Grande Encyclopédie Larousse 1971-1976Éd. 1971-1976
L

lied (suite)

À partir de la fin du xviiie s., le lied connaît une vogue sans précédent. Un immense répertoire formé d’authentiques chants populaires, de chants parafolkloriques et de compositions originales de plus en plus nombreuses est livré au public. À partir du xixe s., après Beethoven, le lied devient un genre extrêmement fécond et connaît une magnifique floraison. Les limites qui l’enserraient tendent à s’élargir, et ses dispositions deviennent de plus en plus diverses. Les musiciens choisissent de préférence des textes de haute valeur littéraire, puisés dans les œuvres de Goethe, de Schiller, d’Eichendorff, de Chamisso, de Heine, d’Eduard Mörike (1804-1875), etc., ou traduits de Shakespeare, de Byron, de Walter Scott, etc. Au lieu de conserver la même musique pour chaque strophe, ils y introduisent des variantes mélodiques ou bien les composent d’un bout à l’autre, en suivant librement le sens des paroles. Ils font parfois intervenir, comme Reichardt et Johann Rudolf Zumsteeg (1760-1802) dans leurs ballades, un épisode tout à fait nouveau, souvent dramatique, en usant par moment du style récitatif. En même temps, ils accordent à l’accompagnement une importance accrue. Celui-ci, en s’amalgamant étroitement avec la mélodie, gagne en force expressive. Il réussit à suggérer à la fois le décor et l’ambiance psychologique, c’est-à-dire tout l’univers poétique reflété par le texte. Le langage du lied devient plus complexe, mais aussi plus riche en résonances profondes. Le premier, le Viennois Franz Schubert* (1797-1828) le porte à son accomplissement. Il a laissé environ six cents lieder — dont deux cycles : Die schöne Müllerin (la Belle Meunière, 1823) et Winterreise (le Voyage d’hiver, 1827) —, où il traite, dans un style tantôt populaire (Heidenröslein [Rose des bruyères], 1815), tantôt dramatique (Erlkönig [le Roi des aulnes], 1815), tantôt proche de la grande ballade (Prometheus [Prométhée], 1819), ses thèmes favoris : la nature, l’amour, la mort. Le nouveau pianoforte, déjà utilisé par Beethoven, lui offre en outre les moyens dynamiques de nuancer l’expression. Vers la même époque, ni Carl Loewe (1796-1869), ni Mendelssohn*, ni, plus tard, Liszt*, musicien trop cosmopolite, ne peuvent rivaliser avec Schubert. Seul de sa génération, Schumann*, plus cultivé, traduit dans son commentaire pianistique plus complexe, plus intense et plus lyrique — notamment dans ses cycles (Dichterliebe [les Amours du poète] ; Frauenliebe und -leben [la Vie et l’Amour d’une femme], 1840) — le sens intime du lied. Par la suite, Brahms* se rapproche de Schubert par son goût pour le style populaire. Moins enclin à la confidence, il donne à ses lieder un caractère élégiaque, souvent noble et grave. Hugo Wolf*, influencé par Wagner, use d’une déclamation continue soutenue par des harmonies modulantes et résolument modernes. Gustav Mahler* donne au lied une dimension nouvelle, en le dotant fréquemment d’un accompagnement d’orchestre. Il l’introduit, avec le concours de la voix, dans ses symphonies. Das Lied von der Erde (le Chant de la terre, 1908) est une « symphonie » composée d’une suite de six lieder confiés alternativement à deux solistes. Parmi les plus récents compositeurs de lieder, il faut aussi citer Max Reger (1873-1916), Richard Strauss*, Hans Pfitzner (1869-1949), l’Autrichien Joseph Marx (1882-1964), Paul Hindemith (1895-1963) et les compositeurs de l’école viennoise dodécaphoniste Arnold Schönberg*, Alban Berg* et Anton von Webern*.

