Grande Encyclopédie Larousse 1971-1976Éd. 1971-1976
L

loisirs (suite)

 A. Varagnac, Civilisation traditionnelle et genres de vie (A. Michel, 1948). / P. Naville, De l’aliénation à la jouissance. La genèse de la sociologie du travail chez Marx et Engels (Rivière, 1957). / S. Degrazia, Of Time, Work, and Leisure (New York, 1962). / J. Dumazedier, Vers une civilisation du loisir (Éd. du Seuil, 1962 ; nouv. éd., 1972) ; Sociologie empirique des loisirs (Éd. du Seuil, 1974). / J. Fourastié, Machinisme et bien-être (Éd. de Minuit, 1962). / F. Machlup, The Production and Distribution of Knowledge in the United States (Princeton, 1962). / M. F. Lanfant, les Théories du loisir. Sociologie du loisir et idéologie (P. U. F., 1972).

Lo Kouan-tchong ou Louo Kouan-tchong

En pinyin Luo Guanzhong, écrivain chinois qui vécut vers le milieu du xive s.


Il est sans doute né à Taiyuan (T’ai-yuan) ou à Hangzhou (Hang-tcheou), mais sa vie est complètement inconnue, car il n’est mentionné qu’une fois, et ce brièvement, dans les annales. Son œuvre elle-même est sujette à caution. Sa célébrité actuelle lui vient d’œuvres qui lui sont attribuées, mais on ne connaît rien d’autre que ce nom, qui peut être un pseudonyme. Luo Guanzhong aurait écrit plusieurs romans à épisodes, dont Sui Tang Lianggchao zhizhuan (Souei T’ang leang-tch’ao tche-tchouan) [Histoire des dynasties Sui et Tang], Can-tang Wudai shi yanzhuan (Ts’an T’ang Wou-dai cheu yen-tchouan) [Histoire de la fin des Tang et des Cinq Dynasties] et surtout Sanguo zhi yanyi (San-kouo-tche yen-yi) [Roman des Trois Royaumes]. Il aurait collaboré avec Shi Nai’an (Cheu Nai-an) pour la compilation du Shuihu zhuan (Chouei-hou-tchouan) [Au bord de l’eau], le deuxième grand roman du début des Ming. Mais on ne sait guère quelle est la contribution relative des deux auteurs, l’un comme l’autre nous étant inconnus par ailleurs. Le Roman des Trois Royaumes est le premier roman en langue vulgaire écrit à partir de la tradition orale. Les épisodes, aventures et histoires des héros de l’époque dite « des Trois Royaumes » (220-280 apr. J.-C.), très tôt entrés dans la légende, sont l’un des thèmes favoris des conteurs publics de l’époque Song et du théâtre de l’époque Yuan. Luo Guanzhong utilise donc une matière déjà prête, filtrée par des générations d’auditeurs. Il rassemble diverses traditions, qu’il fond en un ensemble relativement homogène. Il garde la formule « par épisodes », dont chacun se termine, comme dans les romans-feuilletons, à un moment d’intense suspense par une formule stéréotypée renvoyant au chapitre suivant. C’est un long roman dont les cent vingt chapitres racontent cette période tumultueuse. Les personnages principaux sont les chefs, militaires ou politiques, de ces trois royaumes. Au nord, le royaume de Wei est gouverné avec efficacité, mais sans douceur, par Cao Cao (Ts’ao Ts’ao), certainement l’un des personnages les plus controversés de l’histoire chinoise et du roman en question. Le roman noircit délibérément les traits de Cao Cao, qui, dans l’imagination populaire, est devenu le symbole de la ruse et de la traîtrise. Cependant, la tendance récente est à la réhabilitation de ce général, si sûr de lui avant la bataille qu’il n’a d’autre soin que d’écrire un poème. En face de lui, le royaume de Shu (Chou) est le domaine du célèbre trio formé par Liu Bei (Lieou Pei), Guan Yu (Kouan Yu) et Zhang Fei (Tchang Fei), trio qui est en fait un quatuor avec l’éminence grise, le cerveau du groupe Zhuge Liang (Tchou-ko Leang). Des trois frères jurés, Liu Bei est l’aîné, le descendant légitime des Han, l’empereur du royaume. Héros à rebours, il n’a guère de personnalité et sert dans le roman de lien entre les autres protagonistes, aux caractères violemment chargés. Zhang Fei incarne la force brute, irraisonnée, toujours à l’affût de la bagarre, mais sans méchanceté. Guan Yu, au contraire, c’est la force dominée, soutenue par la raison, la politesse et le sens de l’honneur. Rien d’étonnant à ce qu’il soit devenu, dans le panthéon populaire, le dieu de la Guerre. Quant à Zhuge Liang, le sage retiré dans sa cabane montagnarde au milieu des livres et du silence, c’est grâce à ses ruses, à son sens de la stratégie comme de la tactique qu’il réussit à maintenir le précaire équilibre qui s’est établi entre les trois pays. Le Roman des Trois Royaumes est un roman d’action et d’aventures autour de la rivalité des pays et des hommes : batailles rangées sur terre et sur navires, combats singuliers, prouesses héroïques, ruses de guerre, alliances et trahisons. Voici quelques-uns des récits les plus célèbres : le serment des trois frères dans le jardin des pruniers, la bataille de la Falaise rouge, le stratagème de la ville vide, comment Zhuge Liang emprunta des flèches, comment Guan Yu gagna la joute oratoire... Le style du roman n’est guère recherché ; expressions toutes faites, répétitions, appel au lecteur témoignent que le roman est encore proche de son origine orale. La langue elle-même, facile à comprendre, au vocabulaire restreint, s’adresse à un large public populaire. Le roman connut d’ailleurs aussitôt un vif succès. La généralisation de l’impression xylographique en permit une vaste diffusion, même au-delà des frontières chinoises. De nombreuses éditions se sont succédé jusqu’à aujourd’hui, et des bandes dessinées pour enfants ont été consacrées aux aventures des héros du Roman des Trois Royaumes.

