Grande Encyclopédie Larousse 1971-1976Éd. 1971-1976
I

impôt (suite)

L’impôt général sur la dépense : la T.V.A.

En 1954, le gouvernement, pour éviter une trop lourde taxation des biens d’investissement, a diminué, puis supprimé, la taxe à la production sur les biens d’investissement pour la remplacer par la T. V. A.

Principe de la T. V. A.
L’idée était simple : imposer la seule valeur ajoutée à chaque stade du circuit d’un produit. Ce système a été étendu, par la loi du 6 janvier 1966, de l’industrie au commerce et aux industries de services avec, en contrepartie, la suppression de la taxe locale perçue au stade du détail et la suppression de certaines taxes spécifiques (vin, café, sucre).

L’intérêt de cette nouvelle taxe est multiple : sur le plan fiscal, elle est générale et simple ; c’est un « impôt moderne sur la dépense ». Sur le plan social, elle limite les charges des consommateurs petits contribuables en soumettant les produits alimentaires à un taux réduit. Sur le plan économique, elle instaure l’égalité entre les concurrents, elle favorise les investissements en les détaxant. Enfin, en assurant la neutralité de l’impôt, elle avantage les exportations : un produit français exporté ne supporte pas la T. V. A. ; au contraire, quand un produit d’un autre pays est soumis à l’imposition en cascade, même à un taux faible (4 p. 100 par ex.), il doit être procédé pour l’exportation à une restitution par l’État (12 p. 100 par ex.) ; ce qui n’empêche pas ce produit, une fois en France, de supporter une T. V. A. lourde. À l’inverse, le produit français exporté aura été exonéré d’une T. V. A. lourde et ne supportera qu’une fiscalité relativement faible de 4 p. 100.

Ces considérations ont amené les différents pays du Marché commun à envisager l’adoption de ce système. Cette possibilité d’extension a conduit le gouvernement français à abaisser son taux normal, le manque à gagner pour le fisc étant compensé par une extension de l’assiette.

Cette extension pose cependant de gros problèmes aux finances locales, qui se sont vues privées notamment du produit de la taxe locale et qui supportent une lourde imposition pour les travaux d’équipement qu’elles effectuent. C’est notamment le problème des communes dites « dortoirs », où les habitants consomment peu sur place. On a donc cherché à compenser ces pertes en retenant comme recettes de remplacement la taxe sur les salaires, reversée en grande partie aux collectivités locales.

Pour les ventes ou échanges de biens, l’assiette est le montant de la vente ou la valeur des biens reçus en échange. Pour les services, c’est le prix du service ; l’évaluation est donc réelle. Le fait générateur est constitué par la livraison ou par l’encaissement ; ainsi, on détermine le mois au titre duquel les affaires doivent être déclarées et la date à laquelle intervient le droit de déduction. À chaque stade, le vendeur ou le producteur déduit de la taxe exigible sur ses ventes le total des taxes payées sur ses achats, qui, à cet effet, lui sont facturées sur une ligne spéciale par ses fournisseurs. C’est l’originalité du système. La déduction se fait par imputation : les entreprises déduisent de la taxe qu’elles doivent les montants dont la déduction leur est permise.

Taux de la T. V. A.
Les taux de la T. V. A. sont au nombre de quatre. La répartition des produits entre les taux correspond en principe à des justifications économiques et sociales, mais elle relève quelquefois aussi de l’arbitraire ou de l’action des groupes de pression. Les taux de la T. V. A. ont été simplifiés en 1969 et, pour deux d’entre eux, allégés en décembre 1972 : le taux normal, de droit commun, est de 20 p. 100 ; le taux réduit, de 7 p. 100, s’applique aux produits alimentaires de grande consommation, aux produits d’origine agricole, aux livres et aux théâtres ainsi qu’aux services essentiels comme la fourniture de logements ; le taux intermédiaire, de 17,6 p. 100, s’applique aux matières premières, à l’énergie et à des services tels que les transports, les restaurants, les prestations à caractère social, les cinémas ; le taux majoré, de 33,33 p. 100, frappe les produits de luxe, les tabacs et les automobiles.

Régimes particuliers appliqués à la T. V. A.

Exonérations. Elles sont très diverses ; les plus notables sont celles des organismes de l’État qui ne bénéficient pas de l’autonomie financière, des établissements hospitaliers, des journaux et publications, des activités touchant le commerce extérieur et des opérations de banque, Bourse et assurances.

Régime des petites entreprises. Sont considérées comme « petites entreprises » celles qui, dans le commerce, font moins de 500 000 francs de chiffre d’affaires et, dans les services, moins de 125 000 francs. Les petites entreprises bénéficient d’abord de l’évaluation forfaitaire de l’assiette de la T. V. A. ; on utilise le même forfait que pour le bénéfice commercial. Des décotes, décote générale et décote spéciale (pour les artisans), réduisent le montant de T. V. A. acquittée par les petites entreprises.

Régime des exploitants agricoles. Les coopératives et les exploitants, lorsqu’ils se livrent à des activités assimilables à celles des industriels et des commerçants, sont soumis à la T. V. A. La plupart des agriculteurs ont eu le choix, au moment de la généralisation de la T. V. A., entre deux régimes, l’imposition selon des règles très simplifiées et la non-imposition assortie de mesures compensatoires (soit le remboursement forfaitaire de la T. V. A. ayant grevé les achats nécessaires à l’exploitation, soit la ristourne sur les achats de matériel agricole). Cette situation hors T. V. A. est destinée à disparaître.

Le « butoir »

Les entreprises sont en situation de butoir lorsqu’elles n’ont pas la possibilité de déduire, par imputation sur la taxe applicable à leurs ventes, la totalité de la T. V. A. qu’elles ont payée « en amont » sur leurs achats.

Cette impossibilité est particulièrement gênante pour les producteurs soumis au taux réduit ou pour les entreprises non soumises à la T. V. A., comme les entreprises de presse ou les imprimeries. La loi de finances pour 1972 a, pour résoudre ce problème, posé le principe du droit au remboursement direct de l’excédent de taxes déductibles, ce qui revient à supprimer progressivement le butoir.