Grande Encyclopédie Larousse 1971-1976Éd. 1971-1976
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Maroc (suite)

Une économie portant encore les marques du sous-développement

Les caractères de sous-développement apparaissent à travers quelques chiffres : produit national brut de 306 dollars par habitant, primauté de l’agriculture, dont les vicissitudes commandent l’évolution du produit intérieur brut (+ 13 p. 100 en 1968, année à climat exceptionnel, + 0,5 p. 100 en 1969), taux relativement faible, bien qu’en progrès constants, de l’urbanisation (35 p. 100 de citadins pour l’ensemble de la population en 1970 contre 29 p. 100 en 1960).

Dans la production agricole, les céréales continuent à tenir de loin la première place, avec une superficie de 4 500 000 ha et une production dépassant régulièrement 4 Mt (approximativement 2 Mt d’orge et autant de blé). Parmi les cultures industrielles, la betterave à sucre (35 000 ha, 100 000 t de sucre) est la grande réussite de la dernière décennie, avec six sucreries en activité (dont trois dans le Rharb) : le coton, produit principalement dans le Tadla et dans l’Oriental, n’intéresse que 20 000 ha (moins de 10 000 t) ; la vigne (60 000 ha, 2 Mhl), les agrumes (70 000 ha, 850 000 t) ainsi que les cultures maraîchères (100 000 ha) continuent à alimenter un important commerce d’exportation. L’élevage (2 600 000 bovins, 11 800 000 ovins, 5 800 000 caprins) garde, pour l’essentiel, ses formes plus ou moins extensives.

La production d’électricité approche 3 TWh, et la « politique des barrages » a élevé la part de l’hydro-électricité à 70 p. 100 du total ; moins heureux que son voisin algérien, le Maroc ne tire de son sous-sol que 25 000 t d’hydrocarbures.

Avec une production dépassant 20 Mt, les gisements marocains fournissent plus du quart du commerce mondial des phosphates et une part égale de la valeur des exportations totales du pays. Par contre, les autres industries minières (en métal contenu) — fer (400 000 t), plomb (80 000 t), zinc (12 000 t), cobalt (1 500 t), manganèse (70 000 t) — ont un avenir incertain.

L’industrialisation, du fait même du système colonial, fut lente à démarrer. Les principales créations se localisèrent de préférence à Casablanca (Ciments Lafarge, Compagnie sucrière marocaine, brasseries, constructions mécaniques diverses). Le boom de la période 1946-1953 se traduisit par des investissements industriels d’une valeur totale de 30 milliards d’anciens francs, avec une certaine décentralisation géographique : conserveries de poisson à Safi et Agadir, usine de cellulose à Sidi Yahia du Rharb. Les premières années de l’indépendance furent marquées par une fuite des capitaux. Mais bientôt les pouvoirs publics prirent la relève. Le B. E. P. I. (Bureau d’études et de participations industrielles) et la B. N. D. E. (Banque nationale pour le développement économique) ont orienté la politique d’investissements depuis l’indépendance, l’État finançant 40 p. 100 du total de l’investissement industriel réalisé dans le pays. Ainsi ont été créées depuis 1958 de grandes entreprises comme la Société de montage des camions Berliet à Casablanca et la S. O. M. A. C. A. (Simca-Fiat) pour le montage d’automobiles à Casablanca, la raffinerie S. A. M. I. R., avec des capitaux italiens à Mohammedia, le complexe chimique de Safi. Les capitaux privés marocains se sont tournés surtout vers les industries textiles (Cofitex à Fès) et alimentaires. Les Français, sur la lancée du protectorat, détiennent encore 60 p. 100 du capital privé industriel, pour une valeur de quelque 35 millions de francs. Les Américains ont créé, entre autres, une usine de détergents et une usine de fabrication de pneus. Parmi les autres entreprises étrangères, on compte une filiale de la société ouest-allemande de produits chimiques et pharmaceutiques Hoechst ainsi que les sociétés néerlandaises Philips et Daf.

La proximité géographique, la complémentarité des économies et la force des liaisons anciennes expliquent que le commerce extérieur du Maroc se fasse dans la proportion de deux tiers avec l’Europe occidentale (un tiers avec la France seule). Après les phosphates, les fruits (agrumes), puis les produits de la pêche constituent les principaux postes des exportations. Celles-ci avec l’augmentation du prix du phosphate dépassant maintenant les importations.

J. L. C.

➙ Casablanca / Fès / Marrakech / Meknès / Rabat.

 J.-L. Miège, le Maroc (P. U. F., coll., « Que sais-je ? ». 1950, 5e éd., 1971). / J. Le Coz, le Rharb, fellahs et colons (Éd. La Porte, Rabat, 1965). / H. Isnard, le Maghreb (P. U. F., coll. « Magellan », 1966). / J. Despois et R. Raynal, Géographie de l’Afrique du Nord Ouest (Payot, 1967). / A. A. Belal, l’Investissement au Maroc, 1912-1964 (Mouton, 1968). / J. Couleau, la Paysannerie marocaine (C. N. R. S., 1969). / D. Noin, la Population rurale du Maroc (P. U. F., 1971 ; 2 vol.). / M. Villeneuve, la Situation de l’agriculture et son avenir dans l’économie marocaine (L. G. D. J., 1971).


Les grandes étapes de l’histoire jusqu’à la pénétration européenne


Le Maroc avant l’islām


Les Phéniciens

• À partir du xie s. av. J.-C., les Phéniciens installent des comptoirs sur les côtes marocaines (Tingi, [auj. Tanger], Liks ou Lixos [auj. Larache]...) et introduisent l’usage du fer et la culture de la vigne.

• Faut-il voir avec Jérôme Carcopino, dans le périple d’Hannon (ve s. av. J.-C.), « quelque chose comme l’acte de naissance de l’histoire marocaine » ?


Les Romains

• Après la ruine de Carthage* (146), les Romains, qui se sont d’abord alliés aux dynasties berbères locales, organisent la Mauritanie*.

• Mais, s’ils développent l’agriculture et importent une brillante civilisation urbaine (Volubilis, près de Meknès), les Romains ne dominent qu’une minime partie du futur Maroc.

• Dès le iiie s. apr. J.-C., l’influence romaine ne se maintient que dans la zone côtière ; les invasions vandales accélèrent la désagrégation de la civilisation latine et chrétienne dans le Maghreb.