Grande Encyclopédie Larousse 1971-1976Éd. 1971-1976
L

laser et maser (suite)

On augmente l’amplification de l’onde incidente en remplaçant le simple guide d’onde linéaire par une cavité résonnante dans laquelle l’onde incidente est réfléchie sur elle-même un grand nombre de fois, formant un système d’ondes stationnaires dont la densité d’énergie uν prend une valeur beaucoup plus élevée, ce qui augmente proportionnellement le nombre de photons induits Ni = B . uν . p2. L’élévation de la densité d’énergie par ondes stationnaires dans la cavité ne constitue pas une amplification au sens technique du terme, parce que la puissance disponible n’est pas augmentée pour autant, tandis que les photons induits fournis par le jet moléculaire augmentent la puissance de l’onde.

Nous ne pouvons décrire ici tous les procédés utilisés pour réaliser des inversions de populations et qui permettent de construire différents modèles d’amplificateurs masers. Ces amplificateurs sont intéressants à cause de leur grande sélectivité en fréquence et de leur faible « bruit ». On en utilise aux foyers des grandes antennes réceptrices qui captent les ondes ultra-courtes émises par les étoiles (radiotélescopes) ou retransmises par les satellites (télévision intercontinentale).

On sait que tout amplificateur électronique peut être transformé en oscillateur électrique si l’on réinjecte à son entrée une faible partie de la tension électrique qu’il produit en sortie. Si l’amplificateur maser a un gain suffisant, il se transforme également en oscillateur, c’est-à-dire qu’il engendre dans la cavité résonnante une onde électromagnétique à la fréquence ν imposée par la transition atomique. Les masers oscillateurs fabriquent ainsi des ondes de fréquence extrêmement stable qui peuvent être utilisées pour la construction d’horloges* atomiques. C’est le cas, en particulier, du maser à hydrogène.


Application aux ondes lumineuses, le laser

L’amplification par émission induite a été étendue aux ondes lumineuses dès 1960 avec la réalisation, par Theodor H. Maiman, du premier laser à rubis. On obtient l’inversion des populations dans le cristal de rubis en l’irradiant avec l’éclair d’une puissante lampe flash, qui porte instantanément la majorité des ions Cr+++ dans un niveau supérieur E2 ; mais l’inversion ne se maintient que pendant un très court instant, inférieur à quelques microsecondes, et le fonctionnement du laser est limité à cette courte durée, suivant l’éclair de la lampe flash. Le laser à rubis est parfaitement adapté à la production de courtes impulsions lumineuses très intenses (on obtient couramment une puissance de 1 MW ; on peut obtenir 109 W pendant 10–9 s), et c’est lui qui a permis d’observer des échos lumineux sur la Lune en dépit de l’infime fraction de l’énergie qui peut être captée au retour.

Dans les lasers à gaz, au contraire, on parvient à réaliser une inversion de population de manière continue en faisant passer une décharge électrique intense à travers un mélange approprié de gaz raréfiés. On obtient des puissances instantanées bien moindres que dans les lasers à rubis (le watt est courant, le kilowatt est une exception), mais le fonctionnement continu assure de bien meilleures conditions de stabilité.

Quelle que soit la technique de pompage, un laser est construit en plaçant le milieu amplificateur (solide, liquide ou gazeux) à l’intérieur d’un interféromètre de Pérot-Fabry formé de deux lames semi-argentées parallèles placées sur le parcours du faisceau lumineux perpendiculairement à sa direction de propagation. L’ensemble se comporte vis-à-vis des ondes comme une cavité résonnante vis-à-vis des ondes hertziennes ultra-courtes : le phénomène d’ondes stationnaires qui se produit entre les deux lames donne à la densité d’énergie uν une valeur beaucoup plus élevée, ce qui, pour une population p2 donnée, augmente le nombre Ni de photons induits.

L’intérêt essentiel des lasers réside dans leur fonctionnement en oscillateurs, parce qu’ils constituent des sources de rayonnement lumineux ayant des propriétés radicalement différentes des sources lumineuses ordinaires, qui reposent au contraire sur l’émission spontanée.

Cela tient au fait qu’on produit un très grand nombre de photons identiques, dont la propagation est décrite par la même onde sinusoïdale. (C’est la situation habituelle avec les sources classiques d’ondes hertziennes, et c’est pourquoi les masers oscillateurs n’apportent pas la même révolution dans le domaine des ondes hertziennes, où ils constituent seulement des oscillateurs plus stables que les autres.)

Ces propriétés spéciales du rayonnement laser peuvent être classées en deux catégories :
1. les propriétés qui sont liées à l’extension spatiale de l’onde et qui se traduisent par la directivité du faisceau laser (sa divergence peut être limitée à quelques secondes d’arc) ; la possibilité de focaliser le faisceau en une tache lumineuse dont la dimension est de l’ordre du micron résulte de la propriété précédente. L’intensité très élevée obtenue dans un faisceau laser en est aussi la conséquence puisque toute la puissance émise par la source se trouve resserrée dans un angle solide très étroit ou bien concentrée dans un volume focal extrêmement réduit ;
2. les propriétés qui sont liées à la durée des trains d’onde, ou durée de cohérence, durée pendant laquelle tous les photons sont décrits par la même onde sinusoïdale avec la même fréquence et la même phase : couramment supérieure à 1 μs, elle peut atteindre la milliseconde. Cela a pour conséquence la possibilité d’observer des interférences avec de très grandes différences de marche ainsi que des interférences ou des battements entre deux lasers indépendants.

Nous terminerons en citant une liste d’applications des sources lumineuses lasers sans, toutefois, pouvoir être complets : alignements en usines ou sur chantiers, télécommunications (la directivité du faisceau assurerait une grande discrétion), télémétrie (en mesurant la durée de retour d’un écho lumineux), microformage (découpe d’un matériau avec une grande finesse en le « brûlant » localement lorsqu’on concentre toute la puissance du laser dans une tache focale très petite), médecine et biologie (la focalisation de courte durée en divers points du fond de l’œil, par exemple, permet de soigner des décollements de rétine), gyroscopie (à l’aide de trois miroirs, on fait parcourir au faisceau laser un chemin triangulaire fermé sur lui-même ; si l’ensemble subit un mouvement de rotation, on observe un battement entre les deux ondes, qui se propagent en sens opposés sur ce chemin triangulaire ; la fréquence de battement est proportionnelle à la vitesse angulaire de rotation), holographie*, qui permet la reconstitution d’images en relief et le stockage d’informations.