Grande Encyclopédie Larousse 1971-1976Éd. 1971-1976
M

maladie (assurance) (suite)

Toutefois, il y a exonération du ticket modérateur pour certaines personnes et certains frais : dans le régime général, notamment pour les pensionnés de guerre, les accidentés du travail titulaires d’une rente d’un taux supérieur à 66,66 p. 100, les titulaires d’une pension d’invalidité ou d’une pension de vieillesse substituée à une pension d’invalidité, les malades atteints d’une affection de longue durée ou dont la durée d’arrêt de travail (continue ou non) est supérieure à trois mois, les actes ou séries d’actes d’un coefficient égal ou supérieur à 50, les traitements nécessitant une hospitalisation supérieure à trente jours, les frais de couveuse, la fourniture de sang ou de lait humain, l’acquisition ou la réparation du gros appareillage, etc.

Dans la pratique, la participation aux frais qui incombe à l’assuré est assez fréquemment supérieure au montant du ticket modérateur du fait des exigences particulières de l’assuré notamment en matière d’hospitalisation (chambre à un ou deux lits, établissements de soins privés, conditions de séjour plus coûteuses que celles qui sont prévues lors de la fixation des tarifs légaux de prise en charge, etc.) ou d’appareillage (choix d’un type de lunettes ou de prothèse plus coûteux que le type agréé par l’organisme assureur) ou du fait des exigences particulières du praticien traitant (praticien placé « hors convention », de lui-même ou par l’organisme assureur ; praticien bénéficiant d’un droit de dépassement permanent). En matière de cure thermale, il est exceptionnel — du fait des règlements en vigueur — de recevoir des prestations d’un montant voisin de celui des dépenses effectivement engagées.

L’aide médicale gratuite (v. aide sociale) prend en charge le montant du ticket modérateur légal de l’assuré économiquement faible lorsqu’il se soumet à certaines conditions restrictives de son libre choix.

R. M.

➙ Accident / Accidents du travail / Familiale (politique) / Invalidité (assurance) / Santé / Sécurité sociale / Transferts sociaux / Vieillesse (assurance).

Malamud (Bernard)

Écrivain américain (New York 1914).


Malamud est l’un des écrivains les plus connus de ce qu’on appelle la renaissance juive. Né dans un milieu très simple, d’abord ouvrier, puis employé, il est devenu célèbre en 1957 avec un roman : le Commis (The Assistant). Il avait d’abord écrit The Natural (1952), qui n’eut aucun succès.

Le héros de Malamud dans le Commis est un minoritaire, non intégré, solitaire : un Italien récemment émigré qui ne peut accepter l’idée de servir son patron, un pauvre épicier juif. Il le vole pour satisfaire un racisme latent. Il le matraque. Il s’en prend à sa fille. Mais insensiblement il se prend de sympathie pour sa victime et se met bénévolement à son service. Il se convertit même à la religion juive, et le roman se termine sur une note d’espoir ambigu : la fille de l’épicier commence à s’attacher au « commis ».

Malamud publie ensuite deux recueils de nouvelles : le Tonneau magique (The Magic Barrel, 1958) et les Idiots d’abord (Idiots First, 1963). Les personnages y sont toujours des Juifs de milieux divers : soit un pauvre étudiant rabbinique qui, selon l’ancienne coutume, s’adresse à un « marieur » professionnel, soit un bourgeois honteux de son argent et de sa race, et qui voyage à l’étranger. Cette peinture des milieux juifs, sous son apparent réalisme, est en fait une peinture d’une communauté idéale, acharnée à survivre malgré les difficultés.

En 1961, dans Une nouvelle vie (A New Life), Malamud change de sujet : un jeune universitaire, dégoûté de New York, va s’installer dans l’Ouest pour essayer une « nouvelle vie ». Le roman, en partie autobiographique, utilise l’expérience que Malamud a de l’université : il enseigne la littérature anglaise et américaine à Bennington. Mais en fuyant son sujet de prédilection, les Juifs, Malamud échoue, et le livre n’a pas de succès.

En 1967, Malamud revient au problème juif avec l’Homme de Kiev (The Fixer). L’intrigue se situe cette fois en Russie en 1905. C’est un retour aux sources, d’où sont venus tant de Juifs américains. Le héros est accusé d’un crime rituel. L’État tsariste, menacé par une révolution imminente, désigne les Juifs comme boucs émissaires pour dévier le mécontentement. Soumis à de terribles pressions policières, le héros refuse de reconnaître sa culpabilité et sort vainqueur de l’épreuve. Malamud reprend là un thème très proche de celui de certains écrivains noirs comme Ralph Ellison (né en 1914). Déchiré, innocent, mais persécuté, le héros du fond de sa prison parvient à faire comprendre son besoin de solidarité. L’Homme de Kiev eut un succès considérable et marque la brusque reconnaissance de la tradition juive dans la littérature américaine. Le thème rejoint celui de Saul Bellow* dans Herzog (1964). Sous la crise, psychologique, policière ou politique, l’héritage ancestral recherche un nouvel enracinement.

Comme le déclare Malamud : « L’homme change constamment. Et ce qui change en lui est essentiel : l’esprit, l’âme, les émotions. Je pense que l’homme se tire d’affaire grâce à son imagination et à sa volonté. [...] Le roman n’est pas réalisme simple, documentaire. Le romancier part d’un fait réaliste, l’isole de son contexte, le transforme, peut-être même le revêt de fantastique, et le réalisme qui en résulte, s’il existe, dit la vérité de la vie. »

Avec Portraits de Fidelman (Pictures of Fidelman, 1969), Malamud revient au problème fondamental de l’angoisse. Il s’intéresse à des personnages qui vivent à une époque indéterminée, dans un monde en crise, dans des quartiers pauvres, en proie à la cruauté et à la souffrance, dont la condition juive est le symbole. Malamud s’y montre, une fois de plus, à la fois romantique et réaliste. Ses héros sont des minables animés d’un idéal grandiose. Ils ont des failles, mais essaient, malgré tout, de transcender leurs faiblesses. Les héros de Malamud sont des sortes de saints qui seraient en même temps, selon son titre, des « idiots d’abord ».

Malamud est un romancier discret et scrupuleux. Moins célèbre que certains, il incarne dans la littérature américaine une certaine présence juive qui exprime l’inquiétude de l’Amérique. En ce sens, avec P. Roth*, S. Bellow et J. D. Salinger*, il est plus qu’un écrivain : un témoin et peut-être un prophète.

J. C.

 P. Dommergues, les Écrivains américains d’aujourd’hui (P. U. F., coll. « Que sais-je ? », 1965 ; 2e éd., 1967). / P. Brodin, Écrivains américains d’aujourd’hui (Debresse, 1969). / M. Klein (sous la dir. de), The American Novel since World War Two (Greenwich, Conn., 1969).