Marchand (Jean-Baptiste) (suite)
Ayant formé son équipe de commandement avec les capitaines Auguste Germain (1865-1906) et Albert Baratier (1864-1917), les lieutenants Étienne Largeau (1866-1916) et Mangin* (qui commande l’escorte formée d’une compagnie de tirailleurs bambaras) et le docteur Jules Emily (1866-1944), Marchand débarque à Loango en 1896 et réunit ses moyens à Bangui en avril 1897. Après avoir traversé au prix d’immenses difficultés les marécages du Bahr el-Ghazal, Marchand, combinant habilement les transports par porteurs et par pirogues, rassurant les tribus sur son passage, parvient dans le bassin du Nil. Il a réussi à emmener avec lui un petit vapeur, le Faidherbe, qu’il fait démonter et porter sur piste pendant plus de 80 km. Mangin ayant installé chez les Djingués l’ultime base de départ à Fort-Desaix, Marchand peut entamer en juin 1898 sa marche sur Fachoda, qu’il occupe sans tirer un coup de feu le 10 juillet après un parcours de 4 500 km.
Installé à Fachoda, il signe des traités de protectorat avec les sultans des Chillouks et des Djinkas, qui consacrent l’avancée de la France dans le Soudan égyptien. Le 28 août, le Faidherbe rejoignait Marchand avec le ravitaillement... C’est alors que le général britannique Kitchener, venu d’Égypte et remontant le Nil, parvient, lui aussi, à Fachoda, le 18 septembre, et somme Marchand d’évacuer le poste. Celui-ci refusant, les deux « adversaires » décident de porter l’affaire devant leurs gouvernements.
Ainsi naît l’affaire de Fachoda, qui, à Paris comme à Londres, provoque une émotion considérable. Mais à Paris, Delcassé*, qui recherche l’alliance britannique, tient à apaiser le conflit, et Marchand reçoit l’ordre — qu’il exécute le 11 décembre 1898 — d’évacuer Fachoda, remis aux Britanniques. Sa mission fut rapatriée par Djibouti, rapportant une moisson de remarquables renseignements sur toute la région comprise entre le Congo et la mer Rouge. À son retour en France, en mai 1899, Marchand jouit d’une immense popularité. Nommé chef d’état-major de l’expédition de Chine en 1900, promu colonel en 1902, il commande le 4e colonial à Toulon et quitte l’armée en 1904.
Après une année malheureuse de carrière politique (il se présente comme député et est battu aux élections de 1906), Marchand se consacre à des études scientifiques et demeure dans l’obscurité. Rappelé à l’activité en 1914, il se distingue à la tête d’une brigade, puis d’une division, en Argonne, en Champagne, sur la Somme et à Verdun. En 1920, il quitte définitivement l’armée comme divisionnaire. Il vivra dès lors dans la retraite et ne laissera aucun récit de ses exploits, dont on retrouve le souvenir dans les écrits de ses compagnons Baratier, Emily et Mangin.
A. P. V.
J. Delebecque, Vie du général Marchand (Hachette, 1936). / A. E. A. Baratier, Souvenirs de la mission Marchand : Fachoda (Grasset, 1942). / P. Croidys, Marchand, le héros de Fachoda (Éd. des loisirs, 1943). / M. Michel, la Mission Marchand, 1895-1899 (Mouton, 1973).
