Grande Encyclopédie Larousse 1971-1976Éd. 1971-1976
A

Antiquité classique (les grands courants littéraires de l’) (suite)

L’une des conséquences du renouvellement social est le retour au réalisme, manifeste dans la prédication morale du poète Perse, dans la curiosité de Sénèque, dans l’outrance épique de Lucain et surtout dans le roman de Pétrone. Sous le règne de Vespasien (69-79), qui ressemble à celui d’Auguste en ce qu’il met, lui aussi, fin à des guerres civiles forcenées, un nouveau classicisme s’organise ; comme sous Auguste, le renouveau littéraire s’accomplit grâce à des auteurs qui ont souffert des désordres et de la tyrannie : Tacite, Juvénal, Pline le Jeune.

J. P.

➙ Alexandrie / Grèce ancienne / Latine (littérature).

 W. Schmid et O. Stählin, Geschichte der griechischen Literatur (Munich, 1929). / W. W. Jaeger, Paideia. Die Formung des griechischen Menschen (Berlin et Leipzig, 1934-1947 ; 3 vol.). / J. Bayet, Littérature latine (A. Colin, 1935 ; nouv. éd., coll. « U », 1965). / B. Snell, Die Entdeckung des Geistes (Hambourg, 1946). / H. Fränkel, Dichtung und Philosophie des frühen Griechentums (New York, 1951 ; 2e éd., Munich, 1962). / R. B. Onians, The Origins of European Thought (Cambridge, 1951 ; 2e éd., 1954).

antisémitisme

Ensemble des sentiments et des actions hostiles aux Juifs.


Le terme semble avoir été créé, dans le dernier quart du xixe s., par un journaliste allemand, Wilhelm Marr, désireux de fonder l’hostilité aux Juifs sur leur appartenance à la race sémitique et de lui fournir ainsi une pseudo-base scientifique.

Les Juifs et l’antisémitisme

Le judaïsme fidèle à la tradition considère l’antisémitisme comme l’une des manifestations d’hostilité du monde non juif à l’égard du peuple élu. Il l’explique d’une part comme un effet de l’exil, conséquence des péchés d’Israël, et d’autre part comme une conséquence de l’imperfection morale des peuples non juifs et de leur manque de foi en Dieu. L’avènement du Messie, dont la mission sera d’amener les peuples à pratiquer la justice et à reconnaître le règne de Dieu, fera disparaître définitivement la haine des Juifs. Cette tradition, par conséquent, n’espère pas la fin complète de l’antisémitisme dans l’exil.

La néo-orthodoxie occidentale, par contre, croit à la réconciliation progressive du monde non juif et du judaïsme fidèle à la foi.

Quant au judaïsme libéral, certains de ses adeptes considèrent l’antisémitisme comme une séquelle du passé, que la civilisation moderne n’a pas encore réussi à dépasser. À mesure que le progrès se manifestera dans toutes les couches de la population, l’antisémitisme diminuera peu à peu jusqu’à disparaître complètement.

Cependant, une autre tendance du judaïsme libéral considère l’antisémitisme comme l’expression d’une résistance intérieure des peuples d’accueil à l’égard de certains traits caractéristiques des Juifs, qui seraient le résultat d’une assimilation incomplète. Les tenants de cette instance estiment que seule la fusion avec les peuples d’accueil jusqu’à l’abandon total du particularisme juif peut éliminer l’antisémitisme. En général, le judaïsme libéral prône une adaptation aux autres peuples aussi étendue que possible dans les habitudes et la civilisation, sans renoncer pour autant au particularisme juif ; il est fondamentalement optimiste quant à la manière de juger l’antisémitisme.

Le sionisme prend une position entièrement différente. Il considère l’antisémitisme comme une réaction de défense inévitable des peuples d’accueil à l’égard des Juifs vivant au milieu d’eux. L’opinion des théoriciens du sionisme n’est pas uniforme d’ailleurs quant à l’antisémitisme, mais tous soulignent le caractère anormal de la situation du peuple juif, peuple sans terre et sans État. Seul son retour sur sa terre est de nature à faire disparaître l’antisémitisme.

Les partis juifs socialistes ramènent l’antisémitisme à des causes d’ordre purement économique : avec la transformation de la société capitaliste en société socialiste, l’antisémitisme disparaîtra.


L’Antiquité et le Moyen Âge

Dans l’Antiquité païenne, l’hostilité à l’égard des Juifs était suscitée par leur fidélité au message de l’Ancien Testament. Les prophètes d’Israël, en effet, depuis Moïse jusqu’à ses derniers successeurs, stigmatisèrent avec véhémence l’idolâtrie et les crimes commis en son nom (sacrifices humains). Le premier heurt violent se produisit au iie s. av. J.-C., quand Antiochos IV, surnommé Épiphane, roi de Syrie, prétendit interdire aux Juifs, sous peine de mort, la pratique de leur religion. Cette crise fut illustrée par l’épopée de Judas Maccabée, qui purifia le Temple de Jérusalem de toutes les idoles grecques. Par la suite, l’hellénisme et le judaïsme se conjuguèrent pacifiquement dans le Bassin méditerranéen, jusqu’au moment où éclata une nouvelle crise d’antijudaïsme à Alexandrie, alors sous domination romaine. Nul doute que la prospérité et la richesse de nombre de familles juives établies à Alexandrie n’aient suscité l’envie et provoqué les troubles antijuifs.

Les premiers chrétiens, encore confondus avec les Juifs, subirent les mêmes effets de l’intolérance.

La destruction du Temple de Jérusalem amena à Rome des milliers de captifs juifs : vendus comme esclaves, ils subirent les avanies réservées à cette catégorie. Par la suite, ils formèrent, à Rome et dans bien d’autres villes de l’Empire, des communautés religieuses.

Vilipendés par les uns, les Juifs étaient loués par les autres pour la pureté de leur vie familiale. En grande majorité, les populations faisaient preuve de tolérance à leur égard ; de hauts personnages non seulement s’intéressèrent à leur sort, mais encore épousèrent le monothéisme juif, allant parfois jusqu’à la conversion. Sans faire de prosélytisme, le judaïsme se répandait ; ce fut un nouveau prétexte, sinon un motif pour dénoncer les Juifs comme fauteurs de troubles. Les troubles, en fait, avaient gagné le monde païen, dont les idoles s’écroulaient. Mais ce fut le christianisme qui bénéficia de leur chute ; les chrétiens, hier encore victimes des païens, allaient trop souvent se faire les persécuteurs des Juifs, fidèles à la Loi de Moïse.