Grande Encyclopédie Larousse 1971-1976Éd. 1971-1976
I

Indiens (suite)

Les Indiens d’Amérique du Nord

Aujourd’hui, la carte de la population indienne des États-Unis montre une répartition spatiale extrêmement réduite et bouleversée.

C’est par une invasion « blanche » multiforme que les Indiens ont été peu à peu submergés : invasion des armées, mais aussi des explorateurs, des commerçants, des colons, des missionnaires. Chaque tribu résista en fonction de ce qu’elle était, c’est-à-dire de son passé culturel et de sa situation géographique. Les plus fortes de ces tribus recherchèrent d’égal à égal des alliances avec les Blancs, mais certaines furent par là entraînées, pour en pâtir, dans les guerres que ceux-ci se livrèrent entre eux sur le sol indien. Et, d’une manière générale, la violation des traités conclus par les Blancs avec les Indiens n’est qu’une longue et monotone histoire, celle aussi d’une résistance tragique.


Le Sud-Est

Les tribus du Sud-Est apparaissaient aux explorateurs espagnols comme des tribus florissantes d’agriculteurs établis en de véritables « villes ». Ces agriculteurs aimaient la guerre, qui avait pour eux une allure de jeu. L’autorité de leurs chefs était considérable, au point que ceux des Natchez, par exemple, purent être qualifiés de rois.

Face à l’invasion occidentale, les cinq tribus les plus importantes, appelées les « cinq nations », les Creeks, les Cherokees, les Choctaws, les Chickasaws et les Séminoles, branche des Creeks, firent preuve d’une prodigieuse faculté d’adaptation. Ils tentèrent de résister à leurs envahisseurs dans la voie même que ceux-ci avaient choisie : vers 1820, Sequoiah, un Cherokee, inventa un syllabaire ; en 1827, une constitution écrite fut adoptée. Ces tribus guerrières surent faire preuve de pacifisme pour opérer une reconversion et obtenir, après les différentes alliances soit avec les Anglais, soit avec les Français, une coexistence pacifique avec la nouvelle nation américaine qui se créait. Mais la fertilité des terres suscita trop de convoitises, et ici, comme bien souvent ailleurs, se produisit progressivement une spoliation pure. Deux événements affectèrent particulièrement le Sud-Est : d’une part, la déportation sur le territoire de l’actuel Oklahoma destiné un moment à devenir un État indien (mais cet État indien ne vit jamais le jour) ; d’autre part, le décret de 1887 sur l’allotissement qui ruinait le système traditionnel, basé sur la propriété collective.


Le Nord-Est

Au nord et au nord-est, sur des terres en grande partie de chasse et de pêche, les plus anciennes tribus étaient les Algonquins*. Les Iroquois et ceux qui y étaient linguistiquement affiliés, les Iroquoiens, étaient des envahisseurs par rapport aux Algonquins, venus du Sud s’installer au milieu d’eux.

Certains Algonquins s’allièrent aux Blancs, d’autres les combattirent. Mais, de toute façon, leurs confédérations, d’organisation assez lâche, ne leur permirent qu’une faible résistance. Une des confédérations relativement puissante, la confédération des Powhatans, en Virginie, finit, après des années d’une oppression de plus en plus marquée, par attaquer les Britanniques et fut écrasée. Les Delawares, désireux de vivre en paix, furent, en dépit des traités qu’ils signèrent, plusieurs fois déplacés jusqu’à l’Oklahoma. Seules quelques tribus occidentales, comme les Chippewas et les Menominees, échappèrent au désastre. Elles le durent à un sol ingrat qui ne tenta guère les Blancs. Leur pays fut réduit, mais elles conservèrent au moins des réserves octroyées dans leur pays natal.

Les Iroquoiens, bien que leurs chefs, les sachems, n’aient pas été des chefs de guerre, étaient des tribus guerrières. Des alliances s’ébauchèrent entre elles, mais elles restèrent instables jusqu’à ce que se formât la Ligue des Iroquois. Celle-ci fut réalisée de façon concrète par Hiawatha, de la tribu des Onondagas, qui, au prix de tribulations sans nombre, gagna à sa cause les Onondagas, les Senecas, les Oneidas, les Cayugas et les Mohawks. La constitution de la Ligue sauvegarda l’autonomie interne de chaque tribu, imposa de soumettre tout conflit entre deux membres au Conseil de Ligue, assura l’alliance vis-à-vis des tribus non membres. Le rêve — grandiose — était d’englober dans la Ligue toutes les tribus connues et d’imposer à toutes, fût-ce par la force, la « Grande Paix ». Ce rêve se heurta à l’impérialisme blanc. Mais la force représentée par la Ligue protégea quelque peu ses participants.

Les Britanniques s’allièrent avec la Ligue, les Français avec les Hurons, hostiles à la Ligue. Après l’Indépendance américaine, les Indiens de la Ligue se virent offrir une réserve au Canada par les Britanniques. Une partie accepta, et l’exode au Canada provoqua une scission. Les wampums, ornements de coquillages, aide-mémoire de hauts faits historiques, furent ainsi divisés entre les partants et les restants. L’unité du Conseil de Ligue lut atteinte, et, au xixe s., certains Iroquois furent déportés dans l’Oklahoma. Ceux qui demeurèrent dans l’État de New York gardèrent le mieux des aspects de leur personnalité tribale. Mais, ici et là, le désespoir gagna. Une des terres d’élection du chamanisme vit celui-ci laisser place à un syncrétisme religieux plus ou moins à base de christianisme et à allure parfois prophétique.


Le Moyen-Est et les Plaines

Entre les régions de l’Est et les Rocheuses s’étend la grande plaine centrale. Lorsque les Blancs commencèrent à y pénétrer, ils y trouvèrent ceux que l’on nomme les « Indiens des Plaines », qui seront popularisés par leur costume (crinière en crins de daim ou en plumes emblématoires d’exploits guerriers, peaux de daim brodées de piquants de porc-épic), leur calumet, leur tente (le tipi)... C’étaient, pour une part, des Siouans (Sioux ou tribus linguistiquement affiliées), mais d’autres familles linguistiques étaient représentées, et l’on trouvait encore au nord des tribus algonquines.