Grande Encyclopédie Larousse 1971-1976Éd. 1971-1976
I

Inde (suite)

L’absence de deltas le long de la mer d’Oman et leur concentration dans l’Est sont un effet du mouvement de bascule évoqué. En effet, les rivières qui se jettent dans la baie du Bengale sont longues et bien alimentées, et atteignent une mer peu profonde ; il en va tout autrement pour les rivières, très courtes, qui descendent le vigoureux escarpement des Ghāts de l’Ouest et qui n’ont pu construire de delta.

Les plaines ont une certaine variété d’aspect. On voit s’opposer les parties humides, où le danger d’inondation est constant (deltas du Nord-Est, Bihār), et les régions plus sèches, où il existe plutôt une menace venant de la migration vers la surface du sol de sels solubles et toxiques pour les plantes.

D’autre part, il existe une différence entre les piémonts inclinés, comme ceux du Pendjab, et les bandes marécageuses humides, qui correspondent à des zones basses où ressortent les eaux infiltrées dans les cônes de piémont.

De plus, toutes les plaines sont divisées en unités de petites dimensions, notamment avec l’opposition entre les différents niveaux de terrasses. Une dénivellation de quelques mètres peut avoir des conséquences très importantes pour la mise en valeur. Les hautes terrasses sont à l’abri de l’inondation, mais peuvent manquer d’eau à certaines périodes. Leurs sols sont anciens et ont évolué en fonction du climat. Là où celui-ci est humide, il y a eu « lessivage », c’est-à-dire appauvrissement du sol en matières solubles, notamment en bases. Dans la plaine du Gange moyen, ces hautes terrasses sont connues sous le nom de bhangar. Les basses terrasses sont sous une menace constante de l’inondation, d’autant plus grave que les fleuves sont plus puissants et les pluies plus abondantes. Les basses plaines du Bihār, de l’Orissa, du Bengale connaissent avec une régularité catastrophique des inondations graves. Il ne se passe guère d’années sans qu’une partie au moins de ce domaine soit envahie par les eaux. Par contre, les sols sont toujours renouvelés par un alluvionnement constant, et ces basses terrasses, ou « khadar », sont connues pour leur fertilité.


L’Himālaya

Le territoire de la République indienne ne pénètre profondément dans la masse himalayenne qu’au nord-ouest (Cachemire sous contrôle indien et Himāchal Pradesh) et au nord-est (région de l’Assam et de l’Agence de la Frontière du Nord-Est [auj. Arunachal Pradesh]). Au centre, le Népal, le Bhoutan et le Sikkim atteignent le bord septentrional de la plaine du Gange. Au Cachemire et en Himāchal Pradesh, on trouve un alignement d’unités morphologiques puissantes et distinctes (dont la plupart se suivent d’ailleurs plus ou moins tout le long de la chaîne).

Le long des plaines du Pendjab, une série de chaînons parallèles, hauts de 600 à 1 200 m seulement, constitue les « Siwālik ». Beaucoup plus impressionnant est le Pir Panjāl, au nord des Siwālik. C’est une chaîne dont les sommets dépassent 4 000 m et constituée de terrains assez peu métamorphiques, empilés en « nappes de charriage ». Il est bordé au nord par une grande dépression due à la subsidence récente dans l’édifice des nappes de charriage, la « Grande Vallée » du Cachemire. Le fond est situé à 1 500 m seulement, et la vallée est longue de plus de 140 km : c’est une unité morphologique bien marquée.

Ce n’est que sur le flanc nord de la « Vallée » que se dresse le Grand Himālaya. Celui-ci commence à l’ouest par une énorme masse cristalline, qui dépasse 8 000 m au Nanga Parbat. Vers le sud-est, les montagnes qui succèdent au Nanga Parbat ne dépassent guère 6 000 m, avec des cols autour de 3 500 m. Cette chaîne est sculptée dans des masses sédimentaires violemment plissées. Au nord de cette masse impressionnante se trouve la haute vallée de l’Indus, qui suit une suture fondamentale de l’écorce terrestre, limite de l’Himālaya proprement dit. Cette vallée est dominée par le Nanga Parbat ; les versants ont jusqu’à 5 000 m et plus de hauteur relative, offrant ainsi l’une des plus extraordinaires dénivellations qu’on puisse observer.

Le Cachemire comporte une partie d’une montagne non himalayenne à proprement parler, le Karakorum (original par sa structure, une masse cristalline fortement soulevée, et par la puissance de ces reliefs, il comporte le second sommet du monde, le K2, et un ensemble de sommets dépassant 8 000 m, plus impressionnant que celui du Népal). D’énormes glaciers couvrent plus de 30 p. 100 de sa surface. L’Himālaya est plus mal connu au nord-est.

L’Inde ne contrôle directement qu’une part assez faible de la chaîne. Elle cherche d’ailleurs à y étendre son influence, notamment par sa politique vis-à-vis du Népal, du Bhoutan et du Sikkim. De toute façon, la présence de l’immense barrière du Nord pèse sur les perspectives stratégiques de l’Inde, comme sur les traits de sa géographie physique et humaine.


Les climats

L’Inde appartient distinctement au monde des climats tropicaux. Sur une grande partie du territoire, l’opposition essentielle entre périodes et régions est fondée sur des caractères pluviométriques : on oppose surtout périodes humides et périodes sèches, régions humides et régions sèches. La chaleur règne toute l’année. Cependant, dans le Nord, les températures hivernales peuvent être assez basses pour gêner les hommes (mal logés et mal vêtus) et certaines cultures : l’hiver thermique y devient sensible.

La carte est donc fondée surtout sur des caractères pluviométriques ; quatre types de régions sont distingués, selon à la fois la durée et l’abondance des pluies. Ces deux caractères sont en effet significatifs, et il est commode de les combiner : une période humide un peu plus longue peut compenser des pluies un peu moins importantes, et vice versa. Sont considérées comme très humides les régions où la saison des pluies dure plus de quatre mois et apporte plus de 1 500 mm d’eau (beaucoup plus par endroits), comme humides les régions avec trois mois pluvieux et de 1 000 à 1 500 mm de pluies, comme sèches les régions avec deux à trois mois pluvieux, mais de 500 à 1 000 mm de pluies seulement, enfin comme très sèches les régions recevant moins de 500 mm de pluies et dans lesquelles la saison humide n’excède pas un mois. On considère ici comme humide un mois dont les précipitations sont supérieures à la quantité d’eau qui peut s’évaporer en fonction de la température de l’atmosphère (évaporation potentielle). Les durées de saisons humides fixées plus haut sont donc inférieures à celles de la période pendant laquelle il tombe quelques averses.

La répartition des régions plus ou moins humides ou sèches commande largement les autres aspects de la géographie indienne. Mais il faut décrire un peu plus concrètement le cycle des saisons, dont la carte ne traduit que les caractères essentiels. Un récit explicatif de l’année climatique est la meilleure façon d’atteindre ces deux objectifs.