Grande Encyclopédie Larousse 1971-1976Éd. 1971-1976
I

Inde (suite)

La musique classique


Système du Nord : Bhārata

Il est fondé sur une gamme à sept sons, ascendante, dont les notes sont désignées habituellement par la première syllabe de leur nom complet : sa, ri, ga, ma, pa, dha, ni. Cette gamme primaire s’appelle sa-grāma. Une gamme complémentaire commence au ma du sa-grāma et s’appelle ma-grāma. Ces deux gammes sont apparentées aux modes de (phrygien) et de sol (hypophrygien).

Chacun des grāma donne naissance à sept gammes secondaires : les mūrchhanā, échelles de sept sons ascendants et descendants. Chaque murchhanā peut se transformer en mode, ou jāti, par le rôle spécifique dévolu à certains degrés, la fréquence ou la moindre utilisation des sons. Ces jāti sont au nombre de dix-huit : sept purs et onze composites.

Les śruti sont les intervalles spécifiques de la musique indienne. Ils proviennent de la division de l’octave en soixante-six intervalles inégaux, dont vingt-deux sont utilisés couramment. Ils se déterminent par rapport à la tonique et ont chacun une qualité expressive définie ; ils précisent la signification d’un mode.


Système du Sud : Melakarta

Dans sa technique et dans sa théorie, la musique du Sud est proche de la tradition śivaïte. Son système, dit « karnatique », n’est pas fondé sur les deux gammes du Nord, mais sur soixante-douze gammes, mères de plusieurs rāga : les melakarta, arrangées méthodiquement selon la progression de leurs altérations.


Système rythmique : Tāla

Complexe savant et raffiné, ce système possède une notation très détaillée, chaque manière de frapper un tambour étant représentée par une syllabe. Il existe aussi des syllabes mnémotechniques, appelées bol, qui peuvent être dites pendant l’exécution. Les tāla modernes sont divisibles en périodes d’un certain nombre d’unités de rythme, qui permettent des effets de polyphonie rythmique complexes.

Comme les modes, ils sont établis pour avoir un effet émotionnel profond et un caractère expressif précis.


Les rāga

Contenant la musique indienne tout entière, les rāga sont des modes individuels correspondant à des climats émotionnels particuliers, développés à partir de jāti précis, aux intervalles fixes par rapport à une tonique (vādi) constamment exprimée, et avec tous les éléments mélodiques, ornementaux et rythmiques destinés à éveiller ces émotions spécifiques.

En Inde, la musique populaire est moins distincte de la musique savante que dans d’autres pays. Les différences sont plutôt dans la perfection technique. La musique occupe une très grande place dans la vie hindoue (fêtes, cérémonies religieuses ou sociales), et l’éducation musicale n’est pas réservée à certaines classes de la société.

Actuellement, la musique indienne est jouée en concerts publics, alors que l’ancienne musique, faite pour la société féodale qui l’avait vue naître, était une musique d’intimité.

Les instruments principaux

Les cordes : tata

La vīnā (rudravīnā du Nord, sarasvatīvīnā du Sud) est un instrument pincé, à touches fixes.

Le sitār, très répandu, a des touches réglables.

Le sarod, sans touches, possède, comme le sitār, des cordes sympathiques.

Le sārangī est un instrument à archet.

Le tambūrā est un instrument essentiel : touché rythmiquement, il exprime sans arrêt la tonique et la quinte du mode utilisé par le chanteur ou l’instrumentiste.

Le violon, introduit de nos jours, est très répandu surtout dans le Sud.

Les vents : śuśira

La famille des flûtes droites ou traversières remonte loin dans l’Antiquité ; la plus répandue est la muralī, flûte traversière à sept trous.

Le śahnāī, hautbois indien, vient du monde islamique.

Le sur tient dans un ensemble de vents le rôle du tambūrā.

Les cymbales : karatala

Elles servent à marquer le rythme et ont parfois un rôle magique.

Les tambours

Les plus nombreux des instruments indiens, ils sont accordés avec précision sur la tonique, parfois la quinte.

Le pakḥāvaj, tambour en terre, cylindrique, à deux peaux, accompagne dans le Nord la musique de style sévère.

Le tablā, d’origine arabe, consiste en une paire de tambours, l’un en métal, l’autre en bois. Il permet tous les raffinements des techniques possibles.

Le mridangam tient dans le Sud la même place que le pakḥāvaj et le tablā dans le Nord.

R. H.-C.

 J. Grosset, « Inde. Histoire de la musique depuis l’origine jusqu’à nos jours », dans Encyclopédie de la musique, sous la dir. de R. Lavignac et L. de La Laurencie, t. I (Delagrave, 1913). / Atya Begum Fysee Rahamin, The Music of India (Londres, 1926). / E. Rosenthal, The Story of Indian Music and its Instruments (Londres, 1928). / N. S. Ramachandran, The Ragas of Karnatic Music (Madras, 1938). / C. Marcel-Dubois, les Instruments de musique de l’Inde ancienne (P. U. F., 1941). / P. Sambamoorty, South Indian Music (Madras, 1941 ; nouv. éd., 1950, 5 vol.). / D. P. Mukerji, Indian Music (Bombay, 1945). / S. Bandopadhyaya, The Origin of Raga (Delhi, 1946). / A. Daniélou, Northern Indian Music (Londres, 1949-1954 ; 2 vol.) ; Inde du Nord (Buchet-Chastel, 1966) ; The Raga of Northern Indian Music (Londres, 1968). / A. A. Bake, « la Musique indienne », dans Histoire de la musique, sous la dir. de Roland-Manuel, t. I (Gallimard, « Encycl. de la Pléiade », 1960). / J. Kuckertz, Der Tala in der südindischer Kunstmusik (Cologne, 1967).


Le cinéma indien

Le 7 juillet 1896, dans un des salons de l’hôtel Watson à Bombay, quelques opérateurs itinérants envoyés par les frères Lumière présentent les premiers un spectacle cinématographique. Seize ans plus tard, le premier film indien de fiction sera tourné par le pionnier Dundirāj Govind Phalke (Rājā Harichandra, 1912), qui avait accompli un stage de formation en France chez Pathé, dans ses studios de Vincennes. C’est Phalke qui sera également à l’origine de la première grande société cinématographique, l’Hindoustan Film Co. En 1919, un décorateur, Baburao, fonde la Marhastra Film à Kolhāpur et réalise lui-même de nombreux films d’une réelle valeur artistique. La même année, Natarāj Mudaliar met en scène à Madras le premier film des États du Sud, la Destruction de Keechaka (Keechaka Vadham). La production s’organise : en 1922, elle est de 63 films ; en 1927, de 108 films, dont la majorité tournée à Bombay.