort, par des solutions alcooliques d’essences ; les plus connus sont l’alcoolat de Fioravanti, utilisé en frictions stimulantes, et l’alcoolat de mélisse composé (eau de mélisse) ; ce sont des produits très finement aromatiques.


Les œnolés et les acétolés

Macérats à base de vin ou de vinaigre, ils sont pratiquement tombés en désuétude.


Les saccharolés

Ce sont des médicaments qui renferment une forte proportion de sucre blanc, ou saccharose. Ce sont des liquides visqueux grâce à leur forte teneur en sucre, appelés sirops, ou des solides le plus souvent sous forme de petits magdaléons irréguliers, plus connus sous le nom de saccharures granulés, ou granulés.

Le sirop simple, ou sirop de sucre, est une solution saturée de saccharose dans l’eau, obtenue à partir de sucre et de colatures provenant du traitement de diverses drogues par divers procédés. Ainsi, le sirop de baume de Tolú (antiseptique respiratoire), le sirop d’ipéca composé ou de Des Essartz (antitussif, détersif, laxatif), le sirop des cinq racines (diurétique), le sirop de chicorée composé (laxatif). Ces produits possèdent une certaine activité du fait du nombre de principes actifs qu’ils renferment et de leur dispersion, une totale innocuité et un goût agréable. Ils sont précieux dans le traitement des affections bénignes, notamment chez l’enfant.

Les saccharures granulés sont obtenus par tamisation d’une pâte dure riche en sucre, suivie de dessiccation. Ils sont très fréquemment utilisés, surtout en pédiatrie, à cause de leur facilité d’administration.

Ils sont de meilleure conservation que les sirops ; d’où l’existence de nombreuses spécialités dites « granulés pour sirop », permettant d’obtenir un sirop par simple addition d’eau au moment de l’emploi.

On prépare également des granulés dits « effervescents », qui, par incorporation à sec d’acide citrique et de bicarbonate de sodium, fournissent au contact de l’eau un dégagement gazeux qui favorise la dissolution du médicament et donne une boisson de goût agréable.

Les spécialités et l’industrie pharmaceutiques

On peut faire remonter leur origine au xviiie s., où apparaissent de nombreux remèdes secrets lancés dans le public par une publicité à caractère commercial. Les spécialités sont des préparations pharmaceutiques, faites industriellement, réparties au niveau des officines et des pharmacies hospitalières, où elles sont dispensées sous un nom de fantaisie protégé par une marque ; leur composition est connue et obligatoirement indiquée sur le conditionnement extérieur.

La presque totalité des spécialités pharmaceutiques est constituée par des médicaments chimiques, synthétiques ou extractifs ; ceux-ci sont le fruit de la recherche pharmacologique, et les modifications apportées à une molécule donnée peuvent en modifier profondément les propriétés thérapeutiques. C’est ainsi que la phénothiazine, utilisée à l’origine comme vermifuge, a donné naissance, grâce à l’addition d’une chaîne latérale sur son atome d’azote, à de nombreux médicaments doués de propriétés antihistaminiques, puis, après introduction d’un atome de chlore, à la très importante famille de tranquillisants dérivés de la chlorpromazine. C’est ainsi, également, que la benziodarone, dilatateur coronarien, s’est révélée un bon uricosique (éliminateur de l’acide urique).

Depuis 1920, on assiste à un important développement, aux dépens des médicaments magistraux, des médicaments spécialisés et des médicaments chimiques. La production, à l’origine de dimension artisanale (le laboratoire de production étant souvent accolé à une officine de pharmacie), s’est progressivement industrialisée. Depuis la fin de la Seconde Guerre mondiale, de nombreuses concentrations ont eu pour effet de ramener le nombre des laboratoires de fabrication de quelques milliers à quelques centaines, disposant des moyens de production, de contrôle et de recherche en rapport avec la demande de médicaments. La production de l’industrie pharmaceutique « se situe approximativement au même niveau que la construction aéronautique et l’industrie du caoutchouc ; son chiffre d’affaires représente environ 19 p. 100 du chiffre d’affaires total des industries chimiques ». L’industrie pharmaceutique française emploie plus de 51 000 personnes et se classe par son chiffre d’affaires à la quatrième place dans le monde, après les États-Unis, le Japon et l’Allemagne fédérale, juste avant la Grande-Bretagne. Elle emploie 9 p. 100 de son effectif et 8,25 p. 100 de son chiffre d’affaires hors taxes à la recherche, soit deux fois plus que la moyenne pour l’ensemble de l’industrie (3,65 p. 100).