Grande Encyclopédie Larousse 1971-1976Éd. 1971-1976
L

langue (suite)

• L’innervation sensitive est représentée :
— par le nerf lingual, branche du nerf maxillaire inférieur — il reçoit la corde du tympan, née du nerf facial (VIIe paire), qui transmet la sensation gustative des deux tiers antérieurs de la langue ;
— par le nerf glosso-pharyngien (IXe paire), qui représente l’innervation sensorielle de la base de la langue ;
— enfin par un rameau direct du facial, qui innerve la partie postérieure de la muqueuse en arrière du V lingual.

La vascularisation artérielle se fait par l’artère linguale, qui donne l’artère dorsale de la langue et l’artère ranine.

Le retour veineux est assuré par de nombreuses veines qui se jettent dans la veine jugulaire interne et dans la veine maxillaire interne.

Les lymphatiques, très importantes, sont drainées dans les ganglions sous-mandibulaires et dans les ganglions jugulo-carotidiens.


Physiologie

• La déglutition. La langue constitue un élément essentiel du premier temps de la déglutition. Les aliments sont réunis sur la face dorsale. La pression de la langue contre le palais s’effectue d’avant en arrière et assure leur progression et leur passage au-delà de l’isthme pharyngé.

La langue participe au second temps de la déglutition, ou temps pharyngien. Elle empêche tout reflux vers la cavité buccale et assure dans une large mesure la protection de l’orifice du larynx, ce qui évite les fausses routes alimentaires. Elle représente une partie de la zone réflexogène de Wassilief, point de départ du réflexe de déglutition.

• La phonation*. La position et les diverses formes que peut prendre la langue contribuent à la formation du spectre sonore des phonèmes émis.

• Le goût. La langue est le point de départ des sensations gustatives (v. gustation).


Pathologie médicale


Affections de la muqueuse linguale

Comme celles des autres muqueuses, elles relèvent de la dermatologie.

• Les glossites sont les affections dont le siège est la langue.

La langue scrotale (plicaturée) est faite d’une augmentation du sillon médian et des plis transversaux. La langue a un aspect lobule, comme le cerveau, et on la compare à la peau du scrotum. Apparaissant vers l’âge de trois à quatre ans, cette anomalie serait une dermatose héréditaire transmise en dominance. Son pronostic est bénin.

La glossite exfoliatrice marginée est faite de zones rouges dépapillées bordées d’un liséré blanchâtre, zones s’effaçant et se repapillant d’un jour à l’autre. Ce mode évolutif migrateur réalise des images curieuses (langue géographique). De durée indéfinie, de cause inconnue, de traitement illusoire, la glossite exfoliatrice ne comporte pas de pronostic sérieux, mais est parfois cause de glossodynie (douleur persistante de la langue) chez les sujets hypersensibles.

La glossite losangique médiane de Brocq-Dauhier est caractérisée par une plaque rouge dépapillée, grossièrement losangique sur la face dorsale de la langue en avant du V lingual. Rebelle à toute thérapeutique, sans cause connue, cette glossite bénigne est de durée indéfinie.

La langue noire villeuse associe une mélanoglossie (langue noire) située en avant du V lingual à une hypertrophie papillaire, les papilles pouvant atteindre 1 cm (langue noire pileuse). La présence de variétés différentes de levures (A. J. Z. Carteaud, E. Drouhet et M. Vieu) semble être en rapport avec un fonctionnement défectueux du foie et de l’intestin. La langue noire villeuse est à différencier de la langue rendue passagèrement brune par l’usage des antibiotiques. Sa durée est très longue, mais son pronostic demeure bénin.

Nombreuses sont des glossites moins bénignes, soit en elles-mêmes, soit qu’elles relèvent d’une affection générale de pronostic plus réservé.

• La syphilis* atteint la langue à toutes ses périodes.

Le chancre*, manifestation première, siège surtout à la pointe, au tiers antérieur de la face dorsale, sur les bords et plus rarement au filet. L’adénopathie (le ganglion) correspondante sous-mentale ou sous-maxillaire est le plus souvent froide et indolente, mais elle peut être douloureuse et inflammatoire.

La syphilis secondaire s’extériorise sous forme de plaques muqueuses. Celles-ci, rouges, érosives, lenticulaires ou ovales, larges de quelques millimètres, sont lisses et souples. Elles sont parfois faites de taches rouges bien délimitées, au niveau desquelles les papilles sont abrasées (plaques fauchées). Les plaques muqueuses fourmillent de tréponèmes. Hautement contagieuses, souvent méconnues, elles peuvent, faute de traitement, persister des mois, voire des années. Non serties d’un liséré carminé, elles se différencient des aphtes*. Au moindre doute, un examen à l’ultramicroscope ainsi que des réactions sérologiques s’imposent.

Les glossites tertiaires de la syphilis sont devenues rarissimes depuis l’ère de la pénicilline. Il en est de même des gourmes linguales. Caractérisées par des bords taillés à pic et un fond recouvert d’un enduit jaune d’or, elles sont indolentes ; il faut les différencier de l’ulcération dentaire à bords éversés et souples, qui est très douloureuse. Si les réactions sérologiques classiques sont négatives dans 50 p. 100 des cas, le test de Nelson est toujours positif en cas de syphilis tertiaire.

• La leucoplasie, dix fois plus fréquente chez l’homme que chez la femme, est faite à son début d’un simple voile blanc bleuâtre translucide siégeant surtout sur la face dorsale et plus rarement sur les bords. Avec les mois ou les années, elle forme une nappe blanche, nacrée, opaque, de surface parquetée. Ultérieurement, elle s’épaissit, devient hyperkératosique, voire verruqueuse. D’origine syphilitique dans 60 p. 100 des cas, elle peut avoir de nombreuses causes locales : tabac, alcool, appareil dentaire défectueux, couples électro-galvaniques des alliages dentaires. De nature syphilitique ou non, la leucoplasie superficielle nécessite une surveillance ; si elle est verruqueuse, il faut la détruire, en raison de sa grande tendance à se transformer en cancer.

• Le lichen lingual est habituellement facile à différencier de la leucoplasie (v. dermatose). Il peut, toutefois, prendre un aspect scléro-atrophique dépapillé rendant le diagnostic très difficile et nécessiter alors une biopsie.

• Le muguet, dû à un champignon microscopique, est constitué de taches crémeuses blanchâtres ou jaune sale siégeant à la face interne des joues, mais aussi sur la langue. Son pronostic est réservé, car il peut témoigner d’une atteinte de l’état général.