Grande Encyclopédie Larousse 1971-1976Éd. 1971-1976
H

Hominiens

Sous-ordre de Mammifères qui n’est plus aujourd’hui représenté que par l’espèce humaine.


C’est l’un des quatre sous-ordres constituant l’ordre des Primates, les trois autres étant les Lémuriens, les Tarsiens, les Simiens. Les Hominiens renferment la famille des Oréopithécidés (avec le genre Oreopithecus) et la famille des Hominidés, comprenant les genres Australopithecus et Homo.


Observations taxinomiques

La découverte de nombreux échantillons, parfois en bon état, une meilleure connaissance des fossiles remettent souvent en question les classifications antérieures, qui subissent des remaniements profonds.

Ainsi, les dernières classifications (E. Mayr, 1963 ; B. G. Campbell, 1963), se fondant sur des faits qui incitent à reculer de plus en plus la séparation de la lignée humaine du tronc des Primates, reconnaissent la nécessité de créer un sous-ordre nouveau regroupant les Hommes fossiles et actuels.

Ces novations modifient la famille des Pongidés. En effet, jusqu’alors, les Simiens renfermaient les Platyrhiniens, ou Singes du Nouveau Monde, et les Catarhiniens, ou Singes de l’Ancien Monde ; ces derniers se subdivisaient en Cynomorphes et Anthropomorphes ; deux familles constituaient les Anthropomorphes, celle des Hylobatidés (Gibbon) et celle des Pongidés (Orang-Outan, Chimpanzé, Gorille, Homme). L’Homme, retiré des Pongidés et donc des Simiens, appartient au nouveau sous-ordre des Hominiens. Ce changement se justifie parce qu’il est admis que les Hominiens se sont séparés depuis fort longtemps des Simiens ; peut-être même n’ont-ils jamais été confondus, les Hominiens prenant naissance à une date encore plus reculée sur la souche commune des Primates. L’Homme est un authentique Primate, mais ses liens avec les Simiens sont moins étroits qu’on ne l’admettait autrefois.

La classification des Hominiens est assez confuse, chaque Hominien fossile découvert recevant généralement un nom générique et spécifique sans tenir compte ni des affinités ni des règles de la nomenclature. Aussi beaucoup de synonymies interviennent-elles.


Famille des Oréopithécidés

Les premiers restes de l’Oréopithèque (Oreopithecus bambolii) furent découverts en 1872 par Paul Gervais dans les lignites d’âge vindobonien (Miocène supérieur) du mont Bamboli en Toscane. Étudiés par P. Gervais et Albert Gaudry, ils furent ensuite l’objet d’un travail d’ensemble (1954) du Suisse J. Hürzeler, qui découvrait (1958) dans le même gisement un nouveau squelette presque entier ; des précisions furent apportées aux précédentes descriptions. Parmi les caractères intéressants, citons cinq grosses vertèbres lombaires (trois ou quatre chez les Pongidés) légèrement carénées (trait primitif), un large bassin ; la morphologie et les articulations des os longs du squelette permettaient une position plus ou moins érigée et donc une tendance vers la bipédie se dessinait. Mais le bras est plus long que la jambe, ce qui caractérise la brachiation, donc un mode de vie arboricole.

Le volume endocrânien a une valeur moyenne de 400 cm3 (élevée pour un Primate du Miocène). La brièveté de la mandibule, la naissance de l’arcade zygomatique au-dessus de la dernière prémolaire entraînent un raccourcissement de la face, caractéristique de l’Homme moderne.

Les dents présentent un grand intérêt ; leur grandeur relative, la morphologie et la disposition verticale de la canine, l’absence de diastème, l’homomorphie des prémolaires inférieures les rapprochent des dents humaines.

Mais l’importance des canines (pointues) et le dimorphisme sexuel qu’elles présentent ne sont pas des traits humains.

J. Hürzeler classe (1968) l’Oréopithèque dans les Hominiens ; détaché précocement du tronc humain, il porte des spécialisations particulières (redressement du corps, élargissement du bassin, bipédie possible) qui permettent d’en faire le représentant de la famille des Oréopithécidés, annonciatrice de celle des Hominidés.


Famille des Hominidés

Elle comprend les deux genres Australopithecus et Homo, qui seront envisagés successivement.


Genre Australopithecus

Les Australopithèques sont connus par d’abondants fossiles (crânes, mandibules, dents, membres supérieurs et inférieurs, régions thoraciques, bassins...) découverts en Afrique du Sud (et non en Australie comme leur nom pourrait le suggérer).

Le premier crâne, celui d’un jeune, fut trouvé près de Taungs par Raymond A. Dart (1924) ; les autres stations sont à Sterkfontein, Kromdraai, Swartkrans, Makapansgat. Des gisements existent aussi en Afrique orientale (Oldoway [ou Olduvai], Garusi, Peninj, vallée de l’Omo) et à Java.

Les fossiles ont été récoltés dans des sédiments d’âge quaternaire (Pléistocène inférieur et début du Pléistocène moyen). En Afrique du Sud, ils sont dans des brèches très dures formées par des matériaux de remplissage de grottes creusées dans des calcaires dolomitiques.

Les uns, de petite taille (1,15 m), appartiennent à l’espèce A. africanus ; les autres, plus grands (1,55 m), constituent l’espèce A. robustus ; ces derniers sont nettement plus robustes, avec des dents volumineuses et des insertions musculaires très développées ; elles nécessitent la présence sur le crâne d’une crête osseuse rappelant celle du crâne des grands Singes mâles (Gorille, Orang-Outan).

Tous ont acquis la station droite ; ils pratiquent une locomotion bipède, ainsi que le révèlent une série de caractères : position presque horizontale du trou occipital, courbures de la colonne vertébrale, puissantes vertèbres lombaires (la 5e faisant saillie), forme évasée du bassin, conformation du pied adaptée à la marche bipède.

Ils présentent un mélange de caractères simiens et de caractères humains. Parmi les premiers se trouvent des particularités crâniennes (crêtes et bourrelets, principalement chez A. robustus) et dentaires (très grosses prémolaires et molaires, alors que les incisives et canines ont des dimensions normales). Les caractères modernes, ou humains, comprennent la station droite, la structure de la voûte palatine, la forme parabolique des arcades dentaires, l’absence de diastème (les dents sont disposées régulièrement), le dessin bicuspidé de la première prémolaire inférieure et l’élargissement vestibulo-lingual de sa couronne. Les membres postérieurs, relativement courts, sont plus longs que les membres antérieurs, qui sont puissants.

La capacité crânienne oscille de 450 à 500 ou 550 cm3. Les moulages endocrâniens révèlent un changement de la forme du cerveau, qui est long et étroit ; les mesures montrent qu’il y a dolicho-encéphalie, alors que chez les Anthropoïdes il y a brachy-encéphalie. Le lobe frontal est plus développé, et la flexure de l’encéphale est bien marquée.

Les différences entre les deux espèces A. africanus et A. robustus, selon J. T. Robinson (1968), sont résumées dans le tableau suivant :

Selon Robinson, l’aspect extérieur de A. robustus serait plus « gorilloïde ». Plus tardive, cette espèce possède des caractères plus spécialisés.