Grande Encyclopédie Larousse 1971-1976Éd. 1971-1976
L

lecture (suite)

La désorientation affective (due à l’absence d’un parent, au double rôle de l’autre, à l’instabilité des récompenses et des punitions, à l’instabilité des conduites parentales, au conflit des adultes de l’entourage, aux changements trop fréquents de milieu de vie, à la confusion des relations de parenté, à des chocs affectifs divers) s’exprime par la désorientation dans l’espace-temps. Par ailleurs les inhibitions acquises dans la communication avec autrui (manque de confiance en soi ou en eux, ressentiment, peur, impression de rejet ou d’abandon, non-écoute de l’enfant par autrui, réactions aux contraintes ou aux frustrations, etc.) perturbent tout le système des communications, et donc la lecture. Pour tenir compte de ces observations, on pense actuellement qu’il y a plusieurs types de dyslexie.

Le dépistage de la dyslexie se fait par des épreuves spéciales, ou épreuves de lecture, qui font apparaître les phénomènes suivants :
1o difficulté à différencier des lettres comme u et n ou b, p, d, q ;
2o confusions entre consonnes sourdes et sonores ;
3o inversions (car pour arc, pla pour pal par exemple) ;
4o contraction et déplacement de mots, déchiffrage pénible, incompréhension du sens par suite de l’effort de déchiffrage lettre à lettre ou mut à mot, etc.

Des examens ont lieu ensuite pour éliminer d’autres causes d’échec en lecture (débilité, déficits visuels ou auditifs, déficit de la coordination des mouvements ou de la musculature de l’œil, lésions cérébrales, etc.).

La rééducation des dyslexiques se fait par des méthodes diverses (S. Borel-Maisonny, A. Bourcier, C. Chassagny, A. Tomatis, etc.) et réussit d’autant plus vite qu’elle est dépistée plus tôt (six à neuf mois quand l’enfant a entre six et neuf ans). Cette rééducation est faite par des rééducateurs, ou orthophonistes, possédant un diplôme d’État de spécialisation dans la dyslexie.

R. M.

➙ Affectivité / Débilité mentale / Enfant / Intelligence / Langage / Orthographe / Pédagogie / Piaget (Jean) / Psychomoteur (développement).

 R. Dottrens et E. Margairaz, l’Apprentissage de la lecture par la méthode globale (Delachaux et Niestlé, 1938 ; 4e éd., 1951). / J. de Ajuriaguerra et coll., l’Apprentissage de la lecture et ses troubles (P. U. F., 1952). / C. Chassagny, l’Apprentissage de la lecture chez l’enfant (P. U. F., 1954). / W. S. Gray, l’Enseignement de la lecture et de l’écriture (Unesco, 1957). / F. Kocher, la Rééducation des dyslexiques (P. U. F., 1959). / A. Jadouble, Apprentissage de la lecture et dyslexie (P. U. F., 1962). / A. Bourcier et R. Mucchielli, la Dyslexie, maladie du siècle (E. S. F., 1964 ; 4e éd., 1972). / A. Bourcier et coll., Traitement de la dyslexie (E. S. F., 1966 ; 3e éd., 1971). / M. de Maistre, Dyslexie, dysorthographie (Éd. universitaires, 1968 ; 2 vol.). / A. Tomatis, Éducation et dyslexie (E. S. F., 1972).

Ledru-Rollin (Alexandre Auguste Ledru, dit)

Homme politique français (Paris 1807 - Fontenay-aux-Roses 1874).



L’homme

Ce démocrate est un riche bourgeois, dont la position de fortune s’accroît par le mariage et qui embrasse, comme bon nombre de contemporains de son milieu, la profession d’avocat. La notoriété lui vient très tôt, lorsqu’il se fait le défenseur attitré des républicains en butte à la répression du régime de Juillet. Il plaide avec talent contre le massacre de la rue Transnonain (1834) et pour Marc Caussidière au procès des accusés d’avril 1835.

En 1841, il est élu député dans le collège du Mans, au siège laissé vacant par le décès de Garnier-Pagès (1801-1841). La profession de foi démocrate qu’il publie dans le Courrier de la Sarthe repose sur une revendication majeure, le suffrage universel, qu’il s’agit, d’ailleurs, d’obtenir par la légalité, car le temps des conspirations est passé. Ledru-Rollin est poursuivi en vertu des lois de Septembre, ce qui augmente encore sa popularité, et la Sarthe le réélit sans difficultés en 1842 et en 1846. En 1843, Ledru-Rollin lance la Réforme avec Godefroy Cavaignac et Ferdinand Flocon. C’est l’organe du radicalisme, la fraction la plus avancée du mouvement républicain, dont les revendications sont le suffrage universel, l’impôt progressif et l’enseignement gratuit et obligatoire. Sur le plan des méthodes, le radicalisme est pacifique et prône la pétition à l’image du chartisme*, espérant ainsi susciter un large mouvement d’opinion. Mais cette union des bourgeois et des travailleurs, qui est la clef de voûte du mouvement, repose sur une redoutable ambiguïté. Ledru-Rollin, en effet, ne se prononce pas sur le fond de la question sociale : pour satisfaire les ouvriers, il réclame un État entrepreneur, mais, pour rassurer les bourgeois, il affirme son attachement à la liberté du travail. Duplicité ? Probablement pas, car Ledru-Rollin est une parfaite illustration des contradictions du radicalisme.


Février-juin 1848 : une expérience malheureuse

L’insurrection de février 1848 fait de Ledru-Rollin un homme de gouvernement. Ministre de l’Intérieur du gouvernement provisoire, il s’attelle courageusement à la tâche. Mais ce tempérament passionné est surtout un tribun. Il ne sait guère manœuvrer. Le voudrait-il, qu’il n’en aurait pas les moyens, car sa position est délicate. S’il a pour un temps encore une certaine popularité dans les clubs, il se sent débordé par les revendications socialistes, qui effrayent les hommes du National, majoritaires au sein du gouvernement. Les circulaires aux commissaires qu’il envoie en province affolent les notables. Quand Ledru-Rollin parle de « pouvoirs illimités et révolutionnaires », les classes moyennes traduisent terreur et réquisitions. C’est contre le ministre de l’Intérieur qu’est déclenchée la manifestation du 16 mars, à l’initiative des compagnies d’élite de la garde nationale. Certes, le lendemain, la contre-manifestation populaire est impressionnante, mais la solidarité gouvernementale est à rude épreuve. Ledru-Rollin est rapidement isolé et sans appui. La perspective des élections le place dans une position intenable. Les révolutionnaires, craignant la réaction des provinces, qu’ils savent fort modérées, voire conservatrices, veulent l’ajournement.