Le lied polyphonique n’a pas constamment suivi dans son développement le lied à voix seule. Il ne prit son essor qu’aux xve et xvie s., disparut ensuite pour ne réapparaître qu’à l’approche du xixe s., sous l’impulsion de Johann Friedrich Reichardt et de Karl Friedrich Zelter, qui voulaient offrir aux chorales d’amateurs un répertoire facile. Par la suite, de Schubert à Webern, les plus grands musiciens composèrent des lieder polyphoniques.

Si, d’une manière générale, le lied se distingue avant tout par l’unité d’inspiration du poète et du musicien, on peut dire que, depuis Berlioz*, un lied français est né, qui n’a pas cultivé, comme en Allemagne, les chants simples du peuple, mais qui a trouvé son accomplissement dans les mélodies d’un lyrisme raffiné de C. Franck*, de H. Duparc*, de E. Chausson, de G. Fauré*, de Cl. Debussy* et de M. Ravel*. La même remarque peut aussi s’appliquer à des mélodies d’autres musiciens européens, par exemple à celles de Moussorgski*.

On a quelquefois appelé lied une composition purement instrumentale de dimension et d’expression mélodique analogues (F. Mendelssohn, Lieder ohne Worte [Romances sans paroles]).

Dans la musique instrumentale, la « forme lied » affecte surtout le mouvement lent de la sonate, de la symphonie et du concerto classiques et romantiques. Elle est construite sur une idée mélodique subdivisée en trois sections, la dernière étant la reprise de la première. On y ajoute parfois un ou deux épisodes modulants, séparés dans ce cas par une reprise de la partie initiale. La forme lied peut aussi prendre la forme sonate, sans développement central, ou celle du lied varié.

A. V.

➙ Mélodie.

 M. Friedlander, Das deutsche Lied im 18. Jahrhundert (Stuttgart et Berlin, 1902 ; 3 vol.). / H. Kretzschmar, Geschichte des neuen deutschen Liedes von Albert bis Zelter (Leipzig, 1911). / G. Müller, Geschichte des deutschen Liedes von Zeitalter der Barock bis zur Gegenwart (Munich, 1925). / O. Bie, Das deutsche Lied (Berlin, 1926). / M. Beaufils, le Lied romantique allemand (Gallimard, 1957). / H. J. Moser, Das deutsche Sololied und die Ballade (Cologne, 1957). / A. Sydow, Das Lied (Göttingen, 1962). / R. Stricker, la Mélodie et le lied (P. U. F., coll. « Que sais-je ? », 1975).

Liège

V. de Belgique, ch.-l. de la province du même nom ; 241 000 hab. (Liégeois).



La géographie

Avec 600 000 habitants, l’agglomération arrive au troisième rang des agglomérations belges. Le centre de la ville est localisé sur la rive gauche d’une Meuse encaissée, près de la confluence de l’Ourthe et de la Vesdre. Il se divise en deux parties. Au nord est le noyau primitif, qui a conservé les administrations, une partie de l’université, les théâtres, une floraison exceptionnelle de monuments, les rues les plus commerçantes. L’animation des vestiges historiques prestigieux, un urbanisme très moderne rendent ce centre particulièrement séduisant. Le noyau primitif s’était établi sur la rive concave d’un bras de la Meuse (occupé aujourd’hui par la courbe caractéristique du boulevard de la Sauvenière). La Meuse longeait le plateau de Hesbaye, accessible par la vallée d’un petit affluent, la Légia, et la ville s’est installée sur le cône de déjection de ce cours d’eau. C’était aussi un site de défense avec un petit éperon rocheux, le Publémont, entre Meuse et Légia, à l’emplacement de l’actuelle église Saint-Martin. La vallée est déjà assez large pour que la ville puisse s’étendre. Le sud du noyau central s’est développé tardivement, en direction de la gare des Guillemins. Ici on trouve hôtels, restaurants, professions libérales. La circulation dans le centre a été facilitée par un anneau autoroutier et la création d’axes piétonniers.