Grande Encyclopédie Larousse 1971-1976Éd. 1971-1976
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Mauristes (suite)

L’impulsion donnée à ces études remonte à dom Tarrisse lui-même. « Il ne se contenta pas d’établir des cours de philosophie et de théologie dans chaque province ; il fait faire une étude particulière de l’Écriture sainte et des langues orientales. Il députa des religieux pour visiter les bibliothèques de l’ordre, y examiner les manuscrits, et en tirer les vies des saints bénédictins. »

La plupart des supérieurs généraux qui lui succèdent ont à cœur de continuer son œuvre. Ainsi, dom Bernard Audebert (1660-1672) s’emploie à organiser le travail intellectuel dans ses « instructions ». À cette époque, on compte 3 000 religieux, répartis en 178 monastères qui seront agrégés à la réforme mauriste. Dom Vincent Marsolle (1672-1681) veille à l’édition des Pères de l’Église. Dom Charles de l’Hostallerie (1714-1720) fait agrandir la bibliothèque de Saint-Germain-des-Prés et encourage les publications sur l’histoire monastique et sur l’histoire de France.

À partir de cette date, les querelles jansénistes troublent la vie de la congrégation, dont de nombreux membres refusent de souscrire à la bulle Unigenitus, ce qui engendre des frictions avec le pouvoir royal (emprisonnements, exils, etc.).

Dans la seconde moitié du xviiie s., les discussions théologiques s’apaisent, mais l’ancienne ferveur s’est atténuée et on enregistre un certain relâchement. Le dernier supérieur général, dom Ambroise Chevreux (1783-1792), rétablit la discipline, mais la Révolution supprime la congrégation, et dom Chevreux périt dans les massacres de Septembre.


Les Mauristes au travail

• Luc d’Achery (1609-1685). Bibliothécaire de Saint-Germain-des-Prés, il en publia le catalogue (1648). Au début du xviiie s., la bibliothèque était passée de 3 000 à 10 000 volumes. Dom Luc d’Achery édita en outre 13 volumes in-quarto de textes d’histoire ecclésiastique dans son Spicilegium (1655-1677). Il fut le maître de Mabillon.

• Jean Mabillon (1632-1707). Bénédictin à Saint-Remy de Reims (1654), à Saint-Germain-des-Prés (1664), membre de l’académie des Inscriptions en 1701, il est le fondateur de la science historique moderne par les règles de critique des textes définies dans son De re diplomatica (1681). Autres œuvres : Sancti Bernardi opera omnia (1667), Acta sanctorum ordinis sancti Benedicti (1668-1701), Vetera Analecta (1675-1685), Traité sur les études monastiques (1691), Annales ordinis sancti Benedicti (1703-1707).

• Edmond Martène (1654-1739). Il fit sa profession en 1672 (Saint-Remy de Reims). Il est l’auteur de : De antiquis monachorum ritibus (1690) et De antiquis ecclesiae ritibus (1700-1702). Dom Martène a laissé une précieuse relation de ses voyages.

• Bernard de Montfaucon (1655-1741). Bénédictin en 1676 (Toulouse, Blancs-Manteaux, Saint-Germain-des-Prés), il devint membre de l’académie des Inscriptions en 1719. Ses œuvres principales sont Collectio nova patrum et scriptorum graecorum (1706), Monument de la monarchie française (1729-1733).

• Thierry Ruinart (1657-1709). Il devint bénédictin en 1674 (Saint-Germain-des-Prés). Ses œuvres principales sont Acta primorum martyrum sincera (1689), Journal (1698-99), Abrégé de la vie de dom Jean Mabillon (1709).

• Parmi les autres œuvres les plus justement célèbres des Mauristes, il faut citer : l’édition des Œuvres de saint Augustin (1681-1700) par dom Thomas Blampin et de Saint Grégoire le Grand par dom Denis de Sainte-Marthe (1705), qui commença aussi la Gallia christiana seu Series omnium archiepiscoporum, episcoporum et abbatum Franciae (13 in-folio, 1713-1785), continuée après la Révolution par l’Institut. Enfin, dom Martin Bouquet entreprit un recueil des Rerum gallicarum et francicarum scriptores (23 in-folio, 1738-1876).

P. R. et C. J.-N.

 C. McCarthy, The Lives of the Principal Benedictine Writers of the Congregation of St Maur (Londres, 1868). / E. de Broglie, Mabillon et la Société de l’abbaye Saint-Germain-des-Prés à la fin du xviie siècle, 1664 1707 (Plon, 1888 ; 2 vol.) ; la Société de l’abbaye de Saint-Germain-des-Prés au xviiie siècle. Bernard de Montfaucon et les bernardins, 1715-I750 (Plon, 1891 ; 2 vol.). / E. Martène, Histoire de la congrégation de Saint-Maur (A. Picard, 1929-1955 ; 10 vol.). / H. Leclercq, Dom Mabillon (Letouzey, 1953-54 ; 2 vol.).

Mauritanie

Appelée aussi Maurétanie (en lat. Mauritania ou Mauretania, et autrefois Maurousia par les Grecs), dans l’Antiquité pays situé à l’ouest de l’Afrique ancienne et habité par les Maures, de race essentiellement berbère.


Il couvrait la moitié occidentale du Maghreb, et était limité par le Rummel (antique Ampsaga).


Les royaumes indigènes

La Mauritanie fut colonisée, sur ses côtes, à une époque reculée, par les Phéniciens, qui fondèrent, entre autres comptoirs, Liks (Lixus des Romains, auj. Larache). L’intérieur se développa indépendamment, de bonne heure : dès le vie s. av. J.-C., des bourgades indigènes prospéraient dans l’Est. Les influences grecque et punique pénétrèrent jusqu’à elles. Les Carthaginois, notamment, qui avaient succédé aux Phéniciens dans leurs établissements côtiers et s’y étaient multipliés après la chute de leur métropole, avaient commercé avec l’intérieur et l’avaient profondément marqué : ainsi des suffètes exercèrent le pouvoir à Volubilis. Mais cette influence, pour prolongée qu’elle fût, ne bouleversa pas la civilisation berbère, stable, quasi immuable. Si stable que les historiens, à la suite de Stéphane Gsell (1864-1932), n’ont pas hésité à utiliser les données contemporaines pour se représenter l’antique monde berbère partagé en unités villageoises et tribales et parvenant occasionnellement à surmonter leurs causes de querelles pour se réunir sous des chefs communs. Ceci donnait naissance à des royaumes indigènes, en grande partie inconnus de nous.