Grande Encyclopédie Larousse 1971-1976Éd. 1971-1976
I

Italie (suite)

De leur côté, les socialistes nenniens, au congrès de Turin (avr. 1955), préconisent l’« ouverture à gauche », mais plus encore le « dialogue avec les catholiques ». L’élection à la présidence de la République, le 29 avril 1955, de Giovanni Gronchi (successeur de Luigi Einaudi) illustre l’élargissement de la démocratie chrétienne, Gronchi, démocrate-chrétien de gauche, étant partisan convaincu de l’« ouverture à gauche ».

Dans le même temps, au lendemain de la mort de Staline, le communisme italien montre son originalité (« via italiana al socialismo ») ; tandis que Togliatti préconise le « polycentrisme », la Confédération des travailleurs se solidarise avec l’insurrection hongroise de 1956. Il n’empêche que la crise poststalinienne provoque des remous au sein du PCI, qui perd 300 000 adhérents.

Les socialistes, eux, tendent vers l’unité : la rencontre Nenni-Saragat à Pralognan est une étape vers l’union des deux partis socialistes.


Les élections de 1958

Lors des élections législatives générales des 25 et 26 mai 1958, onze formations politiques se partagent les 596 sièges de la Chambre des députés. Deux partis, d’ailleurs, emportent, ensemble, les deux tiers des sièges : le parti démocrate-chrétien (273 sièges au lieu de 264 en 1953) et le parti communiste (140 au lieu de 143). Avec 24 sièges à la Chambre et 9 au Sénat et un million et demi d’électeurs, le MSI constitue une force avec laquelle les partis issus de la Résistance et de la Libération doivent désormais compter.


De 1958 à 1963


L’« ère Fanfani »

Pour remplacer le cabinet Adone Zoli, démissionnaire, le président Gronchi fait appel au leader du parti démocrate-chrétien : Amintore Fanfani (juill. 1958). Celui-ci forme un ministère de centre gauche, mais Saragat, leader des sociaux-démocrates, s’il accepte quatre portefeuilles pour des membres de son parti, refuse d’entrer lui-même au gouvernement. Titulaire des Affaires étrangères, Fanfani fait une série de voyages afin de resserrer les liens qui unissent l’Italie aux membres de l’Alliance atlantique.

En janvier 1959, lors du congrès du PSI, Pietro Nenni fait voter une motion qui dégage son parti de tout accord avec les communistes. Aussitôt, Ezio Vigorelli, ministre du Travail et membre du PSDI, démissionne (22 janv.) en se proclamant solidaire de Nenni. Le cabinet Fanfani ne survit pas à cette crise.

Antonio Segni, ministre de la Défense, est chargé de former un gouvernement : il le constitue avec les seuls démocrates-chrétiens (27 févr.). Conséquence de la crise ministérielle : lors du congrès du parti démocrate-chrétien à Florence (14-17 mars), Aldo Moro est élu secrétaire général à la place d’Amintore Fanfani.

Sur le plan social, le gouvernement Segni doit faire face à une certaine agitation syndicale. Par ailleurs, le gouvernement italien est de plus en plus préoccupé par le développement de l’agitation, dans le Haut-Adige (Tyrol méridional), de la population de souche germanique.

L’année 1960 voit brusquement monter la tension politique. Malgré les déclarations anticommunistes véhémentes du cardinal Ottaviani, le président de la République italienne se rend à Moscou, où il rencontre Khrouchtchev (févr. 1960). À son retour, le parti libéral retire son soutien au gouvernement Segni, qui doit démissionner (24 févr.).

Fernando Tambroni, qui s’efforce d’axer la démocratie chrétienne sur sa droite, devient président du Conseil. Mais, s’il obtient, de justesse, la confiance à la Chambre, le 8 avril, c’est grâce au MSI ; aussitôt, trois ministres démissionnent. Tambroni décide cependant de poursuivre sa tâche ; le 5 mai, il obtient la confiance au Sénat. Les néo-fascistes veulent développer leur avantage ; en décidant de tenir leur congrès annuel à Gênes, citadelle de la résistance italienne (juill. 1960), ils semblent défier la gauche ; des manifestations de rues et des grèves importantes révèlent l’indignation de celle-ci. Le cabinet Tambroni doit démissionner le 19 juillet.

Amintore Fanfani redevient président du Conseil. Le 5 août, son nouveau cabinet, homogène, obtient à la Chambre une très forte majorité. Le programme du gouvernement Fanfani est fondé sur la réforme sociale et administrative.


L’« ouverture à gauche »

Cependant, les démocrates-chrétiens — Fanfani et Moro en tête — se rendent compte de la nécessité d’échapper à la formule du gouvernement homogène pour s’« ouvrir à gauche », le parti de Saragat s’y montrant enclin. La majorité du comité central du parti socialiste, réuni du 9 au 12 janvier 1962, suit Pietro Nenni, favorable à un rapprochement avec les démocrates-chrétiens. Au congrès de la démocratie chrétienne (27-31 janv.), la thèse d’Aldo Moro, en faveur d’une alliance parlementaire avec les socialistes, triomphe.

Démissionnaire le 2 février, Fanfani se succède à lui-même dès le 21 : son gouvernement, formé de 19 ministres démocrates-chrétiens, de 3 sociaux-démocrates et de 2 républicains, obtient la confiance du Parlement (10 mars), mais les socialistes nenniens s’abstiennent. Du 2 au 8 mai, députés et sénateurs sont réunis pour l’élection du successeur de Gronchi à la présidence de la République ; Antonio Segni n’est élu qu’après neuf tours de scrutin par 443 voix contre 334 à Giuseppe Saragat.

Très souvent appuyé par les socialistes, Fanfani peut appliquer sa politique d’expansion économique et de promotion sociale dans le cadre du « plan Vanonni ». Le 20 juin 1962 paraît le projet de loi portant nationalisation de 120 sociétés par actions représentant la production, le transport et la distribution de l’électricité ; un vote massif de la Chambre, le 21 septembre, rend effective cette nationalisation (formation de la Ente Nazionale Elettricita). En janvier 1963, une cinquième région autonome est créée : le Frioul-Vénétie Julienne.

Le congrès du parti social-démocrate (22-25 nov. 1962) montre la volonté de la majorité des amis de Saragat de se rapprocher d’une manière plus effective de la démocratie chrétienne ; il est vrai que l’aile gauche du parti réclame avant tout l’unité socialiste.