luth (suite)
S’efforçant de satisfaire leur importante clientèle, les facteurs s’attachent non seulement à améliorer les qualités sonores du luth et son étendue, mais encore à construire des instruments de « tessiture » différente, afin de les rendre aptes à tous les usages : jeu en soliste, accompagnement de la voix, participation à des ensembles homogènes ou, au contraire, formés des instruments les plus divers (broken consort). La « famille des luths » comprend ainsi : le soprano, l’alto, le ténor (ces deux derniers étant employés indifféremment pour l’interprétation du répertoire soliste) et la basse (surtout réservée à l’accompagnement). À partir de 1570, on construit également des luths amplifiés, les archiluths, dont les cordes graves sont beaucoup plus longues ; ce sont, essentiellement, le théorbe et le chitarrone, qui serviront surtout pour l’accompagnement. D’autres instruments constituent, en revanche, une simplification du luth : la mandore (xvie et xviie s.), petit luth soprano à cordes simples, le liuto soprano (xviiie s.), auquel Vivaldi destinera des concertos, l’angélique (xviiie s.), chitarrone à cordes simples, le colachon. Le cistre, qui peut être considéré comme le « luth du pauvre » pendant toute cette période, s’en distingue par sa caisse plate et ses cordes de métal pincées avec un plectre. Il est intéressant de remarquer que c’est le dernier apparu des instruments de cette famille, la mandoline, née probablement au xviie s., mais en usage au xviiie, qui reste le seul couramment utilisé de nos jours.
Après avoir connu pendant environ deux siècles une suprématie incontestée, le luth tombe dans l’oubli. À l’exception des pays arabes, qui le considèrent comme un instrument traditionnel, le xixe et le xxe s. l’ignorent. Depuis une dizaine d’années toutefois, le retour aux instruments anciens attire, de nouveau, l’attention sur lui. Les meilleurs guitaristes se mettent à son étude, tentés par la richesse du répertoire qu’il permet d’interpréter. Parallèlement, de grandes éditions modernes rendent accessibles les recueils des xvie et xviie s. qui lui étaient consacrés. La facture de luth, désormais pratiquée par de nombreux artisans, rend possible l’acquisition de l’instrument : grâce à eux, le luth est en train de retrouver la place qui lui est due dans le concert des instruments anciens.
H. C.
L. de La Laurencie, les Luthistes (Laurens, 1928). / J. Jacquot (sous la dir. de), le Luth et sa musique (C. N. R. S., 1959). / G. Thibault, « La musique instrumentale au xvie siècle », dans Histoire de la musique, t. I, sous la dir. de Roland-Manuel (Gallimard, « Encyclopédie de la Pléiade », 1960). / H. Charnassé et F. Vernillat, les Instruments à cordes pincées (P. U. F., coll. « Que sais-je ? », 1971).