Grande Encyclopédie Larousse 1971-1976Éd. 1971-1976
L

Londres

En angl. London, capit. du Royaume-Uni de Grande-Bretagne et d’Irlande du Nord. Troisième ville mondiale et première d’Europe (7 380 000 hab. en 1971) ; première aire métropolitaine de ce continent (12 680 000 hab. en 1971).
Londres est l’une des plus grandes agglomérations du monde, après avoir été la première pendant plus d’un siècle, de 1820 à 1940 environ. Son rayonnement politique, économique et culturel, sans être aussi brillant qu’au xixe s., reste encore considérable. L’exceptionnelle destinée de Londres s’explique surtout par la réussite historique de la Grande-Bretagne, mais elle a aussi de solides fondements géographiques.



La situation et le site

La position de Londres s’impose d’emblée comme la meilleure en Grande-Bretagne. Les Romains, grands maîtres dans l’art d’apprécier la valeur des situations géographiques, le remarquèrent vite : bien que Londres ait un nom d’origine celte (Llyn-Din : le fort de l’étang), les Romains furent les véritables fondateurs de Londinium, capitale de leur province de Britannia (Bretagne).

La ville est d’abord bien placée par rapport au continent européen. La côte sud-est de la Grande-Bretagne, entre le Suffolk et le Kent, a de nombreux estuaires navigables (Colne, Stour, Blackwater, Crouch, Medway), mais tous se terminent en cul-de-sac ; un seul dépasse les autres en importance, celui de la Tamise, où débouche le principal fleuve anglais. La Tamise se jette dans la moitié méridionale de la mer du Nord, la mer la plus fréquentée, la plus passagère du monde, face au triple estuaire du Rhin, de la Meuse et de l’Escaut, l’organisme fluvial le plus actif d’Europe. Grâce à la marée, qui augmente à la haute mer la profondeur du chenal, des navires de moyen tonnage peuvent remonter la Tamise jusqu’à 85 km à l’intérieur des terres ; les méandres assurent une efficace protection contre d’éventuelles invasions par mer (Greenwich, port de guerre et arsenal).

Par rapport à l’Angleterre du Sud, la seule densément peuplée jusqu’au xvie s., Londres a une situation relativement centrale. La multiplicité des voies naturelles en fait un des plus beaux carrefours routiers d’Europe. Les voies sud-nord issues de la côte de la Manche, empruntant les percées des North Downs, convergent à Londres avec le vieux chemin des Pèlerins (Pilgrims’ Way), qui longe la retombée des Downs, entre les marécages de l’estuaire et l’épaisse forêt du Weald. De l’ancien gué romain de Westminster, les voies naturelles divergent ensuite vers les provinces du Nord, du Nord-Ouest et de l’Ouest, tantôt en suivant des vallées (route de Cambridge par la vallée de la Lea, route de Bristol par celle du Kennet), tantôt en se glissant dans les nombreuses percées qui interrompent la cuesta des Chiltern (Chiltern Hills) [percées de Hitchin, de Luton, de Dunstable, de Tring] et la percée de la Tamise elle-même à Goring. Toutes ces voies sont matérialisées de nos jours par des routes nationales qui suivent fidèlement le tracé des routes romaines et par des lignes ferroviaires.

Port maritime comme Le Havre, ville de dernier pont comme Rouen le fut pendant des siècles, lieu de convergence routière comme Paris, Londres cumule ainsi les avantages des trois grandes villes de la « basse » Seine.

Le site se définit de même par rapport à la vallée, géologiquement très récente, de la basse Tamise. Un synclinal de Londres, composé de couches tendres d’âge éocène, reposant sur un soubassement de craie du Crétacé, se relève vers le nord-ouest, où la tranche de la craie forme la cuesta des Chiltern et vers le sud-est, où la même couche forme la cuesta des North Downs. Mais la Tamise n’occupe pas l’axe de ce synclinal. Elle a été, à plusieurs reprises, repoussée vers le sud par le front des glaciers quaternaires.

Un ancien cours orthoclinal, parallèle aux Chiltern, marqué par des traînées de cailloutis, traverse le val de Saint Albans. Une première avancée glaciaire, occupant ce val, contraignit la Tamise quaternaire à passer plus au sud par le val de Finchley. Une seconde avancée glaciaire lui donna un cours peu différent de l’actuel.

Après la fusion des glaciers, la Tamise s’adapta aux variations climatiques, tantôt en déposant des alluvions dans sa vallée, tantôt en s’enfonçant dans celles-ci. Ces alternances d’épandage et de creusement ont eu pour conséquence la formation d’un escalier de terrasses alluviales aux altitudes relatives de 50, 40, 25 et 15 m, cette dernière dite « terrasse de Taplow ». Enfin, la remontée postflandrienne du niveau marin est responsable d’un alluvionnement abondant dans le lit majeur, large et marécageux.

Le site originel de Londres, à l’emplacement de la City, a été fixé à un étranglement de la plaine alluviale, là où deux lambeaux de la terrasse de Taplow, proches du fleuve, de part et d’autre de celui-ci, facilitèrent la construction d’un pont, le seul jusqu’au milieu du xviiie s. La ville s’est étendue d’abord sur la terrasse de Taplow, à l’abri des inondations, et ses installations portuaires ont été creusées sans difficulté dans les alluvions meubles du lit majeur. À partir du xixe s., toutefois, l’habitat des classes pauvres a envahi les terrains mal drainés du voisinage du port et de la basse vallée de la Lea. Les hautes terrasses et les collines taillées dans les argiles éocènes ont fourni de leur côté le site des quartiers aisés du xixe s. et du début du xxe : collines de Hampstead, de Mill Hill, de Harrow-on-the-Hill par exemple.

La terrasse de Taplow, en amont de Londres, aux sols plats et bien drainés, s’est longtemps consacrée au maraîchage, avant d’être submergée au xxe s. par la progression des banlieues et par l’aéroport de Heathrow (London Airport). Des carrières exploitent les graviers de la terrasse. De vastes réservoirs d’eau potable occupent ensuite les carrières désaffectées. On a aussi creusé des réservoirs dans les alluvions récentes de la vallée de la Lea pour l’alimentation des quartiers de l’est. De nos jours, les banlieues les plus lointaines s’immiscent dans les vallées des revers des Downs et des Chiltern.