Grande Encyclopédie Larousse 1971-1976Éd. 1971-1976
A

accidents du travail (suite)

Dès 1884, cependant, une méthode différente d’indemnisation apparaît en Allemagne. La responsabilité individuelle cède la place à la responsabilité corporative ; l’indemnisation des accidents du travail fait partie intégrante du système d’assurances* sociales au même titre que l’assurance maladie (1883) et comme en fera partie l’assurance invalidité-vieillesse (1889). Cette attitude nouvelle se retrouve dans les législations autrichienne (1887), italienne (1904), polonaise, tchécoslovaque et yougoslave d’entre les deux guerres mondiales, norvégienne (1915), suédoise (1916), danoise (1920), bulgare (1924), luxembourgeoise (1925) et même française (à partir de 1946). Il faut noter qu’en France l’ordonnance du 19 octobre 1945 n’a pas été appliquée, une ordonnance nouvelle du 30 octobre 1946 lui ayant été substituée ; celle-ci marque un certain recul vers la notion de responsabilité individuelle, recul accentué en 1951 lorsque a été adopté un système de tarification des cotisations en fonction du coût réel du risque.

Dans la plupart des pays, les tendances suivantes se font jour : indemnisation d’un maximum de travailleurs salariés (en France, la généralisation a été achevée en 1938) ; assimilation à un accident du travail de certaines maladies (France [1919]), puis allongement progressif de la liste des maladies professionnelles ; indemnisation du travailleur salarié qui est victime d’un accident de trajet (France [1946], Belgique, Bulgarie, Tchécoslovaquie, Yougoslavie, etc.) ; mise sur pied d’une politique systématique de prévention. L’Organisation internationale du travail recommande dès 1923 une action de prévention, adopte une première convention internationale du travail (1929), élabore des règlements types généraux et spécialisés. En France, l’action législative, réglementaire et professionnelle est complétée par les techniques mises au point par les organismes de sécurité sociale en application de la loi du 30 octobre 1946 et du décret du 31 décembre de la même année.


L’organisation française

Tous les salariés sont couverts par la loi, la majorité des salariés de l’industrie et du commerce étant rattachée au régime général de Sécurité sociale. En ce qui concerne les salariés de l’agriculture, les principes de la loi de 1898 restent en vigueur : responsabilité individuelle de l’employeur qui peut — mais n’est pas tenu de le faire — s’assurer auprès d’une compagnie d’assurances agréée ou auprès d’une caisse de la mutualité agricole (un fonds commun supplée à la défaillance des employeurs non assurés et insolvables).

Lorsqu’il y a couverture par le régime général, un régime spécial ou une assurance en ce qui concerne les travailleurs agricoles, l’employeur est tenu — et lui seul — de verser une cotisation ou une prime. (Dans certains pays étrangers où les accidents du travail sont vraiment intégrés aux assurances sociales, le travailleur est également soumis à cotisation [Grèce, Inde, Iran, Uruguay], l’État l’étant aussi parfois à son tour [base tripartite en Grande-Bretagne et au Guatemala].)

Depuis la loi du 22 décembre 1966, les exploitants agricoles sont obligatoirement tenus de contracter pour eux-mêmes et les membres de leur famille travaillant sur l’exploitation une assurance contre les accidents et les maladies professionnelles. Ils peuvent choisir librement leur assurance parmi les compagnies agréées, les sociétés mutualistes, les caisses d’assurances mutuelles de la loi de 1908 et les caisses de mutualité sociale agricoles.

Les non-salariés non agricoles peuvent contracter une assurance volontaire auprès des caisses de Sécurité sociale.

Les précisions suivantes concernent uniquement le régime général de Sécurité sociale.

Les cotisations sont versées par les employeurs, tous les mois ou tous les trois mois, à l’Union pour le recouvrement des cotisations de sécurité sociale et d’allocations familiales (U. R. S. S. A. F.) ; elles sont en principe calculées sur le même salaire que celui qui sert de base aux cotisations d’assurances sociales et de prestations familiales. On distingue quatre types de tarification : tarification collective pour une branche d’activité, tarification individuelle, tarification mixte (dans ces trois types, il est tenu compte simultanément des salaires payés et des prestations versées au cours des trois années précédentes soit dans la branche d’activité, soit dans l’entreprise) et tarification forfaitaire.

Les prestations sont versées par les caisses primaires et régionales d’assurance maladie.

L’employeur qui ne s’est pas libéré dans le délai légal imparti se rend coupable d’une contravention* (la récidive constitue un délit*), encourt des majorations de retard et peut se voir demander le remboursement des prestations servies à ses salariés entre la date d’exigibilité des cotisations et la date de leur versement effectif.

Les risques couverts

• l’accident proprement dit. La lésion corporelle subie par la victime doit avoir pour origine une cause soudaine (même si le préjudice subi trouve en partie sa cause dans une prédisposition ou une affection préexistante) s’étant manifestée par le fait du travail au temps et au lieu de ce travail à un moment où l’assuré se trouvait sous la dépendance ou la subordination de l’employeur (même si la victime utilisait pour ses besoins personnels ou ceux d’un camarade la machine et l’outil dont il se sert, même en cas de désobéissance à l’employeur).

• l’accident du trajet. Est assimilé à un accident du travail l’accident survenu entre la porte de la résidence du travailleur (résidence principale ou résidence secondaire présentant un certain caractère de stabilité ou même tout autre lieu où il se rend de façon habituelle pour des motifs d’ordre familial : restaurant, cantine ou tout lieu où le travailleur prend habituellement ses repas) et le lieu de son travail dès lors que la victime effectue un parcours normal sans s’interrompre ou se détourner pour un motif dicté par l’intérêt personnel ou indépendant de l’emploi.