Grande Encyclopédie Larousse 1971-1976Éd. 1971-1976
I

Inde (suite)

La surface irriguée est maximale dans les deltas de la côte est et dans la partie nord-ouest de la plaine du Gange. Elle couvre encore plus de 20 p. 100 de la surface sur les plateaux et dans les plaines de l’Inde du Sud ainsi que dans de larges parties du Bihār et du Bengale. Elle est, au contraire, minimale le long de la côte ouest, où les pluies sont très abondantes et dans les régions sèches du Nord-Ouest (Rājasthān). Cependant, dans ces dernières, la possibilité d’apporter des eaux en provenance de l’Himālaya a été offerte par la construction des barrages de Bhakra et de Nangal, d’où part maintenant le grand canal du Rājasthān.

La région des sols noirs du nord-ouest du Deccan est assez peu irriguée, car le relief rend la construction de canaux assez chère ; d’autre part, les sols ont une forte capacité de rétention d’eau, ce qui réduit le besoin en irrigation. Il faut noter, encore, que, même là où l’irrigation ne couvre que des étendues réduites, son importance économique est grande. Elle rend possible une culture rabi, même peu étendue, et permet le jardinage autour des maisons, dont l’apport alimentaire est précieux.


La répartition des systèmes de culture

Les combinaisons de cultures sont extrêmement variées. Mais, en simplifiant, on peut les grouper pour servir de base à un nombre limité de régions agricoles. Chaque combinaison peut être caractérisée par une céréale dominante, à laquelle sont associées une plante oléagineuse et une plante qui, depuis longtemps, assure des rentrées d’argent. Il convient, cependant, de ne pas donner une place exagérée à la distinction classique entre « cultures commerciales » et « cultures vivrières » : dans l’Inde contemporaine, même les céréales font l’objet de transactions actives sur des marchés locaux ou régionaux ; l’économie de subsistance est en voie de recul rapide.

Le système des millets est organisé autour de nombreuses variétés de ces céréales rustiques, qui occupent de vastes superficies. Le plus cultivé de ces millets est le jowar (le sorgho des Africains), mais on rencontre aussi le bajra et le ragi, plus rustiques que le jowar. Les millets sont souvent accompagnés d’arachides, qui ont à peu près les mêmes besoins qu’eux. Le coton est souvent le troisième élément de base de la combinaison. Celle-ci caractérise les régions à longue saison sèche et à pluies faibles. On la rencontre donc dans la diagonale sèche qui traverse la péninsule, le coton jouant un rôle notable surtout là où les sols noirs sont épais.

De légères variations dans la nature des sols et la pluviosité font varier la combinaison de base. Celle-ci est surtout réalisée sur les sols noirs du plateau des laves. Vers le nord-ouest, dans les régions plus sèches et de sols plus légers du Rājasthān et des plateaux de Kutch et de Kāthiāwār, le coton disparaît, et le bajra tend à remplacer le jowar.

Sur les plateaux du nord de la péninsule, le temps est assez froid en hiver pour que le blé et le gram (une légumineuse très utile, parce que riche en protéines), cultivés en rabi, viennent s’ajouter au jowar et aux arachides cultivés en kharīf.

Vers le sud, sur les sols médiocres du plateau de Mysore, le ragi remplace le jowar, et le coton est remplacé comme culture commerciale par la canne à sucre, développée dans les périmètres irrigués. Vers l’est, plus humide, les cultures de jowar se sont développées sur les terres élevées, en rabi ou en kharīf, tandis que le riz fait son apparition dans les régions irrigables, surtout comme une culture kharīf.

Les régions dominées par le riz sont périphériques par rapport à l’espace indien ; mais elles sont les plus peuplées, et le riz est de loin la première céréale pour les tonnages produits. Les seules régions où la céréale dominante occupe jusqu’à 70 p. 100 et plus de la superficie brute sont dans l’Inde du riz. Le riz domine largement là où les pluies dépassent 1 000 mm, et où la saison sèche dure moins de quatre à cinq mois. Mais les associations sont assez variées.

Dans les régions très pluvieuses, les rizières sous pluie dominent. Dans le Kerala, il y a jusqu’à trois récoltes de riz par an, et la distinction rabi-kharīf perd de son intérêt. Le riz est surtout associé à des plantations de cocotiers dans la plaine, de thé, de café et d’hévéa sur les pentes. Le paysage de la rizière plantée de cocotiers sur les diguettes contraste avec les champs ouverts piquetés d’arbres et mal organisés de l’Inde des millets et du blé. Sur la côte de Konkan, l’association de base est la même, mais la saison sèche est plus longue, et il n’y a plus guère qu’une seule culture de riz, en kharīf évidemment. Au Bengale (Bengale indien et Bangla Desh), ainsi que dans le delta de la Mahānadi, on retrouve une courte saison sèche et un calendrier de riziculture très compliqué, notamment parce que la submersion joue un rôle important dans ces deltas (v. Bengale).

Sur les côtes plus sèches du sud-est de la péninsule, le riz domine encore, mais il est le plus souvent irrigué, même en kharīf. C’est le cas notamment dans les deltas de la Kistnā, de la Godāvari et de la Kāviri (Cauvery), qui ont de vieux réseaux de canaux, tous améliorés récemment par la construction de grands ouvrages qui régularisent le débit des rivières. Le riz est donc la plante de base dans les régions irrigables ou submersibles, où on peut faire deux cultures par an. Les régions plus hautes, non irrigables, sont cultivées surtout en arachides et en jowar. Par contre, dans le Sud-Est, quelques plaines portent des sols noirs, et il est possible d’y faire en kharīf, sous pluie, des cultures de coton. Ici encore, les cocotiers dominent le paysage des rizières.

Le nord-est de la péninsule est encore très rizicole, mais il s’agit d’une riziculture très différente, qui se fait non pas en rizières, mais dans des champs gagnés pour quelques années sur la forêt, dans le cadre de la culture à longue jachère (culture itinérante). Le gram est cultivé en rabi. Mais, dans l’ensemble, la superficie cultivée est peu étendue, les forêts gardant une place importante. Ce sont des populations « tribales » qui dominent.

Le type de culture du Bengale se prolonge vers l’intérieur dans la plaine du Gange, dans l’État de Bihār. Plus à l’ouest, le riz kharīf commence à être associé au blé rabi, transition vers l’Inde du blé.