Hals (Frans) (suite)
C’est de 1616 que date la première commande du peintre, le Banquet du corps des archers de Saint-Georges (Haarlem, musée Frans Hals), portrait collectif dans la tradition iconographique de Cornelis van Haarlem. Chacun des douze personnages groupés autour de la table est traité comme un portrait individuel : les visages, tous empreints de jovialité, ont cependant, chacun, leur caractère et leur vie propre, et c’est là que réside l’innovation de Hals. L’animation générale, rendue par les attitudes, l’obliquité des poses, l’aération spatiale sont autant d’éléments d’une esthétique nouvelle. Tous les portraits de Hals, dès lors, possèdent le trait caractéristique surpris dans le modèle, qui l’individualise et le rend vraiment naturel. Dans le Banquet du corps des archers de Saint-Adrien de 1627 (Haarlem, musée Frans Hals) se retrouvent les mêmes caractères de vérité, mais avec une composition où la volonté d’animation n’exclut pas un certain désordre. Ce n’est que vers 1630-1635 que Hals réussit à simplifier ses compositions : les contours de ses formes se font moins accidentés ; les fonds s’assombrissent, et, dans les visages, la couleur et le modelé se font plus violents. La Réunion des officiers du corps des archers de Saint-Adrien de 1633 (Haarlem, musée Frans Hals), qui se détache sur un fond très sombre et un arrière-plan de paysage très artificiel, est d’une composition plus simple, plus statique, mais toujours aussi captivante par l’expression particulière de chacun des quatorze personnages. En 1641, nouvelle commande : les Régents de l’hôpital Sainte-Élisabeth à Haarlem, tableau d’une tonalité plus grave, où les teintes sont réduites à des blancs purs argentés et des noirs profonds. En 1644, Hals fait partie du Conseil de la gilde de Haarlem ; il peint le portrait de Descartes (Louvre) en 1649 et celui de l’Homme au gant (Londres, National Gallery) en 1655, dans lesquels le réalisme formel qu’il avait jusqu’alors recherché fait place à l’expression de l’âme. À partir de 1654, sa vie s’assombrit : en 1662, il demande un secours à la municipalité. Âgé de plus de quatre-vingts ans, il peint en 1664 pour l’hospice des vieillards les deux tableaux émouvants des Régents et des Régentes (musée Frans Hals, installé dans l’hospice), images pathétiques et lucides de la vieillesse. Ces deux derniers chefs-d’œuvre de Hals, étonnants à l’époque par leur expression spontanée toute moderne, loin des conventions stylistiques d’alors, ne suscitèrent que de piètres imitations contemporaines. Ils ne retrouvèrent leur influence novatrice qu’au xixe s. avec Manet et ses successeurs.
P. H. P.
N. S. Trivas (sous la dir. de), The Paintings of Frans Hals (New York, 1941). / P. Descargues, Frans Hals (Skira, Genève, 1968). / S. Slive, Frans Hals (New York et Londres, 1971 ; 2 vol.).
Catalogue d’exposition : Frans Hals (musée Frans Hals, Haarlem, 1962).