Grande Encyclopédie Larousse 1971-1976Éd. 1971-1976
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Japon (suite)

• 1943. C’est l’année de la reconquête alliée : le 8 février, les Japonais évacuent Guadalcanal ; la Nouvelle-Guinée est reprise, les îles Salomon seront nettoyées au cours de l’été. En Birmanie, Chinois, Anglais et Indiens attaquent les troupes d’occupation japonaises et tentent de rouvrir la « route de Birmanie ». Les Aléoutiennes, plusieurs fois attaquées, sont évacuées par les Japonais.

• 1944. Les Américains, insensiblement, se rapprochent du Japon, tandis que, dans les pays occupés, les groupes de résistance gênent considérablement les troupes japonaises. Kwajalein, puis Eniwetok, le 17 février, sont reprises. Le 15 juin, les Américains débarquent dans l’île de Saipan, qui tombera le 7 juillet. Au Japon, c’est la consternation : Tōjō démissionne, il est remplacé par un autre nationaliste, koiso Kuniaki, qui prêche la guerre à outrance, malgré les avis des modérés. En Europe, l’Allemagne subit revers sur revers. Les Américains, poursuivant leur avance, reconquièrent pas à pas les Philippines (bataille de Leyte), cependant que les aviateurs japonais inaugurent les bombardements par kamikazes, ou avions-suicide.

• 1945. Malgré les prodiges militaires qu’ils réussissent, les Japonais se voient chassés de toutes leurs possessions. À Okinawa, une des îles japonaises, les marines débarquent le 1er avril. L’armée japonaise s’y défend avec acharnement. Mais l’aviation n’a plus d’essence, la marine plus de mazout. Le territoire japonais est sans cesse bombardé. L’inquiétude est à son comble au sein du gouvernement, qui commence à se diviser en partisans de la paix et partisans de la lutte « jusqu’au dernier Japonais ». Koiso a démissionné en avril. Déjà, en février, l’empereur fait des ouvertures de négociations aux Soviétiques. Mais ces derniers, ayant vaincu les Allemands, songent à attaquer à leur tour le Japon afin de prendre part au partage de ses dépouilles. Staline consulte Roosevelt, qui s’en tient aux accords de Yalta. L’amiral Suzuki Kantarō (1867-1948), un modéré, succède à Koiso. Il tente de renouer les pourparlers avec l’U. R. S. S., sur les instances de l’empereur. La « proclamation des accords de Potsdam », signés en juillet entre Staline, Truman et Churchill, est une perche tendue aux Japonais partisans de la négociation, bien que les Américains se sachent dès lors en possession de l’arme atomique. Les Japonais n’en tiennent pas compte. Et, le 6 août 1945 à 8 heures du matin, c’est l’explosion atomique d’Hiroshima. Trois jours après, une autre bombe « A » tombe sur Nagasaki. Le 8 août, l’U. R. S. S. déclare officiellement la guerre au Japon. Après bien des tergiversations, l’empereur ordonne d’accepter de capituler sans condition. Dans un discours radiodiffusé à la nation (15 août 1945), en un japonais archaïque, il demande au peuple de « tolérer l’intolérable et d’accepter l’inacceptable ». Le prince Higashikuni remplace Suzuki à la tête du gouvernement. C’est le 2 septembre, en rade de Tōkyō, sur le cuirassé américain Missouri, qu’a lieu la signature de l’acte de la reddition inconditionnelle du Japon.


L’« apure », ou après-guerre (1945-1970)

Le général MacArthur va s’appuyer sur les institutions japonaises et sur l’empereur, qu’il a appris à estimer, pour établir au Japon son bakufu. Le pays est dans un état lamentable. Les industries sont détruites, le ravitaillement est nul ; les problèmes posés par la démobilisation de plus de 2 millions de militaires au Japon et de 3 millions de soldats à l’étranger, difficiles à résoudre. Le Japon a perdu tous les territoires occupés et ses colonies du Pacifique, de Corée et de Taiwan ; obligé de se retirer de Chine, il est désormais réduit aux îles formant son propre territoire. Encore, certaines de ces îles (Ryū-kyū) sont-elles soumises à l’administration américaine. Des tribunaux de guerre jugent et châtient les responsables de la guerre et des atrocités commises. Il y a 700 condamnations à mort (dont celle de Tōjō) et 2 500 à de longues peines de prison. MacArthur se met en devoir d’élaborer une nouvelle Constitution, rétablissant les libertés du citoyen, donnant le droit de vote aux femmes, libérant les prisonniers politiques, démantelant le ministère de l’Intérieur. Konoe se suicide le 15 décembre. Le texte de la nouvelle Constitution, présenté comme une révision de celle de 1889, est promulgué en novembre 1946 et mis en application dès le 3 mai 1947. L’empereur déclare n’être pas d’essence divine, et la démocratie japonaise y est définie dans ses grandes lignes. Le Code civil est réajusté, et la Diète réorganisée ; l’agriculture est relancée grâce à de nombreuses réformes, l’industrie encouragée, et le système d’éducation entièrement refondu. À partir de 1948, les Américains changent progressivement d’attitude envers le Japon, jusqu’alors considéré comme un vaincu, et adoptent une sorte de collaboration économique avec lui. Des missions économiques américaines arrivent nombreuses au Japon afin d’aider au redressement du pays. L’agitation communiste devenant gênante, MacArthur et le gouvernement japonais prennent des mesures qui aboutissent à des répressions sociales parfois extrêmement violentes. Le gouvernement, tout d’abord constitué par une majorité de libéraux, s’oriente rapidement vers la droite. Les grèves et les émeutes sont jugulées par les Américains. Le président du Conseil, Yoshida Shiregu, bien que collaborant avec l’occupant américain, affirme la renaissance de l’esprit nationaliste. Il est l’artisan principal de la renaissance du Japon après la guerre. Le 8 septembre 1950, la paix est enfin signée à San Francisco, et le Japon redevient une nation libre. Les clauses du traité sont dures, mais permettent au Japon de se réintégrer dans le concert des nations. MacArthur, ayant été trop catégorique lors de l’affaire de Corée et s’étant montré trop belliciste, est remplacé, le 11 avril 1951, par le général Ridgway. Le Japon devient un « allié » des États-Unis.