Grande Encyclopédie Larousse 1971-1976Éd. 1971-1976
A

Andalousie (suite)

Depuis un siècle, cette agriculture extensive connaît de profondes mutations. L’olivier a gagné beaucoup de terres, surtout dans la province de Jaén, première province oléicole espagnole, tandis que la région de Séville se spécialisait dans l’olive de table. L’élevage a cédé la place à la culture mécanisée du blé, dont les rendements ont été améliorés par l’emploi des engrais (18 à 20 quintaux à l’hectare). L’assolement biennal s’est substitué à l’ancien système : un an de blé, un an de jachère cultivée (légumineuses). À côté du blé, la culture du maïs s’est développée. L’irrigation, à laquelle les éleveurs s’étaient toujours opposés jusqu’à ce qu’ils aient entrevu la rentabilité de la culture de la betterave, a gagné les terrasses du Guadalquivir : 145 000 ha sont aujourd’hui arrosés et produisent légumes, betterave, luzerne, agrumes et coton. Cette dernière culture s’est en effet considérablement développée après 1950, grâce à la protection douanière dont on l’a entourée, tant sur les terres irriguées que sur les terres sèches.

Cependant, ces transformations n’ont pas sensiblement modifié les conditions d’existence de la masse des journaliers, qui, entassés dans de gros villages dépassant couramment 10 000 habitants, se réunissaient chaque matin sur la place dans l’espoir d’être embauchés à la tâche par les régisseurs des grands domaines. Si leur sort s’est amélioré, c’est grâce à l’émigration vers Madrid et plus encore vers la France, la Belgique et l’Allemagne fédérale.

Beaucoup ont quitté la campagne pour gagner les villes, où le marché de l’emploi n’est pas toujours à la mesure de leurs espoirs. Il en est résulté un rapide accroissement urbain : Jaén (78 000 hab.) est un gros marché rural et un centre administratif ; Cordoue* (236 000 hab.) et Séville* (548 000 hab.) sont devenues d’importants centres industriels. Le « plan de Jaén » a favorisé l’industrialisation de Linares (60 000 hab.) et de La Carolina, qui, au débouché du défilé de Despeñaperros, bénéficient d’importantes mines de plomb et ont été dotées d’usines chimiques et d’ateliers de constructions mécaniques. Le centre minier de Peñarroya, dont la production houillère a fortement diminué, fait vivre 24 000 habitants grâce à ses usines métallurgiques et chimiques, en cours de modernisation.


La façade atlantique

À l’aval de Séville, le Guadalquivir s’oriente vers le sud et pénètre dans une vaste plaine marécageuse, les Marismas, qui, à l’époque romaine, constituaient encore une lagune, progressivement colmatée depuis, à l’abri du cordon de dunes d’Arenas Gordas. Environ 50 000 ha y ont été asséchés et mis en culture dans de gigantesques domaines : la production essentielle est celle du riz, qui dépasse aujourd’hui celle de la province de Valence.

De part et d’autre des Marismas, le paysage des campiñas se prolonge dans le Condado de Niebla au nord et la région gaditane au sud. Toutefois, la vigne y occupe une place importante, surtout aux environs de Jerez de la Frontera, où les vins de qualité (xérès, sherry) et les eaux-de-vie, vendus en grande partie à l’étranger, sont la source de grands profits.

La vie littorale est très active : la position stratégique du golfe de Cadix et du détroit de Gibraltar a favorisé la croissance de trois ports importants. Huelva, au nord, profite d’un riche arrière-pays minier : les célèbres mines de Ríotinto, nationalisées, et celles de Tharsis, après avoir surtout fourni du cuivre, produisent 2 Mt de pyrite de fer, exportées en grande partie vers toute l’Europe occidentale. Sur les mines se sont fixées des industries variées (fonderies, explosifs, chimie lourde, engrais). Mais c’est surtout Huelva (97 000 hab.), déclarée pôle de promotion, qui attire les implantations industrielles nouvelles : métallurgie, pétrochimie, chimie lourde, cellulose et fibres artificielles.

Cadix (136 000 hab.), établie sur un rocher relié à la terre par un tombolo, est le point de départ vers l’Afrique et une escale entre la Méditerranée et l’Atlantique. Un complexe industriel s’est développé autour de sa baie, bordée de vastes salines : constructions navales et aéronautiques, fabrication d’armes, industries alimentaires.

Algésiras, un peu à l’écart derrière les massifs gréseux couverts de chênes-liège du Campo de Gibraltar, mais bien située au fond d’une large baie à l’extrémité orientale du détroit de Gibraltar, est le premier port de passagers espagnol grâce à ses relations quotidiennes avec Tanger et Ceuta. Une part notable de ses 80 000 habitants, comme de ceux de La Línea (60 000 hab.), s’employait à Gibraltar. Le conflit avec la Grande-Bretagne à propos de cette base a conduit le gouvernement espagnol à mettre sur pied un plan de développement industriel pour assurer le réemploi de la main-d’œuvre et des ruraux qui abandonnent la terre : une raffinerie de pétrole, déjà en fonctionnement, et des chantiers navals en sont les premiers éléments.

Modernisée et industrialisée, la pêche complète les activités portuaires d’Algésiras, de Cadix, de Huelva et anime les petits ports d’Ayamonte, d’Isla Cristina et de Barbate de Franco. Enfin, depuis quelques années, cette côte est gagnée par le tourisme, qui fait se multiplier les hôtels et villas le long des magnifiques plages de sable.


Les cordillères Bétiques

Édifiées par de vigoureux plissements en plusieurs étapes à l’ère tertiaire, les cordillères Bétiques, plus qu’une barrière continue, sont un ensemble de massifs aux formes lourdes, juxtaposés suivant une direction dominante S.-O.-N.-E. Un chapelet de bassins et de couloirs (Ronda, Antequera, Grenade, Guadix, Baza) y dessine un sillon séparant deux chaînes parallèles. Celle du Sud, plus continue et plus élevée, porte le point culminant de la péninsule (3 478 m dans la sierra Nevada). Celle du Nord (les cordillères subbétiques) est coupée d’ensellements transversaux parfois si larges (nord-ouest d’Antequera) que la montagne est repoussée à l’horizon de véritables plaines. Aussi, le paysage des campagnes du bassin du Guadalquivir pénètre-t-il jusqu’au cœur des cordillères : céréales et olivier ont gagné toutes les terres qui ne sont pas trop accidentées, l’olivier tendant à se développer aux dépens du blé. La sécheresse plus marquée, à l’abri des montagnes, a obligé très tôt à irriguer. Alimentée par les eaux de fonte des neiges de la sierra Nevada, la vega de Grenade est le plus vaste ensemble irrigué : betterave, tabac, chanvre, lin, maïs, fèves, pommes de terre et peupliers en rangs serrés forment au cœur de l’été une immense tache de verdure de 44 000 ha au milieu des collines brûlées par le soleil. Des barrages récemment construits sur les affluents du Genil ont permis d’arroser dans la même région 10 000 ha de terres de secano (culture sèche), sur lesquelles les rendements sont améliorés et les cultures diversifiées.

Les montagnes offrent leurs pâturages aux ovins et aux caprins ; certaines sont couvertes de beaux manteaux forestiers (sierra de Cazorla), que l’Administration cherche à étendre par une persévérante politique de reboisement.