Grande Encyclopédie Larousse 1971-1976Éd. 1971-1976
L

lithographie (suite)

Chromolithographie

Les techniques de report permettent de faire des décalques en repérage et d’y dessiner les images de plusieurs couleurs. L’impression lithographique en couleurs, ou chromolithographie, a connu un grand essor pendant plus d’un siècle pour les illustrations de livres, les calendriers, les étiquettes de parfumerie, remarquables par la fraîcheur de leurs couleurs, et pour les célèbres affiches de la Belle Époque.


Évolution

À partir de 1910 environ, l’offset, qui est de la lithographie indirecte, a, peu à peu, pris la place de la lithographie directe comme procédé d’impression. Mais les plaques offset sont souvent obtenues pour les petits tirages par les mêmes techniques simples de dessin ou de report, et la photolitho reste à la base de la photogravure offset. L’impression litho, sur des presses dont le principe est resté le même depuis l’origine, est encore utilisée pour des cartes géographiques, des partitions musicales, des affiches et des impressions artistiques, car la variété des techniques permet à l’artiste créateur une diversité d’effets presque illimitée, encore augmentée par la possibilité de modifier l’encrage et la pression lors du tirage.

G. B.

➙ Estampe / Offset / Photogravure / Presse.

 G. Baudry et R. Marange, Comment on imprime (Dunod, 1956 ; 4e éd., 1971). / A. Bargilliat, Photolitho (Institut national des industries et arts graphiques, 1959). / E. Schwend, Der Offsetdruck (Stuttgart, 1962). / V. Strauss, The Printing Industry (New York, 1967). / R. Loche, la Lithographie (Bonvent, Genève, 1971).

Les inventions de Senefelder

1796

Gravure en relief par une morsure à l’acide d’un dessin sur pierre et utilisation pratique pour impression de musique.

1797

Tirage d’épreuves et report par décalque ; lithographie proprement dite : image imprimante sans relief ni creux.

1798

Gravure sur pierre de traits fins.

1799

Dessin à la craie grasse (crayon litho) sur une pierre dont la surface a été rendue rugueuse par un grainage.

1800

Combinaison de dessins à l’encre, au crayon, à la brosse : images en demi-teintes.

1805

Remplacement de la pierre par une planche de métal : métallographie.

1817

Construction d’une presse lithographique avec dispositifs mécaniques d’encrage et de mouillage.

Li Ts’ing-tchao

En pinyin, Li Qingzhao, poétesse chinoise du début des Song du Sud (Jinan [Tsi-nan], Shandong [Chan-tong], 1084-1141?).


Elle est une des rares femmes à avoir gagné la célébrité littéraire en Chine. Née dans une famille de lettrés, elle reçut — bien que fille — une éducation soignée, imprégnée de lectures classiques. À dix-huit ans, elle épouse un jeune lettré, Zhao (Tchao), passionné d’antiquités. Avec l’aide de sa femme, celui-ci rédige un des premiers catalogues de bronzes anciens, dont il étudie les inscriptions. Les troubles de la fin des Song du Nord et l’invasion des provinces du Nord par les Jin (Kin) en 1124 forcent le couple à quitter son pays natal. Au cours de leur retraite vers le sud, à la suite de la Cour, Zhao meurt ; Li Qingzhao continue seule ses voyages, cherchant asile auprès de diverses personnes de sa parenté. Pendant ses nombreux déplacements, elle a la douleur de voir disparaître petit à petit les magnifiques collections d’antiquités de son époux, auxquelles elle tenait précieusement et pieusement. On ignore la date de sa mort. On sait seulement qu’en 1141 elle était encore en vie.

Son œuvre poétique est très restreinte. Il ne nous est parvenu qu’une cinquantaine de poèmes, tous des poèmes à chanter. Pour une fois, la détresse et la solitude des femmes abandonnées, un des thèmes si souvent exploités par les poètes chinois, sont chantées par une femme. C’est sans doute pour cela que ses accents sont aussi émouvants. Chaque parole est gonflée de sincérité. Il n’y a pas à s’y tromper, c’est une femme seule qui parle de sa solitude. On trouve dans ses poèmes un je-ne-sais-quoi d’indéfinissable et d’impondérable qui trahit son sexe. La forme préférée de Li Qingzhao est le ci (ts’eu), poème à chanter. Tout en suivant les règles parfois compliquées avec une grâce de virtuose consommée, elle sait trouver un ton et des rythmes qui frappent par leur modernisme. Rythme coupé, haché, où les idées se heurtent brutalement, faisant naître des résonances qui se propagent à l’infini. Sans être clairement exprimés, les sentiments jaillissent de la confrontation des choses avec la réalité, terriblement présents, au-delà de l’apparence du détachement. Tel ce poème « sur l’air le printemps à Wuling » :
Le vent est doux, la poussière parfumée, les fleurs passées.
Quand vient le soir, je n’ai pas le courage de me coiffer.
Les objets sont, il n’est plus, tout s’est arrêté.
Je voudrais parler, les larmes me devancent.
On dit que le printemps est encore beau sur le Double Ruisseau,
Pourtant je n’oserais y voguer en bateau,
Craignant qu’une barque ne puisse déplacer tristesse aussi pesante.

Si le vers « Je voudrais parler, les larmes me devancent » n’a rien d’original et peut être facilement comparé à d’autres vers du même genre, le vers qui précède est incontestablement d’une très grande nouveauté, par la pensée et l’expression. Quelle force dans cette juxtaposition si simple, mais si bouleversante : « Les objets sont, il n’est plus. » Aucune recherche inutile, aucun effet vain ; la réalité vue froidement suffit à transmettre au lecteur les sentiments de la poétesse. À côté de ce vers, les autres vers, si élégants soient-ils dans leur tristesse raffinée et délicate, paraissent presque minces et fades. Sauf cette « tristesse si pesante » qu’elle ferait chavirer le bateau. Ce poème est caractéristique de la seconde période de Li Qingzhao, celle qui suit la mort de son mari. Dans sa jeunesse, son inspiration était sinon frivole, du moins légère. Poèmes où elle décrit la vie heureuse et facile d’une jeune épouse aimée et admirée de son mari, quand, au sortir de leurs études savantes, ils n’avaient d’autre soin que d’admirer les arbres de la cour, sa coiffure élégante et les auteurs d’autrefois. Jetée dans le tourbillon de la guerre et de l’exil, et sans l’appui de son mari, sa sensibilité s’affine et s’approfondit. L’art d’écrire, le choix des mots et des rythmes, le sens musical se mettent alors au service de ses sentiments.

D. B.-W.