Grande Encyclopédie Larousse 1971-1976Éd. 1971-1976
A

Andrea del Castagno (suite)

Ce cycle de fresques est l’œuvre la plus célèbre d’Andrea. La Crucifixion, la Déposition et la Résurrection forment le registre supérieur, et la Cène le registre inférieur. La monumentalité des personnages rappelle le style de Piero* della Francesca ; la composition est remarquable par la rigueur géométrique, analogue à celle des décorations de marqueterie qui étaient de mode à la même époque. L’effet obtenu est l’animation d’un espace clos, qui se modifie selon le point de vue d’où le spectateur le regarde. Mais dans le détail des attitudes apparaît un goût du mouvement que l’on retrouve dans l’Assomption de San Miniato (à Berlin) et surtout dans le David (Washington, peint sur cuir), qui datent de 1449-50. Dans ces deux œuvres, le traitement des vêtements, des ciels reflète une certaine préciosité issue du style gothique international, tandis que le mouvement de tête de la Vierge, la démarche de David, sa chevelure annonçant les personnages de Botticelli se teintent d’un maniérisme éloigné de la rudesse.

Entre 1451 et 1453, Andrea del Castagno travailla à un autre cycle de fresques, à l’église San Egidio, où il s’agissait de continuer l’œuvre de Domenico Veneziano. Il représenta l’Annonciation, la Présentation au Temple et la Mort de la Vierge. À Legnaia, à la sortie ouest de Florence, la loggia de la villa Carducci fut décorée de fresques représentant les Hommes et les femmes illustres. Cet ensemble (des environs de 1450) a été transporté à l’ancien monastère de Sant’Apollonia. Le choix des personnages (Boccace voisine avec Esther et avec des hommes d’État florentins) illustre les buts auxquels un citoyen doit consacrer sa vie selon les traités d’éducation humanistes : le gouvernement de l’État, les armes, les études et la pureté des mœurs. Dans cette série de portraits, Andrea del Castagno fait preuve de qualités sculpturales et tire parti des ressources de la perspective en construisant des trompe-l’œil : le bras ou le pied des personnages sortent du cadre, établissant un lien entre le spectateur et le tableau. À la Santissima Annunziata, en 1454-55, Andrea exécute un Saint Julien, la Trinité apparaissant à trois saints et une Crucifixion (transportée à Sant’Apollonia). En 1456, à la cathédrale de Florence, il peint en trompe l’œil la statue équestre de Niccolò da Tolentino. En comparant cette fresque à celle qui lui fait pendant, la statue de John Hawkwood par Uccello, on peut apprécier chez Andrea del Castagno un sens du mouvement presque baroque.

Après avoir admiré l’aspect âpre de sa manière, la critique d’art y a découvert une certaine grâce, due à la lumière claire, aux effets de clair-obscur, à la variété des attitudes, et surtout cette recherche d’un espace nouveau, caractéristique de la première Renaissance florentine.

E. P.

 M. Salmi, Corso di storia dell’arte, t. II : Paolo Uccello, Andrea del Castagno, Domenico Veneziano (Florence, 1946) ; Andrea del Castagno (Novare, 1961). / A. M. Fortuna, Andrea del Castagno (Florence, 1957).
CATALOGUE : L. Berti, Mostra di quattro maestri del Primo Rinascimento (Florence, 1954).

Andrea Pisano ou da Pontedera

Sculpteur et architecte italien (Pontedera ?, près de Pise, v. 1290-1295 - Orvieto v. 1348).


Il fut certainement l’un des artistes les plus appréciés de ses contemporains. Dans la décennie qui précéda sa mort, on l’investit successivement des charges de maître d’œuvre des cathédrales de Florence (1340), Pise et Orvieto (1347). Il fut aussi ingénieur militaire, s’il est bien exact que Gautier de Brienne, tyran de Florence, l’ait chargé de divers travaux de fortification. Pourtant, son rôle exact reste difficile à cerner, puisque la porte de bronze placée au portail sud du baptistère de Florence est la seule œuvre incontestablement de sa main qui nous soit parvenue. Dans cet ensemble de vingt-huit panneaux, qu’il exécuta de 1330 à 1336 et qui constitue l’un des sommets de la sculpture italienne, vingt panneaux narrent l’histoire de saint Jean-Baptiste, les autres étant consacrés aux allégories des Vertus. La technique employée (chaque élément a été fondu séparément avant d’être inséré dans un cadre préparé à l’avance) relève plus de l’orfèvrerie que de la sculpture, et sans doute Andrea reçut-il cette double formation à Pise, où son père, en tant que notaire, avait instrumenté à diverses reprises pour l’Opera del Duomo. Ces débuts pisans n’expliquent cependant qu’en partie la connaissance de l’art gothique français, dont témoignent de nombreux détails (la forme quadrilobée des médaillons en particulier). C’est sans doute de Lorenzo Maitani (v. 1275-1330) et des sculpteurs d’Orvieto qu’Andrea tient son goût pour les formes souplement drapées et les visages fins et mélancoliques. Néanmoins, c’est principalement l’art de Giotto*, son intime ami selon Vasari, qui a marqué Andrea. Déjà perceptible dans les scènes de la vie du Précurseur, cette influence éclate, au point de vue iconographique et stylistique, dans les figures des Vertus. Or, après la mort de Giotto (1337), Andrea Pisano, qui avait sans doute déjà travaillé au campanile de la cathédrale de Florence, fut chargé d’en continuer la construction. Il est difficile de savoir ce qui revient à l’artiste lui-même dans la décoration alors mise en place. Si les huit grandes statues des niches semblent avoir été exécutées sous sa direction par des collaborateurs, on s’accorde à attribuer à la main même d’Andrea quinze des médaillons hexagonaux (scènes de la Genèse et allégorie des Arts et des Techniques) qui ornent la base du campanile. Selon les théories les plus récentes, certains auraient été exécutés du vivant même de Giotto et sous sa direction, ce qui expliquerait la singulière conformité de ces sculptures à l’idéal esthétique du plus grand peintre médiéval italien.

En partant de ces deux ensembles, est-il possible de regrouper sous le nom d’Andrea Pisano une partie des très nombreuses sculptures italiennes du xive s. qui appartiennent au même courant artistique ? La présence, aux côtés d’Andrea, de son fils Nino Pisano rend encore plus délicate la solution de ce problème difficile. Né vers 1315, mort en 1368, Nino succéda à son père comme capomastro de la cathédrale d’Orvieto, mais conserva cette charge peu de temps (1348 ?-1353 ?). En 1357-58, on le retrouve comme orfèvre à Pise ; deux Vierges à l’Enfant — l’une à Santa Maria Novella de Florence, l’autre sur le tombeau de Marco Cornaro à Santi Giovanni e Paolo de Venise — portent sa signature. La tradition lui assigne en outre le groupe de l’Annonciation à Santa Caterina de Pise et la célèbre Madonna del latte, jadis à Santa Maria della Spina (musée de Pise), ce qui permet de lui attribuer aussi la Vierge de l’Annonciation en bois du musée du Louvre.