Grande Encyclopédie Larousse 1971-1976Éd. 1971-1976
M

matérialisme (suite)

L’atomisme antique a, en général, été sceptique ; les matérialistes du xviiie s. se limitaient à une utilisation idéologique des sciences (de la nature) ; le marxisme se propose comme théorie scientifique (de l’histoire). Cette théorie — qui affirme le caractère décisif en dernière instance des rapports économiques de production dans les différentes structures sociales — appuie sa scientificité sur le discours épistémologique, en quoi consiste le matérialisme dialectique. Malgré des travaux comme la Dialectique de la nature et l’Anti-Dühring d’Engels ainsi que Matérialisme et empiriocriticisme de Lénine*, le matérialisme dialectique a, incontestablement, été défavorisé dans l’histoire du marxisme au profit du matérialisme historique. Mais Louis Althusser a montré comment (chez les auteurs de la social-démocratie ou chez Plekhanov, Lukács*, Korsch, Gramsci*, etc.) cette négligence philosophique entraînait nécessairement des erreurs dans la tactique du mouvement ouvrier. Ce qui distingue le marxisme, d’une part, des autres doctrines socialistes et, d’autre part, des autres matérialismes, c’est son caractère scientifique ; le laisser passer pour une idéologie constitue une faute philosophique lourde de conséquences politiques.

D. H.

➙ Atome / Encyclopédie / Épicurisme / Lumières (esprit des) / Marxisme.

 K. Marx, Differenz der demokritischen und epikurischen Naturphilosophie (Berlin, 1841 ; trad. fr. Différence de la philosophie de la nature chez Démocrite et Épicure, Ducros, Bordeaux, 1970). / K. Marx et F. Engels, Die Heilige Familie (Francfort, 1845 ; trad. fr. la Sainte Famille, Éd. sociales, 1969). / F. A. Lange, Geschichte des Materialismus und Kritik seiner Bedeutung in der Gegenwart (Leipzig, 1866, 2 vol. ; trad. fr. Histoire du matérialisme, Schleicher, 1910-11, 2 vol.). / G. Plekhanov, De la conception matérialiste de l’histoire (en russe, 1897 ; trad. fr., Éd. sociales, 1948) ; Essais sur l’histoire du matérialisme (Éd. sociales, 1957). / V. I. Lénine, Matérialisme et empiriocriticisme (en russe, 1909 ; trad fr., Éd. sociales, 1962). / C. Bailey, The Greek Atomists and Epicurus (Oxford, 1928). / D. Mornet, les Origines intellectuelles de la Révolution française, 1715-1787 (A. Colin, 1933). / E. Bignone, L’Aristotele perduto e la formazione filosofica di Epicuro (Florence, 1936). / P. Nizan, les Matérialistes de l’Antiquité (Éd. sociales internat., 1936 ; nouv. éd., Maspero, 1968). / J. V. Staline, Matérialisme dialectique et matérialisme historique (en russe, Moscou, 1938 ; trad. fr., Éd. sociales, 1945). / P. Naville, Paul Thiry d’Holbach et la philosophie scientifique du xviiie s. (Gallimard, 1943). / J. Brun, l’Épicurisme (P. U. F., coll. « Que sais-je ? », 1959). / L. Althusser, Pour Marx (Maspero, 1965). / P. Sollers, Sur le matérialisme (Éd. du Seuil, 1974).

matériel (Service du)

Service responsable de la mise en place et du maintien en état des matériels d’équipement et d’armement dans l’ensemble des unités de l’armée de terre.


Sa mission essentielle est de pourvoir au maintien en condition de ces matériels, ce qui comporte un aspect quantitatif (maintien au complet des dotations) et un aspect qualitatif (maintien d’un potentiel de service intégral). Le Service est donc chargé en particulier d’approvisionner les unités en matériels complets et en pièces de rechange, et d’effectuer lui-même les réparations et les dépannages qui dépassent les possibilités techniques des unités. Organisme de gestion, il stocke les matériels complets qui ne sont pas en service et dispose d’immenses magasins de pièces de rechange. Il instruit le personnel de toutes les unités dans les domaines de l’entretien, du dépannage et de l’utilisation technique des matériels ; il a en outre un rôle de conseil et un pouvoir d’inspection dans ces unités pour tous les problèmes administratifs et techniques afférents aux matériels de toute nature.


Du Service de l’artillerie au Service du matériel

Quelques années encore avant la Seconde Guerre mondiale, c’est le Service de l’artillerie* qui fabriquait, distribuait et réparait les matériels d’armement. Leur fabrication échappa ensuite à sa compétence lorsque fut créé en 1935 le Service des fabrications d’armement. En 1939, le Service de l’artillerie disposait de parcs d’artillerie, équipés à la mobilisation de matériel militaire et de réquisition, et mis sur pied dans des usines réquisitionnées. Ces opérations de mobilisation étaient longues, et la mobilité des parcs était faible, sinon nulle. Une réorganisation complète s’imposait.

Un premier pas fut accompli par le décret du 25 août 1940, instituant un Service du matériel qui, en raison des circonstances, avait la forme d’un corps et de cadres civils au département de la Guerre. Ce Service nouveau comportait trois subdivisions : cavalerie, génie, artillerie, et l’organisation de son encadrement fit l’objet du décret du 16 septembre 1941. Sa mission s’étendait à l’étude, à la fabrication, à la réparation, à l’entretien et à la gestion de tous les matériels de l’armée de terre, à l’exception de ceux qui relevaient spécifiquement de l’Intendance ou du Service de santé. En novembre 1942, le débarquement américain en Afrique du Nord entraîna rapidement le réarmement de l’armée française d’Afrique. Par ordonnance du 13 mai 1943, les corps civils du matériel furent militarisés. Les premières unités du Service furent créées et prirent part, sous la tutelle de l’Ordnance Service américain à la campagne d’Italie. Il s’agissait de compagnies de réparations divisionnaires, de compagnies magasins et de compagnies munitions. Au même moment fut instaurée à Alger une Direction du matériel, et, durant la campagne de France de 1944-45, la Ire armée française disposa de 60 unités du matériel, indépendantes, cette fois, des forces américaines. Ces unités étaient mobiles, surtout en ce qui concerne les compagnies de réparation divisionnaires, qui accompagnaient au plus près les unités combattantes. Elles étaient capables d’assurer très rapidement leur approvisionnement et, dans une large mesure, d’effectuer réparations et entretien de leurs matériels. Leur encadrement était prélevé principalement dans l’artillerie et l’arme blindée.