Grande Encyclopédie Larousse 1971-1976Éd. 1971-1976
A

Angleterre (suite)

Le climat océanique a, dans le Sud-Ouest, une nuance méridionale. Certes, les vents sont vifs et les précipitations un peu abondantes (800 mm environ par an sur le plateau, 1 500 mm sur les sommets), mais elles se répartissent assez également entre les saisons. Les étés sont trop frais pour la maturation du blé, d’où la fidélité du Sud-Ouest à la culture du méteil, un mélange d’avoine et d’orge. Mais l’ensoleillement relativement long et la douceur de l’hiver (plus de neuf mois sans gel à l’extrémité de la péninsule) autorisent une saison végétative prolongée. Aussi le Sud-Ouest est-il le royaume de l’herbe ; les bonnes prairies occupent 65 p. 100 de la superficie agricole utile, et les pacages grossiers d’altitude 15 p. 100. En général, les prés restent en herbe de trois à neuf ans, puis on les retourne ; on y cultive du méteil pendant un an ou deux, et on les couche de nouveau en herbe. Dans les marais du Somerset et les basses vallées, l’herbe irriguée au printemps et en été occupe tout l’espace agricole.

Sur cette immense étendue d’herbe, l’élevage laitier est pratiqué toute l’année à l’extérieur. En été, la production laitière suffit juste à la consommation locale, renforcée par l’afflux touristique ; en hiver, il reste d’importants excédents, expédiés vers Londres par trains et camions ; le bassin laitier de Londres s’étend en hiver jusqu’à Exeter ; le Cornwall, trop éloigné, s’adonne à la production de crème. On engraisse les veaux mâles sur les herbages réputés du Devon. Aussi l’élevage bovin procure-t-il 50 p. 100 des revenus agricoles, et l’élevage des ovins (pratiqué surtout sur les hauteurs), des porcs et de la volaille, 33 p. 100. La production végétale occupe donc une place réduite. Le marché londonien des fruits et des légumes, éloigné, ne s’ouvre guère à la production du Sud-Ouest, pourtant favorisée par une maturation précoce et la possibilité d’utiliser les algues comme engrais. Les cultures maraîchères banales l’emportent (choux, choux-fleurs d’hiver, pommes de terre primeurs). Les cultures fruitières ne sont importantes que dans la vallée de la Tamar. L’extrême Ouest toutefois (Land’s End, îles Scilly), excentrique, a dû s’orienter vers les cultures florales, dont les produits (anémones, jonquilles de plein champ) peuvent être expédiés par avion.

La pêche, jadis florissante, a presque disparu. La base navale de Plymouth décline. La rareté du charbon a été fatale au développement industriel. Il ne subsiste plus en Cornwall — région qui fut pendant deux millénaires la première productrice d’étain du monde — que deux ou trois petites mines en fonctionnement. Les carrières de kaolin, autour de Saint Austell, demeurent les plus importantes d’Europe (2 Mt par an), mais la terre blanche est expédiée ailleurs. Les industries alimentaires se dispersent dans de petites villes assoupies. L’industrie moderne tend à se rassembler à Bristol et dans ses environs : l’industrie lainière à Stroud, Bradford-on-Avon, Frome, Wellington ; celle du cuir à Street ; la ganterie à Yeovil ; la transformation des produits importés à Bristol, l’unique port important (sucre, papiers et bristols, tabac, pour lequel Bristol a le premier rang en Grande-Bretagne). Les replis stratégiques, à la veille de la Seconde Guerre mondiale, valent à Bristol une industrie aéronautique (on y travaille au « Concorde ») et à Yeovil le titre de « capitale de l’hélicoptère ». Mais les plus grosses unités industrielles sont sur la côte proche de Bristol : trois centrales atomiques, raffinage du plomb et du zinc, noir de carbone, engrais fabriqués à Severnside par I. C. I., réservoirs pour produits pétroliers arrivés par cabotage (la région n’a pas de raffinerie). Bristol a 425 000 habitants, et Bath, qui fait partie de sa banlieue, 80 000. Dans la plus grande partie de la région, la densité s’abaisse au-dessous de 60 habitants au kilomètre carré.


L’Est-Anglie et le Lincolnshire

C’est la région la moins peuplée du pays : 2 500 000 habitants seulement entre Grimsby et l’agglomération londonienne, soit une densité moyenne de 120, faible pour l’Angleterre ; dans les Fens, elle tombe à moins de 50. Cette région est encore moins industrialisée que la péninsule du Sud-Ouest, et totalement dépourvue de houille. Mais sa richesse agricole en fait depuis longtemps le « grenier de l’Angleterre ».

Le relief modéré est l’un des facteurs favorables à l’agriculture. Deux escarpements au regard vers l’ouest, de plus en plus rapprochés vers le nord, en dessinent les traits essentiels ; l’escarpement jurassique s’amincit et s’abaisse vers le nord, jusqu’à ne plus former qu’une mince crête rectiligne haute de 40 à 70 m, mais bien marquée ; l’escarpement de la craie, très net au sud, où il prolonge les Chiltern, et au nord (Lincoln Wolds), où il atteint 167 m, s’abaisse dans l’intervalle et disparaît dans la traversée du Wash ; dans cette partie centrale, il a été probablement défoncé et raclé par le glacier scandinave quaternaire. La moraine de ce glacier recouvre d’un épais manteau la couche de craie doucement inclinée vers la mer du Nord ; près de Cromer, elle a été modelée en une rangée de lourdes collines. Sableuse et meuble à l’ouest et au nord, la moraine de fond devient de plus en plus lourde à mesure qu’on approche de Londres. Son épaisseur, mince à l’ouest, où ses débris grossiers recouvrent à peine la craie du Breckland, donnant des sols très pauvres, augmente progressivement vers l’est, où ses éléments fins, triés par les eaux de fonte, sont particulièrement fertiles entre Cromer et Norwich. Entre les deux escarpements, les argiles jurassiques, creusées par l’érosion, forment une plaine basse, à l’écoulement difficile ; ce sont les Fens, recouverts de vase marine au bord du Wash, de tourbe plus à l’intérieur. Le drainage des Fens, entrepris en grand au xviie s., a eu pour conséquence le tassement de la tourbe et sa combustion par l’oxygène de l’air ; aussi, quelques districts tourbeux sont-ils sous le niveau des hautes mers ; rivières et canaux de drainage s’écoulent entre des levées artificielles, à plusieurs mètres au-dessus de la plaine ; le drainage ne peut se faire qu’à l’aide de pompes, et la côte doit être attentivement protégée par des digues, travail et surveillance onéreux, mais rentables. Les Fens, tant vaseux que tourbeux, sont d’une exceptionnelle fertilité ; malheureusement, la tourbe se consume à un rythme inquiétant ; là où elle a disparu, elle ne découvre qu’un médiocre sous-sol d’argile et de cailloux.

À la haute qualité des sols, sauf au sommet des escarpements et dans le Breckland, où les plantations de conifères ont remplacé la lande primitive, s’ajoute l’avantage d’un climat assez chaud en été et sec (moins de 600 mm de précipitations par an, parfois moins de 550 mm), qui se prête bien à la culture des céréales.