Grande Encyclopédie Larousse 1971-1976Éd. 1971-1976
M

Malvales (suite)

Les graines de Cola, « noix de Cola », en particulier de C. nitida (Afrique équatoriale), servent de tonique, car elles contiennent des substances puriques (caféine) qui se forment au moment de la dessiccation. Utilisée par les indigènes depuis des millénaires, cette plante ne fut connue en Europe que très tardivement (vers le xviie s.), et ce n’est que récemment (fin du xixe s.) que sa vulgarisation fut faite en France. Cette graine a un rôle important dans les cérémonies incantatoires des sociétés primitives africaines, et elle calme la faim et la soif ; elle stimule le système nerveux et diminue l’essoufflement lors des efforts physiques.

Comme autres genres dans cette famille, il faut citer Sterculia, dont les espèces des régions tropicales sont parfois cultivées comme arbres d’ornement ; Dombeya et Hermannia, africaines, fournissent des fibres textiles.

J.-M. T. et F. T.

Mamelouks

Milice d’élite qui devint maîtresse de l’Égypte au xiiie s.


Mamelouk est un mot arabe qui signifie « esclave blanc » ; il fut donné en Égypte à une troupe d’élite constituée à partir du xiiie s. grâce à l’achat de jeunes esclaves blancs en Turquie ou en Circassie, dans le pays des Tcherkesses (Caucase).

Lorsque le roi Saint Louis débarqua en Égypte en 1249, le sultan ayyūbide, al-Ṣāliḥ, qui avait fait de la milice des mamelouks sa garde personnelle, mourut après la bataille de Mansourah. Sa veuve, Chadjarat al-Durr, fit proclamer sultan son fils Tūrān-chāh, mais les gardes de son père — des mamelouks turcs casernés sur les bords du Nil, dans l’île de Rawḍa (Rōdah), les Baḥrites (de baḥr, le fleuve) — se rebellèrent sous l’influence de l’un des leurs, Baybars, et tuèrent le dernier sultan ayyūbide (1250) ; après quoi ils forcèrent Chadjarat al-Durr à épouser leur chef, Aybak (Aybeg). Ils établirent ainsi en Égypte la puissance des sultans mamelouks, qui allait durer plus de deux siècles et demi.

Les Mamelouks substituèrent au pouvoir civil un régime dominé par les éléments militaires, ils s’efforcèrent également d’unir solidement à l’Égypte les territoires syriens, et ce fut chose faite lorsque le quatrième sultan mamelouk, Baybars Ier (1260-1277), se fit proclamer successeur des califes de Bagdad.

Ces sultans s’efforcèrent également de promouvoir une politique panislamique ; ils se disaient sultans de l’islām, et l’Égypte devint le « royaume islamique » ; ils ambitionnaient même d’étendre leur pouvoir sur les villes saintes de l’Arabie.

Pour mener à bien cette politique, les Mamelouks baḥrites bénéficiaient de deux atouts : leur politique intérieure et leur politique économique. Fondée sur la succession des sultans en ligne héréditaire, ce qui évitait à l’État les habituelles crises dynastiques, leur politique intérieure était solide. Surtout, ils surent mener à bien une habile politique économique. Ils parvinrent, malgré les interdits de la papauté, à commercer avec les royaumes chrétiens de la Méditerranée. Des matières premières indispensables leur faisaient défaut, tels le bois et le fer : ils s’en procurèrent auprès des principautés franques de Palestine ou auprès des villes marchandes d’Italie ; en outre, ils continuèrent à acheter des esclaves blancs, nécessaires à leur recrutement, aux Génois, qui s’en procuraient, grâce à leur comptoir de Kaffa sur la mer Noire, dans les régions caucasiennes.

De plus, Alexandrie, en tant que point d’aboutissement des grandes routes caravanières, voyait les commerçants de Venise, de Pise, de Marseille ou de Barcelone venir s’approvisionner dans ses entrepôts en produits de l’Orient et de l’Extrême-Orient (épices, soieries, cotonnades, etc.).

Les Mamelouks luttèrent victorieusement contre les conquérants mongols (victoire de ‘Ayn Djālūt en Syrie en 1260). Après l’assassinat du sultan Quṭuz, Baybars, l’artisan de la révolte de 1250, monta à son tour sur le trône. Durant son règne (1260-1277), le plus glorieux de l’Égypte mamelouke, il allait renforcer l’autorité des sultans en brisant la féodalité, puis, grâce à ce puissant levier, il pourrait préparer la défaite des croisés de Palestine, qui fut parachevée sous son successeur Qalā‘ūn (1279-1290). Il revenait au fils de Qalā‘ūn, Muḥammad al-Nāṣir († 1340), de repousser encore une fois les Mongols en Syrie ; la victoire de Mardj al-Suffār, près de Damas (1303), marqua la fin des invasions mongoles dans l’empire des Mamelouks.

Ce règne de Qalā‘ūn correspond à l’apogée de la puissance mamelouke en Égypte. Ces descendants d’esclaves régnaient alors non seulement sur l’Égypte, mais aussi sur la Cyrénaïque, la Palestine et la Syrie orientale. Leur pouvoir s’étendait également sur les deux rives de la mer Rouge et jusqu’aux confins de l’Éthiopie. Après le règne de Qalā‘ūn, toutefois, l’Égypte allait sombrer dans l’anarchie, les clans rivaux se livrant à une lutte acharnée qui ravagea le pays.

Cette instabilité amena au pouvoir un autre groupe mamelouk, celui des Circassiens, ou Tcherkesses, établis dans la forteresse du Caire. En 1382, le sultan Barqūq († 1398) fonda la dynastie des Mamelouks burdjites (de burdj, tour fortifiée), qui allait régner sur l’Égypte jusqu’en 1517. Sa domination fut moins bénéfique à l’Égypte que celle de ses prédécesseurs. Cependant, les sultans burdjites protégèrent les lettres et les arts ; une vie culturelle intense put se développer, principalement sous le règne de Qā’itbāy (1468-1495), qui fonda des mosquées et des madrasa, construisit des forteresses, des ponts, des fontaines et des caravansérails.

Au système héréditaire, les burdjites substituèrent le système électif pour désigner les sultans, source de crises et de révoltes sans fin.

En politique extérieure, ils bénéficièrent d’un heureux hasard lorsque la résistance du Sultan ottoman, Bayezid Ier, évita aux Mamelouks en 1400 de voir leur pays conquis par les hordes de Tīmūr Lang (Tamerlan). Leur politique économique fut incohérente : fiscalité trop lourde et injuste, réquisitions forcées, etc. Cependant, ils s’emparèrent des entrepôts que les commerçants égyptiens avaient fondés à Alexandrie et qui regorgeaient de tous les produits d’Orient et d’Extrême-Orient, revendus fort cher aux Européens.

Ce pactole allait alimenter le trésor du gouvernement mamelouk, mais, en 1498, la découverte de la route du cap de Bonne-Espérance portait un coup terrible aux finances égyptiennes, les Portugais étant désormais à même de procurer à meilleur prix les denrées orientales à toute l’Europe, qui put abandonner l’onéreux intermédiaire mamelouk.