Grande Encyclopédie Larousse 1971-1976Éd. 1971-1976
I

Iran (suite)

Le moyen perse : la littérature pahlavie

Historiquement le moyen perse englobe le règne des Parthes (246 av. J.-C. - 224 apr. J.-C.) et celui des Sassanides (224-651). La langue moyen perse est généralement représentée par le terme de pahlavi. Celui-ci désigne, en fait, d’une part le dialecte nord-oriental que pratiquaient les Parthes : plus précisément le pahlavik, et, de l’autre, le dialecte utilisé par les souverains sassanides originaires du Sud-Ouest (le Fārs) : le pârsik. De l’époque parthe, des inscriptions ont été découvertes en particulier à Suse et à Doura : elles datent des derniers souverains arsacides. Ordinairement, les inscriptions des Sassanides comportent, outre leur version en pârsik, une autre en pahlavik et la troisième en grec : par exemple l’inscription de Naqsh-i-Roustem, qui date de la fondation de la dynastie par Ardachêr, fils de Papak. Précisons que le moyen perse n’est plus transcrit en écriture cunéiforme, mais dans un alphabet propre, d’origine sémitique. Il faudra la conquête arabe de la Perse pour que soit remplacée cette écriture par l’écriture arabe.

C’est proprement à partir de l’époque sassanide que l’on peut parler d’une littérature. Celle-ci est constituée pour une large part de textes religieux. Notons, d’abord, la traduction de l’Avesta en pahlavi, que l’on appelle le zend. Et puis toute une série d’ouvrages mazdéens contenant autant de descriptions du monde, de la vie, de la culture mazdéennes et dont les auteurs ne sont souvent pas mentionnés. À titre d’exemple citons le Livre d’Artâk Virâz, vision onirique du monde naturel et du monde surnaturel par un Juste que sa sagesse a autorisé à se promener dans l’au-delà pour témoigner ensuite aux fidèles de la rétribution divine. Un genre fort utilisé également dans la littérature pahlavie est le Livre de Conseils, ainsi le Livre des conseils de Zarathushtra, les Enseignements de Khosrô fils de Kavâdh. D’un caractère apocalyptique, le Vahuman Yasht et le Mémorial de Jamasp, dans lesquels les auteurs dressent de grandioses fresques du mazdéisme et de l’avenir de l’humanité. Le Dênkart est un traité, réunissant des documents sur la religion : en neuf livres sont rapportés tout un ensemble de doctrines, de préceptes moraux, de traditions littéraires et historiques appartenant au mazdéisme. Plus particulièrement lié à la prêtrise (les Mages), à leurs devoirs, aux cérémonies, et à leurs privilèges, le Dâtestân-i Denik (Décisions religieuses) est une série de réponses à des questions sur la religion.

Très important pour l’étude des matériaux épiques de la Perse et pour la compréhension de l’univers indo-iranien est le Bundaheshn (Création originelle). En se penchant sur des éléments parfois seulement mentionnés dans l’Avesta, l’auteur explique l’état de création avant l’apparition de l’esprit du mal représenté par Ahriman, événement survenu après le troisième millénaire de la création. On assiste au combat entre les forces du bien et les forces du mal, la création du ciel, de la terre, de l’eau, puis à l’apparition de l’homme et de la femme. Viennent ensuite l’établissement d’une monarchie et la description des rois mythiques iraniens et de la famille de Zarathushtra. Un des grands passages de l’ouvrage est l’évocation de la fin du monde et celle du triomphe définitif des forces du bien sur Ahriman.

De caractère profane est le célèbre Livre d’Ardachêr fils de Papak, ouvrage écrit à la fin de l’époque sassanide, où l’auteur décrit avec fantaisie et couleur les faits et gestes du fondateur de la dynastie. C’est aussi dans les dernières années du règne des Sassanides que fut compilé un ouvrage relatant l’histoire des rois iraniens depuis l’origine jusqu’à la mort de Khosrô II (628) et qui a pour titre le Livre des Rois. Cet ouvrage traduit en arabe dès la conquête de la Perse fut ensuite traduit en persan, puis repris par Ferdowsi (Firdūsī) dans son œuvre épique capitale.

Existe-t-il une poésie sassanide ? Les études récentes tendent à prouver que la poésie comme la musique tenaient une place importante dans la culture de l’époque. Un certain nombre de textes ont pu être rétablis en vers (ils prouvent que la poésie sassanide était basée sur le nombre de syllabes) ; ainsi le Mémorial de Zarir, l’Hymne à Zurvân, l’Arbre Asûrik.


La littérature manichéenne

C’est en Asie centrale que furent découverts les documents relatifs à la littérature suscitée par le réformateur iranien Manès (Mani) au iiie s. Voulant instaurer une doctrine universelle qui engloberait toutes les religions existantes, Manès, rejeté par l’Iran sassanide, passa une partie de son existence à parcourir l’Asie centrale et à éveiller les consciences. Les fragments manichéens découverts à Turfan sont écrits en pârsik, en pahlavik et parfois en sogdien. Ce sont des hymnes, des prières et des épisodes ayant trait à la vie, aux légendes se rapportant à Manès et à sa doctrine.

B. H.

 E. E. Herzfeld, Zarathustra (Berlin, 1929 ; 2 vol.). / A. E. Christensen, l’Iran sous les Sassanides (Copenhague, 1936 ; 2e éd., 1944). / H. S. Nyberg, Die Religionen des alten Iran (trad. du suédois, Leipzig, 1938). / J. Duchesne-Guillemin, Zoroastre (Maisonneuve, 1949). / J.-P. de Menasce, Une encyclopédie mazdéenne : le Denkart (P. U. F., 1958). / A. Bausani et A. Pagliaro, Storia della letteratura persiana (Milan, 1960). / M. Mole, Culte, mythe et cosmologie dans l’Iran ancien (P. U. F., 1963). / J. Rypka, History of Iranian Literature (trad. du tchèque, Dordrecht, 1968).


L’art de l’Iran islamique


L’architecture

Les premiers édifices de l’Iran islamique, érigés en briques cuites ou crues, n’ont généralement pas survécu, et les archéologues ont émis diverses hypothèses sur l’architecture iranienne antérieure au xe s. Le seul monument important qui soit conservé, le Tāri Khanè de Dāmrhān (750-786), se compose d’une cour qui est bordée sur trois côtés d’un portique et qui ouvre sur le quatrième dans une salle de prières à sept nefs en longueur, coupées de trois travées dont les arcs ellipsoïdaux reposent, par l’intermédiaire d’abaques, sur des colonnes de brique sans chapiteau. À lui seul, il ne peut permettre aucune définition, bien qu’il semble dérivé des palais sassanides et, plus sûrement, des mosquées « arabes ». Il est vrai qu’au xe s. la mosquée de Nā‘in a été conçue selon les mêmes principes. Pourtant, au milieu de chaque portique, un arc plus élevé que les autres peut préfigurer le futur iwān. On reconnaît dans son décor en stuc un style sāmarrien assez complexe (v. ‘Abbāssides), mais il se pourrait que Sāmarrā comme Nā‘in dérivent d’un prototype commun.