Grande Encyclopédie Larousse 1971-1976Éd. 1971-1976
I

Inde (suite)

À Bombay, le schéma est analogue, mais c’est ici le coton qui a servi d’industrie d’entraînement. Il joue un rôle important dans l’agglomération de Bombay elle-même et dans des centres qui représentent une première phase d’éclatement de l’industrie cotonnière, comme Ahmadābād, l’une des plus grandes villes industrielles de l’Inde. Plus récemment, des centres industriels étroitement liés à Bombay ont fait leur apparition avec le complexe chimique de la grande banlieue et la profonde transformation des villes anciennes comme Nāsik et Poona.

Le troisième grand comptoir de l’Inde, Madras, n’a pas organisé autour de lui une région industrielle du même type. La ville a maintenant des industries importantes, notamment dans le domaine métallurgique, mais celles-ci sont peu liées au reste de la région. Pourtant, le sud de l’Inde a une concentration assez remarquable de villes industrielles, qui lui confère le troisième rang dans la hiérarchie des zones industrialisées. Mais il s’agit plutôt ici d’une nébuleuse très lâche de centres sans grand rapport les uns avec les autres (au moins à l’origine), où l’industrie est née de facteurs et d’initiatives variés. Les types de concentration sont donc très divers : villes industrielles modernes, comme Bangalore, où une première initiative gouvernementale a servi d’élément moteur pour l’établissement d’un centre métallurgique moderne ; vieilles villes textiles qui associent un artisanat modernisé et spécialisé et des ateliers industriels, comme Coimbatore, Madurai, Tiruchi, Arcot ; quelques centres de traitement de matières premières, avec la sidérurgie de Bhadrāvati (Mysore) et les lignites de Neyveli (Tamilnād).

Telles sont les trois principales concentrations industrielles. En dehors, on trouve encore deux types d’implantation. Ce sont, tout d’abord, ce qu’on peut appeler les nébuleuses modernisées : il s’agit de régions où certains facteurs ont permis la modernisation et la spécialisation de petits ateliers ruraux, mais surtout urbains, qui ont adopté des fabrications modernes dans le cadre de la très petite entreprise. En général, quelques villes à grandes usines structurent plus ou moins cet ensemble. Le cas le plus net est celui de la région Pendjab-Haryana-Delhi. Ici, des castes dotées d’esprit d’entreprise ont su profiter de facteurs favorables pour monter de nombreux ateliers aux fabrications diverses. La proximité des aménagements hydro-électriques, l’existence d’une paysannerie nombreuse et assez prospère fournissant un marché ont facilité le succès de ces initiatives. La fonction de capitale de Delhi a attiré sur la ville des investissements du gouvernement fédéral, et les petits entrepreneurs ont suivi.

Enfin, il existe quelques centres industriels isolés. Ce sont en général des villes où le gouvernement fédéral a décidé des implantations pour des raisons d’équilibre, économique et politique. Ainsi, Bhopāl a été choisie, en raison de sa position, comme capitale d’un des États les moins urbanisés de l’Inde (Madhya Pradesh). Pour étoffer son activité et aussi pour utiliser le potentiel énergétique créé le long de la Chambal, l’État fédéral a implanté une importante usine de matériel électrique lourd. Le cas d’Hyderābād est assez comparable.


Les hommes dans l’espace indien


L’inégale répartition de la population

La population est encore répartie essentiellement en fonction de la productivité de l’agriculture. Il y a un lien entre les régions de fortes densités et celles où l’humidité du climat permet les systèmes agricoles fondés sur la riziculture, à condition que les sols soient bons. La plaine du Gange, les deltas de la côte orientale, le Kerala ont presque partout des densités supérieures à 750 habitants au kilomètre carré, et beaucoup de districts dépassent largement les 1 000 habitants. La seule région humide et rizicole où la population est moins dense est celle du nord-est de la péninsule, peu peuplée à l’échelle indienne. Aucune région ne dépasse les 120 habitants au kilomètre carré, et certaines tombent au-dessous de 80 habitants. Le centre de la péninsule, avec son système fondé sur les millets, a des densités comprises le plus souvent entre 80 et 120 habitants. Enfin, le Nord-Ouest, sec, voit les chiffres tomber au-dessous de 80 habitants.

Cette répartition est donc assez simple. Cependant, à y regarder d’un peu plus près, certaines complications se font jour. Si l’on confronte la densité de la population agricole et la productivité de l’agriculture, mesurée par un indice composite, on constate évidemment que, dans l’ensemble, il y a une bonne corrélation entre les deux chiffres, mais aussi quelques décalages importants. Le delta de la Mahānadi et la basse plaine du Gange (Bihār) sont des régions où la population est particulièrement forte, alors que la productivité de l’agriculture est faible, très en retard sur la moyenne indienne. C’est là une position assez tragique, qui se traduit concrètement par des crises alimentaires fréquentes et des troubles sociaux.

Au contraire, le Pendjab et des petites régions de l’Inde du Sud ont une population assez faible pour une productivité agricole forte. Celle-ci reflète les conditions naturelles favorables, mais aussi elle est due également au fait qu’il s’agit de régions qui ont été peuplées assez récemment, après de grands travaux d’aménagement, par des groupes humains dotés d’un esprit d’entreprise particulièrement vif. C’est le cas notamment pour les sikhs du Pendjab.


Les formes d’implantation de la population

L’Inde est encore essentiellement villageoise. La population rurale, sauf dans de rares cas, comme le Bengale et le Kerala, est groupée en villages assez compacts. Ceux-ci apparaissent comme des îlots de verdure au milieu des champs ouverts piquetés d’arbres, qui constituent le paysage rural dominant des parties non rizicoles de l’Inde. Leur variété est infinie. Cependant, dans presque tous les villages, on trouve une opposition nette entre les maisons en dur, ou « pucca », et les maisons en pisé, ou « kacha ». La proportion des deux types de construction varie en fonction de la région, mais aussi selon la prospérité des villageois, la construction d’une maison pucca étant un signe certain de promotion sociale.