Grande Encyclopédie Larousse 1971-1976Éd. 1971-1976
I

immunologie (suite)

La tolérance peut être obtenue non seulement à l’état physiologique chez le fœtus, mais aussi chez l’adulte. Il faut pour cela se placer dans des conditions particulières : ou bien on injecte des doses massives d’antigène (c’est ce qu’on appelait la paralysie immunitaire) ou au contraire des doses très faibles, subimmunogéniques, ou bien on réduit le nombre des cellules lymphoïdes par un traitement immunodépresseur. En effet, la tolérance est un phénomène central, cela veut dire qu’elle s’établit au niveau des cellules immunologiquement compétentes et en particulier du petit lymphocyte.

La transmission de cellules lymphoïdes d’animaux tolérants à des animaux normaux et vice versa a montré qu’il ne s’agit pas d’une simple neutralisation des anticorps produits par un excès d’antigène. De plus, l’ablation du thymus chez la Souris nouveau-née induit un état de tolérance.

Enfin, la tolérance est spécifique et ne s’exerce que pour le même antigène que celui qui est utilisé initialement.

L’importance des phénomènes de tolérance immunologique apparaît donc considérable ; en effet, si un sujet peut être rendu tolérant à l’égard des cellules d’un autre sujet, il ne rejettera aucune greffe provenant de celui-ci.


Les processus auto-immunitaires

Le concept d’auto-immunité est a priori étonnant, car une substance ne peut classiquement être antigénique pour un organisme que si elle lui est étrangère. Or, il existe des maladies au cours desquelles on met en évidence dans le sérum du malade des anticorps dirigés contre certains constituants de ses propres organes : anticorps antithyphoïde, anti-muscle lisse ou strié, antimyéline, antinucléaire, antiestomac, anti-globules rouges ou antiplaquettes... Cela ne signifie pas pour autant que les lésions soient dues à ces auto-anticorps ; ils peuvent n’être que secondaires aux altérations tissulaires, comme par exemple les anticorps antimyocarde au cours de l’infarctus du myocarde.

Les interprétations données aux phénomènes auto-immunitaires sont multiples. Certains constituants de l’organisme peuvent échapper à un contact avec les cellules immunocompétentes durant la vie fœtale ; tout contact ultérieur avec ces mêmes cellules suscite la formation d’anticorps contre ces antigènes reconnus comme étrangers et pour lesquels l’organisme n’est pas tolérant. Par exemple, l’organisme n’acquiert pas de tolérance pendant la vie fœtale pour les constituants du cristallin, pour la thyroglobuline des vésicules thyroïdiennes, pour la myéline de la substance blanche du système nerveux, pour les spermatozoïdes du testicule du fait de leur exclusion circulatoire, sanguine ou lymphatique. Tout contact ultérieur de ces substances avec les cellules immunocompétentes (à l’occasion par exemple d’une blessure accidentelle du cristallin lors d’une plaie de l’œil) peut entraîner une réaction immunitaire se manifestant par une kératite, une thyroïdite, une encéphalite, une orchite...

Une autre possibilité est que certains constituants de l’organisme soient modifiés par un Virus, une substance chimique, des rayons X et deviennent ainsi « étrangers ».

Il est encore possible que certains antigènes extérieurs puissent présenter une réactivité croisée avec des constituants de l’organisme.

Enfin, le processus auto-immunitaire peut être dû dans certains cas à un dysfonctionnement central, en particulier du thymus.

Syndromes cliniques dus à des perturbations immunologiques

Affections du sang ou immuno-hématologiques

Ce sont les accidents transfusionnels (v. transfusion), la maladie hémolytique du nouveau-né (enfant Rh + de mère Rh – ayant développé des anticorps anti-Rh au cours d’une précédente grossesse*), les anémies hémolytiques avec auto-anticorps.

Maladies allergiques

Ce sont certains asthmes et urticaires, les dermites de contact (lésions eczémateuses produites par de nombreuses substances chimiques), certains accidents médicamenteux (éruption de la pénicilline, intolérance à l’iode), certaines encéphalites (telle celle qui peut succéder à la vaccination contre la rage), quelques thyroïdites, glomérulonéphrites, certaines affections oculaires et peut-être d’autres maladies telles que la sclérose* en plaques, la rectocolite hémorragique...

Rejet des homogreffes

V. greffe.

Perturbations des centres immunitaires

Elles sont observées au cours de la maladie de Hodgkin (v. leucocyte), de Kahler (v. os).

Déficiences immunitaires

Ce sont l’agammaglobulinémie (v. protide) et l’absence congénitale de thymus*.


Immunologie des greffes

Le rejet des homogreffes (provenant d’un individu de la même espèce) est de nature immunologique.

Il est lié aux nombreux antigènes que porte le greffon et que ne possède pas le receveur. La réaction de transplantation, comme toute réaction immunitaire spécifique, comporte deux éléments : une réaction humorale, avec production d’anticorps, et une réaction cellulaire spécifique, avec notamment des phénomènes d’hypersensibilité retardée.

Le destin d’un greffon dépend d’une double réaction : d’une part une réaction de rejet, en général prédominante et transmissible à un autre animal par les cellules lymphoïdes sensibilisées, et d’autre part une réaction de facilitation, transmissible par le sérum du même donneur.

Ainsi, le développement de l’étude des antigènes de transplantation (commencée avec les groupes leucocytaires) et des conditions de la facilitation immunitaire doit jouer un rôle fondamental dans le succès futur des transplantations par le conditionnement du receveur (v. greffe).


Grossesse et immunologie

La grossesse* est un aspect particulier et fort intrigant de l’immunologie de transplantation ; le fœtus constitue en effet une allogreffe puisqu’il possède une moitié des antigènes paternels, qui sont étrangers pour la mère. L’explication peut être trouvée dans le passage continu de globules rouges et de globules blancs du fœtus dans la circulation de la mère à dose subimmunogénique, qui pourrait induire un état de tolérance de la mère à l’égard des antigènes paternels. Mais il semble également que la mère élabore des anticorps facilitants dirigés contre les antigènes paternels et que les cellules trophoblastiques du placenta ont aussi un rôle protecteur.