Grande Encyclopédie Larousse 1971-1976Éd. 1971-1976
L

Lichens (suite)

Rapports morphologiques entre l’Algue et le Champignon

Les hyphes du Champignon sont en général en rapports étroits avec les Algues. Tantôt elles s’appliquent sur la cellule algale sans y pénétrer (appressoria), tantôt elles y envoient des suçoirs (haustoria). Certains de ceux-ci, intramembranaires, ne percent pas complètement la paroi et font à peine saillie dans la cellule ; d’autres, intracellulaires, traversent la paroi et pénètrent dans la cellule en repoussant le plasmalemme, qui s’invagine autour d’eux. Les haustoria, très communs, sont parfois saisonniers. En général, la cellule qu’ils envahissent reste vivante et capable de sporuler. Dans ce cas, les haustoria restent attachés à la paroi de la cellule mère et sont éliminés avec elle.


Rapports physiologiques et biologiques

Longtemps soupçonné, le passage de glucides de l’Algue vers le Champignon a été mis en évidence récemment grâce à l’emploi du carbone marqué (Smith). L’Algue cède du glucose quand c’est une Cyanophycée, du ribitol quand c’est un Trebouxia. Le Champignon les transforme ensuite en mannose et en polysaccharides spécifiques (lichénine, isolichénine). Chez Peltigera aphtosa, l’azote atmosphérique fixé par l’Algue des céphalodies passe de même dans le thalle. Enfin, l’utilisation par le Champignon de thiamine excrétée par certains Nostocs reste à démontrer.

Le passage inverse de substances du Champignon vers l’Algue n’a pas été mis en évidence. Par contre, il est probable que le Champignon protège l’Algue contre l’excès de lumière et régularise l’apport en eau et en substances minérales dissoutes. Pour certaines Algues, inconnues à l’état libre, le mycélium tient lieu de niche écologique.


Modifications des symbiotes

La lichénisation entraîne des modifications des deux symbiotes. Dans les thalles, les cellules des Algues sont plus sphériques, avec un plaste gonflé ; souvent elles perdent leurs enveloppes gélatineuses (les Nostocs dans les Peltigera). Les cycles de reproduction s’altèrent : les zoospores ne se forment plus (Trebouxia), ni même chez d’autres espèces, les aplanospores. La photosynthèse et le métabolisme augmentent ; la perméabilité cellulaire se modifie (excrétion de glucides). Le Champignon, quant à lui, développe des appressoria et des haustoria ; il devient capable d’édifier un thalle complexe et d’élaborer des substances lichéniques ; son cytoplasme contient des « corps ellipsoïdaux » énigmatiques (ultramicroscopie).


Place des Lichens dans la nature ; leur utilisation

Les Lichens, universellement répandus, représentent une réussite biologique remarquable. Ils constituent, sur des substrats particulièrement inhospitaliers, des associations tantôt pionnières, tantôt climax et stables (toundras arctiques, rochers, écorces). Malgré cela, du fait de leur faible capacité métabolique, ils ne jouent qu’un rôle modeste dans les cycles biologiques et dans la production de matière de la biosphère. Dans les régions arctiques, ils sont pâturés par les grands herbivores (Caribous, Rennes), mais ces pâturages sont dangereux, les Lichens accumulant dans leur thalle des minéraux radio-actifs qui contaminent ensuite la chaîne alimentaire jusqu’à l’homme.

Peu utilisés en pharmacie (pâtes pectorales), remplacés en teinturerie (Orseille) par les dérivés de l’aniline, les Lichens servent encore en parfumerie comme ralentisseur de l’évaporation ou comme base de parfum (tel le « cuir de Russie »).

M. A. L.-G.

➙ Algues / Champignons.

 H. des Abbayes, Traité de lichénologie (Lechevallier, 1951). / K. A. Kershaw et K. L. Alvin, The Observer’s Book of Lichens (Londres, 1963). / V. Ahmadjian, The Lichen Symbiosis (Waltham, Mass., 1967). / M. E. Hale, The Biology of Lichens (Londres, 1967). / J. Lambinon, Lichens (Naturalistes belges, Bruxelles, 1969). / J. Poelt, Bestimmungschlüssel europäischer Flechten (Berlin, 1969). / P. Ozenda et G. Clauzade, les Lichens. Étude biologique et flore illustrée (Masson, 1970). / E. Frey, les Lichens (Payot, Lausanne, 1971). / C. Souchon, les Lichens (P. U. F., coll. « Que sais-je ? », 1971).

Liebknecht (Karl)

Militant socialiste allemand (Leipzig 1871 - Berlin 1919).


Karl Liebknecht était le fils de Wilhelm Liebknecht (1826-1900), député socialiste au Reichstag de 1867 à 1870, puis de 1874 à 1887 et de 1890 à 1900, rédacteur en chef du Vorwärts, organe du parti social-démocrate. En 1896, Karl est docteur de l’université de Würzburg. Avocat, il épouse la fille d’un banquier. Mais la politique l’attire. Aussi hostile au militarisme que son père, il combat, avec une égale énergie, la bureaucratie, qui lui paraît paralyser la social-démocratie. Il vibre lors de la révolution russe de 1905. En 1907, il participe à la fondation de l’Internationale de la jeunesse socialiste et publie Militarisme et antimilitarisme, qui lui vaut un procès pour haute trahison et une condamnation à un an et demi de détention dans une forteresse.

Élu à la Chambre des députés de Prusse en 1908, il effectue un voyage en Russie, puis contracte en 1912 un second mariage avec une jeune Russe. La même année, il entre au Reichstag, où il prononce un discours retentissant sur la manière dont la firme Krupp pousse, selon lui, à la guerre.

Lorsque le conflit est proche, il consent à voter les crédits de guerre pour respecter la discipline du groupe social-démocrate ; ses amis de Stuttgart le lui reprochent vivement. Mais, le 2 décembre 1914, il vote contre les crédits nouveaux, et il est seul à le faire. Cette guerre est, dit-il, une guerre impérialiste pour la domination du marché mondial. Il combat aussi bien les indépendants que les « majoritaires ». Ses sympathies vont à Lénine et à ses théories.

Mobilisé en février 1915, il est envoyé en Lorraine, puis à Riga. À la demande de Karl Legien (1861-1920), le groupe social-démocrate l’exclut le 1er janvier 1916. Venu à Berlin pour une session du Reichstag, il y dirige, le 1er mai, une manifestation contre la guerre. Selon le témoignage de Karl Kautsky (1854-1938), la popularité de K. Liebknecht est alors sans égale. Il est arrêté, condamné à deux ans et demi de travaux forcés et emprisonné notamment à Luckau. Il y écrit un ouvrage sur les lois dynamiques du développement de l’humanité et dénonce le traité de Brest-Litovsk.