Grande Encyclopédie Larousse 1971-1976Éd. 1971-1976
I

Indonésie (suite)

Les cultures de ladang apparaissent dans bien des cas comme une technique de mise en valeur de transition entre la cueillette proprement dite et les cultures fixes traditionnelles (tegalan et sawah). Le plus souvent, les landang servent à cultiver les racines, tubercules, rhizomes (manioc, patate, igname) dont la plantation et la récolte peuvent se poursuivre pendant une grande partie de l’année. Parfois, le cycle d’exploitation du ladang est prolongé par diverses cultures arbustives (bananiers, certains palmiers, des caféiers et des hévéas). Ces cultures sont quelquefois remplacées par des plantes plus délicates, comme le maïs à Timor, à Flores, le riz, notamment certaines variétés peu exigeantes qui se contentent simplement des pluies, comme à Sumatra et à Bornéo ; ces cultures sont complétées par certains produits nécessaires aux industries domestiques, comme le coton, ou bien cultivés afin d’être commercialisés, comme le tabac et la canne à sucre.

La rotation des champs entraîne l’instabilité des hommes et de leurs demeures. Une partie de la population passe quelques semaines de l’année dans des cases de culture, plus ou moins éloignées du village principal.

Avec les tegalan et les sawah s’affirme la sédentarité. Il s’agit de champs permanents, mais alors que le tegalan est une culture sèche pratiquée sur un champ insensible au site ou aux conditions topographiques, en général sur des pentes fortes et en particulier en montagne, la sawah est toujours une rizière en terrain plat limitée par des diguettes entre lesquelles l’eau peut être retenue. Un hectare de sawah remplace en moyenne, avantageusement, une dizaine d’hectares de ladang. En raison de la pression démographique, le ladang a d’ailleurs été interdit à Java dès 1874. Enfin, les récoltes annuelles peuvent être doublées, mais cette augmentation des rendements va de pair avec une intensification des travaux de culture. La sawah réclame des soins plus fréquents : ameublissement du sol transformé en boue liquide par le piétinement des buffles attelés à des petites charrues et à des herses rudimentaires, contrôle attentif de l’épaisseur de la couche de l’eau dans les rizières ; tous ces travaux impliquent une organisation communautaire stricte et très élaborée. Ce n’est que peu de jours avant la moisson que le champ est asséché, les tiges sont alors coupées une par une à l’aide d’une petite lame.


L’habitat

L’habitat est extrêmement varié, tant par sa forme que par ses dimensions, sa structure, son plan et la richesse de ses décorations.

Bien entendu, les conditions du milieu physique expliquent certains caractères à peu près communs à l’ensemble des habitations de l’archipel, et notamment la construction sur pilotis. Ces derniers sont de hauteur très variable : ils peuvent dépasser 5 m à Bornéo ou n’atteindre que quelques décimètres en pays sunda ; ou bien, même, ils peuvent complètement disparaître. Les tailles les plus fréquentes varient de 1 à 2 m.

La maison sur pilotis est, en effet, bien adaptée au milieu puisqu’elle protège les occupants de l’humidité, de la vermine et de toutes les bêtes nuisibles. De plus, elle est économique dans la mesure où elle permet d’abriter sous un même toit non seulement les hommes, mais aussi les récoltes, qui peuvent s’entasser dans les combles, et les animaux domestiques, qu’on rassemble pour la nuit entre les pilotis. L’espace libéré sous la maison sert encore au rangement des outils. Cependant, les pilotis peuvent disparaître dans certaines régions de l’archipel, comme dans la plus grande partie de l’île de Java, dans les îles de Bali, de Lombok.

Les matériaux de construction utilisés sont presque tous à base de végétaux.

• Les formes. En général, la maison est carrée ou rectangulaire, parfois octogonale ou hexagonale (Tobelu, Halmahera), ou encore circulaire (ouest de Timor), mais certaines formes très originales sont en voie de disparition.

• Les toits. Dans chaque province, ils ont une silhouette caractéristique. Le faîte présente souvent une courbure gracieuse en forme de selle ou de carène, comme chez les Torajas de Célèbes, les Bataks du lac Toba et les Minangkabaus de Sumatra. Parfois, les toitures sont multiples, imbriquées, les extrémités sont redressées à la verticale, ce qui les fait ressembler à des cornes (tanduk). Si l’intérieur reste souvent sombre et sale, car noirci par la fumée des foyers, au dehors, les parois sont ornées de décors peints et sculptés ; chez les Bataks, l’emploi de la spirale domine (influence du style Dông Son) avec une autre représentation caractéristique, le singa (tête fortement stylisée appartenant à un être mythique et placée sur la maison pour en chasser, par la magie, les mauvaises influences). Chez les Torajas, les sculptures sont strictement géométriques, mais sont parfois associées à des représentations d’hommes et d’animaux, ce qui accentue le caractère magique de la décoration.

Quant aux maisons des Minangkabaus, elles sont caractérisées aussi par une ligne de faîte en courbe creuse, dont les extrémités sont décorées de têtes de taureau dirigées vers le bas. Là aussi, il s’agit de symboles magiques de protection.

• La dimension et le plan intérieur. Ils dépendent non seulement de la richesse du propriétaire, mais encore de la structure familiale et sociale. Généralement, ces maisons ne sont pas des habitations familiales, elles abritent un groupe généalogiquement plus vaste. À Bornéo, les Dayaks construisent des maisons mesurant parfois plus de 200 m de long... et habitées par quelques centaines d’individus (jusqu’à 600).

Ces grandes habitations ont tendance à disparaître, ainsi que l’organisation sociale qui leur était liée. La désagrégation de la grande famille, qu’elle soit de type patriarcal, matriarcal ou mixte, entraîne celle de la maison. En Indonésie, on peut cependant encore observer toutes les transitions vers la demeure occupée par le ménage unique et vers le village qui n’est plus un ensemble de parents, mais simplement une unité territoriale.

La petite maison occupée par un seul ménage est de plus en plus fréquente, notamment dans les régions à forte densité de population : Bougis, Makasars (Macassars) de Célèbes, populations de Bali, de Lombok et de Java.