Grande Encyclopédie Larousse 1971-1976Éd. 1971-1976
I

Isabelle II (suite)

Deux années de progressisme, l’Union libérale

La fin de la « décennie modérée » est marquée par le succès de la révolution populaire de 1854 et la constitution d’un gouvernement de coalition que préside le général Espartero et auquel participe le général Leopoldo O’Donnell (1809-1867), tous deux libéraux.

Grâce à l’appui d’Isabelle II, c’est en réalité O’Donnell qui prend en main les affaires de l’État, avant d’assumer véritablement le pouvoir à partir du 14 juillet 1856. Il dissout les Cortes et rétablit la Constitution de 1845, en y apportant quelques modifications libérales ; mais, trois mois plus tard, la souveraine le remplace par Narváez. Celui-ci se maintient un an au pouvoir et abolit les dispositions libérales adoptées par ses prédécesseurs.

La période qui s’étend de 1856 à 1863 est dominée en fait par le parti de l’Union libérale, qui se situe à mi-chemin entre les anciens progressistes et les modérés. C’est une époque à la fois assez prospère et relativement calme, pendant laquelle l’armée espagnole s’illustre en Afrique (1859-60) et au Mexique*, où elle participe, aux côtés de la France et de l’Angleterre, à une démonstration militaire (1861-62).

En 1863, Isabelle II s’appuie de nouveau sur la droite. O’Donnell reprend le pouvoir le 21 juin 1865. Après l’insurrection de Prim à Villarejo et celle des sergents à la caserne de San Gil (Madrid), il est supplanté en 1866 par Narváez et en 1868 par González Bravo et par José Gutiérrez de la Concha (1809-1895).

La mort de Narváez (mai 1868), dont l’énergie et l’autorité étaient les seuls garants du trône, laisse libre cours aux tentatives révolutionnaires ; le 18 septembre, l’escadre, commandée par l’amiral Topete (1821-1885), se soulève dans la baie de Cadix aux cris de « À bas les Bourbons ! ». Serrano et Prim prennent la tête du soulèvement ; le premier l’emporte sur les troupes restées fidèles à la couronne à Alcolea (Cordoue). Isabelle II, qui passe alors l’été à Saint-Sébastien, doit franchir la frontière française le 30 septembre. Une fois exilée en France, elle se sépare de son mari. En 1870, elle renonce à ses droits en faveur de son fils Alphonse, futur Alphonse XII (1874).

R. G.-P.

➙ Carlisme / Empire colonial espagnol / Espagne.

 Marquis de Lema, De la revolución a la restauración (Madrid, 1927 ; 2 vol.). / E. Aunós y Pérez, Itinerario histórico de la España contempóranea (Barcelone, 1940). / P. de Luz, Isabel II (Barcelone, 1940). / Comte de Romanones, Un drama político. Isabel II y Olózaga (Madrid, 1941). / José Manuel Prados López, Narváez, el espadón de Loja (Madrid, 1952). / R. Olivar, Así cayó Isabel II (Barcelone, 1955). / Marquis de Miraflores, Memorias del reinado de Isabel II (Madrid, 1964 ; 3 vol.).

Isauriens (dynastie des)

Empereurs de Constantinople (717-802).


Le second règne de Justinien II (705-711), dernier représentant des Héraclides*, amorce une période de chaos qui dure deux décennies. Son successeur, le général arménien Philippikos Bardanēs (711-713), rouvre la querelle religieuse : il soutient le monothélisme (une seule volonté dans le Christ), désavoue les décisions du concile de Constantinople (680-81), détruit dans le palais impérial les représentations artistiques de cette assemblée et leur substitue ses propres effigies. Ce coup d’audace entraîne la rupture avec Rome, qui refuse de recevoir jusqu’au portrait de cet empereur « hérétique ».

Renversé par une sédition en juin 713, celui-ci est remplacé par un fonctionnaire civil, Anastase II : le nouveau prince prend le contre-pied de la politique religieuse de son devancier et se préoccupe de la lutte contre les Arabes, mais les forces militaires qu’il rassemble à Rhodes pour assaillir la Syrie se révoltent (715) et proclament empereur un percepteur d’impôts, Théodose III. Candidat malgré lui, ce souverain se révèle incapable de restaurer l’ordre dans l’État. Le sauveur de l’Empire aux abois est un général énergique et habile, originaire de la Syrie du Nord (Germanicēa), Léon III, improprement appelé l’Isaurien (25 mars 717).


Le redressement

L’anarchie généralisée a favorisé la progression des Arabes, et la première tâche de Léon III (717-741) est d’assurer l’existence de sa capitale : durant une année (août 717-août 718), les généraux du calife Maslama investissent Constantinople par terre et par mer. Le feu grégeois des Byzantins, un hiver exceptionnellement rigoureux, la famine, une peste meurtrière et enfin l’intervention décisive des Bulgares déciment leurs troupes ; une tempête achève de détruire leur flotte. Le second grand assaut de l’islām contre le verrou de l’Europe a échoué, et le règne de Léon III commence sous les meilleurs auspices. Malgré ce grand succès, les Arabes restaient redoutables. À partir de 726, ils reprennent leurs raids annuels en Asie Mineure et s’avancent jusqu’en Bithynie, mais, en 740, les Byzantins leur infligent à Akroïnon, en Phrygie, une sanglante défaite, qui débarrasse pour longtemps l’Empire de leurs incursions dévastatrices.

Préoccupé de renforcer l’autorité du gouvernement central, l’empereur réorganise le régime des « thèmes » : ces énormes circonscriptions militaires, créées au siècle précédent, sont fractionnées en unités plus petites. Cette réduction répond à deux objectifs : prévenir des tentatives d’usurpation de la part de « stratèges » trop puissants et assouplir l’appareil administratif. Le droit romain, codifié au vie s. dans le monument Corpus juris civilis, est simplifié et révisé : le nouveau code appelé Ecloga, c’est-à-dire Extrait de la législation justinienne, promulgué en grec en 726, de volume réduit et donc très pratique, améliore le droit familial, matrimonial et successoral, mais renforce le droit criminel en y introduisant des châtiments corporels, notamment les mutilations.


La querelle des images

L’hostilité de Léon III au culte des images (reproduction de portraits de saints) déclenche une longue crise, connue sous le nom d’iconoclasme, qui trouble profondément l’Empire au-dedans et entraîne au-dehors la rupture avec Rome et la perte de l’Italie. Conseillé par un fort parti d’adversaires des images, au nombre desquels plusieurs évêques d’Asie Mineure et les troupes des « thèmes » asiatiques, l’empereur commence par dénoncer en 725-26 l’incongruité de ce culte. Sa première mesure effective, et peut-être la seule, est l’enlèvement à Constantinople d’une icône du Christ très vénérée ; ce geste sème le trouble dans la capitale et provoque une insurrection en Grèce et surtout en Italie, où des officiers impériaux sont massacrés.