D. B.-W.

lollards

Chrétiens marginaux du xive s.


À toutes les époques de la vie de l’Église, depuis les origines, des mouvements de retour aux exigences absolues de l’Évangile, au style de vie de Jésus de Nazareth se sont fait jour. Des chrétiens profondément sérieux ont été saisis douloureusement par la distance, petit à petit manifestée, entre le désintéressement, la disponibilité à l’égard des autres, exigés par la pauvreté, le renoncement aux plus élémentaires sécurités et le refus de la volonté de puissance, exprimés par l’existence du Christ. Du coup, renouant consciemment ou non avec un des courants les plus authentiques de la spiritualité juive, retrouvant les formes et les accents des « pauvres d’Israël », ils ont tenté de vivre « au degré zéro de l’existence », solidaires des pauvres, des malades, des opprimés, convaincus que seule la « re-présentation » de la Croix permet au monde de ne pas sombrer dans le chaos et à l’histoire d’avancer vers son terme eschatologique. À quelque époque que ce fût, cela les a conduits à entrer en conflit avec l’« establishment » chrétien, trop souvent sacralisateur de l’ordre socio-politique. À l’inverse des hiérarchies triomphalistes et des monopoles cléricaux, ils ont affirmé et mis en pratique le caractère résolument laïque de la personne et de l’action de Jésus. Marginaux par rapport aux « grandes Églises », condamnés ou méprisés par elles, ils n’ont pas cessé de dresser en face d’elles les signes incontestablement évangéliques de l’humilité et du sacrifice par amour. Bien des éléments de cet héritage sont actuellement repris de façon très parlante par des courants de spiritualité traversant les différentes branches de la famille chrétienne : les prêtres-ouvriers, certains « groupes informels », des fraternités anonymes, en particulier dans les pays où sévit une persécution contre les chrétiens, traduisent une même volonté de fidélité inconditionnelle au plan personnel ou communautaire.