Grande Encyclopédie Larousse 1971-1976Éd. 1971-1976
K

Kiev

V. de l’U. R. S. S., capit. de l’Ukraine.


C’est, pour la population, la troisième ville soviétique : 1 632 000 habitants en 1970 (1 110 000 en 1959 et 847 000 en 1939).

Kiev est l’une des plus vieilles villes des pays russes. La « Russie kiévienne » s’étendait autour de sa capitale, le long du Dniepr, sur le chemin des Varègues, de la Baltique à la mer Noire. Elle atteignit son apogée sous le règne de Iaroslav le Sage (1019-1054), devenant le siège d’un métropolite et se couvrant de monuments remarquables. La décadence vint au xiie s., et Kiev perdit son métropolite au profit de Vladimir. Tombée entre les mains des envahisseurs mongols, elle fut réduite à une agglomération de faible importance du xiiie au xviiie s., suzeraine du royaume de Pologne du xive au xviie s. Elle renaquit sur le même site, avec la reconquête russe, à partir de 1654 et surtout au cours du xviiie s., lorsque Catherine II décida la conquête et la colonisation des contrées méridionales, la « Nouvelle Russie », marche frontière et grenier de l’Empire. De nouveau siège d’un métropolite, Kiev devint la capitale de la Petite-Russie. Lors de la formation de la république soviétique d’Ukraine en 1923, elle perdit son titre de capitale de l’Ukraine au profit de Kharkov ; elle le recouvra en 1945 à la suite de la Seconde Guerre mondiale, qui endommagea gravement la ville.

Située sur le Dniepr, en aval des importants confluents du Pripiat (Pripet) et de la Desna, Kiev occupe le site dissymétrique des villes russes de fleuve : la presque totalité de l’agglomération entourant la vieille ville s’est longtemps étalée sur le plateau dominant l’escarpement de la rive droite, occidentale, alors que, de l’autre côté du fleuve, une simple tête de pont s’étendait sur une rive gauche basse et marécageuse. Aujourd’hui y sont construits des quartiers nouveaux groupant plusieurs centaines de milliers d’habitants.

Ville de batellerie, port dont le trafic s’élève à plusieurs millions de tonnes par an (produits agricoles et matériaux de construction), Kiev doit également son importance à sa situation de contact entre deux zones biogéographiques de premier ordre : la forêt mixte au nord et la steppe boisée, puis la steppe au sud. L’aménagement récent de barrages-réservoirs sur le fleuve a renforcé encore sa position et la construction de centrales hydrauliques a permis le ravitaillement en électricité.

Son rôle de capitale est attesté par la présence d’une des premières universités de l’U. R. S. S., fondée en 1834, de nombreux instituts de technologie : la ville reste un foyer de la culture ukrainienne par ses imprimeries, ses librairies, ses clubs.

L’industrie s’est développée d’abord en rapport avec les activités fluviales (chantiers navals de moyenne importance, conserveries de poisson), puis avec l’essor de l’agriculture (minoteries, huileries de tournesol, industries alimentaires de toute nature, qui représentent encore le tiers de la valeur industrielle globale). Une certaine activité est aussi assurée par les industries d’aval du Donbass et les branches de large consommation urbaine (mécanique de précision, électroménager, transports urbains comme les tramways, fabrication de cycles et de motos...). La pétrochimie s’est récemment implantée, représentant un autre tiers de la valeur de la production industrielle. Kiev est atteinte aujourd’hui par les deux gazoducs partant des nouveaux gisements de gaz naturel de Dachava à l’ouest et de Chebelinka à l’est, facteur qui doit contribuer à transformer notablement la structure de son industrie traditionnelle.

A. B.


L’art à Kiev et dans la région kiévienne

Kiev, berceau de l’art et de l’architecture russe, a vu son architecture en pierre se développer après la conversion au christianisme du prince Vladimir Ier, vers 988 ; jusqu’alors, la Russie ne connaissait que le bois. Aussi le prince fait-il appel à des architectes byzantins pour édifier l’église de la Dîme, détruite en 1240 lors de l’invasion tatare. Sous Iaroslav le Sage, de grandes cathédrales sont construites. Celle de Sainte-Sophie de Kiev (1037) fut bâtie en plusieurs étapes : l’édifice primitif comprenait 5 nefs se terminant chacune par une abside ; ce noyau fut entouré d’une double galerie et flanqué de 2 tours-escaliers et couronné de 13 coupoles. L’intérieur fut décoré de mosaïques, dans l’abside centrale la Vierge orante et la Sainte Cène, dans la coupole centrale le Christ Pantocrator. Les fresques représentent des scènes bibliques et laïques. La cathédrale fut restaurée aux xviie et xviiie s. dans le style baroque ukrainien, qui masque en partie l’architecture primitive ; elle fut alors coiffée de 6 nouvelles coupoles. Parmi les grandes réalisations du xie s. dans la région kiévienne, il faut mentionner la cathédrale du Sauveur de Tchernigov (1031-1036) et celle de Sainte-Sophie de Polotsk (1044-1066).

Si le quartier le plus ancien de Kiev est le Podol, où se concentrait le commerce, le foyer spirituel et intellectuel de la ville se trouvait dans le grand monastère de la « Laure des Grottes » (Kiïevo-Petcherskaïa Lavra), fondé au xie s. Son enceinte renferme tout un ensemble de bâtiments, des églises, des cellules, la maison du métropolite ; souvent abîmé par des incendies, le monastère a été restauré, modifié. Certaines portes d’entrée du monastère sont surmontées d’une église ; celle de la Trinité (1108) a été restaurée au xviiie s. en style baroque et décorée alors de fresques parmi les plus belles de l’époque, dues à Olympe Galik ; la porte dite « de l’Économie » est surmontée de l’église de Tous-les-Saints (1696-1698), coiffée de cinq coupoles et décorée de pilastres, de colonnettes, de frontons. Au centre de la Laure s’élevait la collégiale de l’Assomption, construite de 1073 à 1078 (et détruite en 1941) ; l’exécution de ses fresques, due au moine Olympe, se prolongea jusqu’en 1089. L’église-réfectoire ou petite église Sainte-Sophie (1722-1730), dont l’architecture fut modifiée au xixe s., se présente comme un long bâtiment se terminant par une abside et couronné d’une coupole ; la façade occidentale est surmontée d’un fronton décoré de volutes. C’est l’architecte Ivan Ivanovitch Chedel (Gottfried Schädel) qui a édifié le grand clocher de la Laure (1731-1745), un campanile à 4 niveaux coiffé d’une coupole piriforme.