Grande Encyclopédie Larousse 1971-1976Éd. 1971-1976
I

infraction (suite)

Deux mesures font échec au principe rigide de la légalité : la pratique de la correctionnalisation par le procureur, qui renvoie devant le tribunal correctionnel un fait qualifié de crime par la loi si le prévenu et le tribunal ne soulèvent pas l’incompétence de cette juridiction, et l’admission de circonstances atténuantes par le juge, qui les apprécie discrétionnairement ; celle-ci peut avoir pour effet de faire baisser la peine pour un crime ou un délit jusqu’au minimum de l’amende de police : trois francs.


Élément moral

Pour que lacté qualifié d’infraction soit punissable, il doit encore constituer une faute imputable à son auteur. La faute doit être en principe intentionnelle et manifester un acte de volonté. Toutefois, dans certains cas, on retient la faute involontaire commise par imprudence, négligence ou ignorance. En ces trois hypothèses, la sanction sera seulement moindre : ainsi, le meurtre délibéré est puni de la réclusion perpétuelle, alors que l’homicide par imprudence causé par un automobiliste n’entraîne qu’un emprisonnement de trois mois à deux ans. En revanche, les contraventions, eu égard à la faible sanction, au trouble léger qu’elles entraînent ainsi qu’à la difficulté de la preuve de l’absence d’intention sont punissables en dehors de toute intention délibérée de les commettre ; la bonne foi n’est opérante qu’en cas de démence ou de force majeure externe.

Ces deux dernières circonstances entraînent d’ailleurs également pour les crimes et délits l’acquittement pur et simple. C’est la règle de l’imputabilité, c’est-à-dire de l’exigence d’une volonté lucide. Elle justifie l’absence de poursuites en présence d’une démence totale ou d’une contrainte irrésistible, imprévisible et non fautive.

Il y a présomption d’irresponsabilité absolue à l’égard des infractions commises par des mineurs de moins de 13 ans, la loi pénale ne les soumettant qu’à des mesures de protection, de surveillance et d’assistance. Pour les mineurs de 13 à 18 ans, elle accorde le bénéfice d’un régime spécial qui a pour effet d’adoucir la peine, sauf disposition spécialement motivée du tribunal : c’est l’excuse atténuante de minorité.

Emportent le non-lieu à statuer certaines circonstances dites « faits justificatifs » : 1o l’ordre ou la permission de la loi (le bourreau et le chirurgien ne commettent ni homicide ni délit de blessure volontaire) ; 2o le commandement de l’autorité légitime (le receveur des postes peut retenir une distribution de journaux sur ordre écrit du préfet ou du juge) ; 3o la légitime défense de soi-même et d’autrui au cas d’agression immédiate (la riposte doit toutefois être proportionnée à l’attaque, ce qui interdit le recours à des machines infernales pour la seule défense d’une propriété) ; 4o l’état de nécessité en de rares cas (l’avortement thérapeutique ou la mise à mort de l’animal domestique d’autrui, l’animal étant devenu subitement furieux) ; l’euthanasie — mort donnée à une personne sur sa demande ou avec son consentement — n’est jamais un fait justificatif.


Les principales infractions

Elles débordent en France l’énoncé du seul Code pénal, de nombreuses lois particulières ayant prévu que leur violation constituait un délit. (Indépendamment des mentions données ci-dessous, le lecteur pourra se reporter aux indications des différentes peines dont sont assorties les infractions, aux mots contravention, crime, délit.)


Infractions contre l’État ou ses représentants

• La trahison consiste soit à entretenir, dans un but hostile à la nation, des intelligences avec une puissance étrangère, soit à livrer à celle-ci des renseignements ou objets secrets de défense nationale, soit à apporter une malfaçon à un matériel ou à une fourniture pour nuire à la défense nationale. Elle est punie de mort.

• L’espionnage est le fait, par tout Français ou étranger, de se procurer* ou de transmettre un renseignement, document, objet ou procédé qui doit être tenu comme secret ou de nature à nuire à la défense nationale.

• Le complot est réalisé dès qu’il est résolu de détruire le régime constitutionnel ou d’exciter les citoyens à s’armer contre l’autorité de l’État ou les uns contre les autres (détention criminelle de 5 à 20 ans).

• L’élévation de barricades lors d’un mouvement insurrectionnel peut emporter une peine de détention criminelle (10 à 20 ans) ; par contre, la participation à un attroupement n’est punissable que de 2 mois à 1 an de prison et seulement après la première sommation, qui ne peut être faite que par les autorités civiles revêtues obligatoirement des insignes de leurs fonctions.

• Les fraudes électorales encourent un emprisonnement de 6 mois à 2 ans et l’interdiction temporaire, pour leurs auteurs, d’être électeurs et éligibles.

• Le bris de scellés apposés par ordre d’une autorité de l’État ou de justice, s’il est volontaire, emporte un emprisonnement de 6 mois à 5 ans ; s’il s’agit d’une simple négligence, de 6 jours à 6 mois.

• La rébellion (attaque ou résistance violente) contre les agents de l’autorité et les officiers ministériels est punie 6 jours à 6 mois s’il s’agit de moins de trois coupables, plus lourdement au-delà ; les violences à fonctionnaires ou à magistrats dans l’exercice ou à l’occasion de leurs fonctions, lorsqu’il s’agit soit de coups sans qu’il en résulte des blessures, soit d’un fait de nature à les impressionner, sont punies de 1 mois à 5 ans ; les outrages envers ces mêmes personnages commis par paroles, gestes, menaces ou écrits sont punis de 15 jours à 5 ans.


Infractions contre les personnes

• L’homicide, crime capital, présente plusieurs aspects : le meurtre, fait de donner volontairement la mort à autrui ; l’assassinat, meurtre prémédité ou avec guet-apens ; l’empoisonnement, attentat à la vie par des substances novices ; l’infanticide, meurtre ou assassinat d’un nouveau-né de trois jours au plus.

• Les coups et blessures volontaires sont différemment sanctionnés selon que leur auteur a eu ou non l’intention de donner la mort, a causé ou non une incapacité permanente : réclusion de 5 à 20 ans ou emprisonnement de 2 mois à 5 ans.