Grande Encyclopédie Larousse 1971-1976Éd. 1971-1976
L

leucocyte (suite)

La formule leucocytaire

Elle consiste à établir les taux des divers leucocytes. Dans le tableau ci-dessous est représentée la formule leucocytaire normale, qui comporte les éléments suivants :

Pour établir cette formule leucocytaire, la bonne qualité des frottis de sang et de leur coloration par la technique de May-Grünwald-Giemsa est indispensable. Un minimum de 400 cellules devraient être identifiées, et en fait l’expression en nombre absolu par millimètre cube serait préférable.


Anomalies de nombre et d’aspect des leucocytes

Quelle que soit la méthode utilisée, on dit qu’il y a une leucopénie lorsque le chiffre des leucocytes est inférieur à 4 000 par millimètre cube, et une hyperleucocytose lorsque ce chiffre est supérieur à 10 000 par millimètre cube. On peut parler de tendance leucopénique lorsque le chiffre est compris entre 4 000 et 5 000 par millimètre cube.

Parmi les leucocytes polynucléaires, il est des éléments plus ou moins jeunes que l’on classe selon la formule suivante (formule d’Arneth), qui indique leur répartition en pourcentage théorique, dans les conditions normales :
éléments à un noyau échancré : 5 p. 100
éléments à deux noyaux : 35 p. 100
éléments à trois noyaux : 41 p. 100
éléments à quatre noyaux : 17 p. 100
éléments à cinq noyaux ou plus : 2 p. 100.

Le nombre de noyaux augmente avec l’âge des éléments. L’on dit que la formule d’Arneth est déviée vers la gauche lorsque le pourcentage d’éléments jeunes est prédominant et qu’elle est déviée vers la droite lorsque le pourcentage d’éléments plus âgés est supérieur à la normale.

Dans certains cas chez l’adulte, et normalement chez l’enfant jusqu’à environ 5 ans, la formule leucocytaire est dite « inversée », c’est-à-dire que le nombre d’éléments mononucléés est supérieur à celui des éléments polynucléés. Cela correspond à une lymphocytose (augmentation des lymphocytes) relative élevée, mais on ne saurait parler dans tous ces cas d’hyperlymphocytose vraie sans avoir contrôlé le chiffre de lymphocytes par millimètre cube. Parallèlement s’observe une tendance neutropénique (baisse des polynucléaires neutrophiles) relative, mais, pour parler de leuconeutropénie vraie, il faut exiger également une expression en nombre absolu.

S’il est hors de propos ici d’envisager les diverses phases de la formation des leucocytes, ou leucopoïèse (v. hématopoïèse), il convient de rappeler que sur les bases physiologiques de celles-ci a pu être établie une classification des granulopénies (diminution du nombre des polynucléaires ou granulocytes). Depuis quelques années, l’étude de la dynamique des polynucléaires marqués par le chrome 51 a permis de séparer en quatre catégories ces anomalies. Les premières dépendent de troubles quantitatifs de la production ; les deuxièmes correspondent à des troubles de la répartition (par exemple hypersplénisme [augmentation de fonctionnement de la rate] ou margination diffuse), et donc à de fausses leucopénies ; les troisièmes correspondent à une destruction ou à une utilisation périphérique augmentée, non compensée par la production dans la moelle osseuse et sans anomalie qualitative corpusculaire ; les quatrièmes enfin dépendent de troubles qualitatifs de la production (soit anomalie qualitative des polynucléaires, soit troubles de maturation médullaire ou leucopoïèse inefficace). Dans la pratique courante, ce sont les premières qui sont les mieux connues, sous le nom d’agranulocytoses, dont l’origine peut être toxique ou purement hématologique. Au maximum est réalisée une aplasie médullaire, parfois révélatrice d’une leucémie* aiguë et menaçant gravement le pronostic vital par les risques de surinfection foudroyante qu’elle comporte.

À l’inverse, la surproduction des éléments blancs, classiquement appelée hyperleucocytose, correspondant le plus souvent à des processus infectieux bactériens, n’implique pas le même pronostic, à moins qu’on ne découvre des éléments très jeunes en nombre anormal, faisant évoquer là encore une leucémie. D’autres infections peuvent s’accompagner de modifications de la formule blanche : il en est ainsi de la coqueluche, où l’on note une hyperleucytose avec hyperlymphocytose ; de la mononucléose infectieuse, caractérisée par un syndrome monocytaire fait de cellules au noyau tourmenté « grimaçant » ; de la rubéole, où l’on peut constater une plasmocytose périphérique. Toutefois, la plupart des viroses (affections dues à des virus, telle la grippe) entraînent une leuconeutropénie ou du moins s’accompagnent d’une absence d’hyperleucocytose. Il en est de même de quelques rares infections bactériennes, telles les fièvres typhoïdes* et paratyphoïdes, les brucelloses*.

Ces divers aspects pathologiques sont expliqués en partie par les principales fonctions physiologiques des leucocytes. Pour les granulocytes, il s’agit de la défense de l’organisme grâce à la phagocytose (microbes « mangés » par les leucocytes), mise en évidence par E. Metchnikov (1845-1916) et susceptible d’aboutir localement à la formation de pus (polynucléaires altérés). De plus, grâce à des mouvements amiboïdes, au moyen de pseudopodes, ils sont capables de traverser la paroi des capillaires (diapédèse à travers l’endothélium). Enfin, les granulocytes (ou polynucléaires) ont un rôle de destruction des hématies vieillies, de transport de certaines substances, et ils produisent des enzymes.

En ce qui concerne les lymphocytes, ils sont surtout considérés actuellement comme le support de la mémoire immunologique tissulaire (v. immunologie). Les monocytes, eux, sont dotés de propriétés de phagocytose, ou plus exactement de macrophagie (ils « mangent » les gros éléments autres que les microbes, telles les cellules mortes). Il faut bien admettre que, d’ici quelques années, de nouvelles connaissances seront obtenues grâce, d’une part, à la microscopie électronique, d’autre part, aux progrès de la biochimie et de l’immunologie.

M. R.

➙ Hématie / Hématopoïèse / Sang.